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9 mai 2012 3 09 /05 /mai /2012 15:38

Je resserrai les mains sur le mug de café bien chaud que Michael venait de me servir. Savourant la chaleur qui s’en dégageait je m’aperçus que mes mains étaient gelées.

- Alors ? Commença Nathan. On peut parler librement ?

Mon compagnon se concentra un instant, les yeux fermés, et acquiesça d’un signe de la tête.

- Oui, ils sont tous rentrés chez eux. Ajouta-t-il.

Michael avait fait place libre ce soir, intimant à tous les loups présents dans sa demeure de rentrer chez eux. Ne restait plus que ses plus proches partisans, ainsi que moi et Julian. Il souhaitait discuter de ce qui venait de se passer mais uniquement avec ceux en qui il avait une entière confiance, ce qui comprenait Nathan, Thomas, Van, moi-même et Julian qui, à l’instar de son nouveau rôle de dominant, bien que pas encore officialisé, avait pris du grade au moins dans l’estime de Michael.

Ce qui expliquait donc que nous nous retrouvions attablés dans la cuisine, autour d’une tasse de café pour moi et de quelque chose de plus fort pour les loups. Ils semblaient tous en avoir besoin, quant à moi j’ignorais à quoi je ressemblais, mais étant donné le soin tout particulier qu’apportaient les loups à me rendre les choses plus faciles, j’imaginais assez aisément que je ne devais pas être l’image même de la sérénité.

- Bon alors c’était quoi ce bordel ? Dit Van, démarrant les hostilités. Et qu’est-ce qu’on fait ici au lieu de casser du vampire ?

Il était clairement énervé ce que je comprenais. On en avait tous pris pour notre grade, et chacun de nous abordait la révélation de ce soir à sa manière. Visiblement pour Van c’était la colère.

- Calme-toi Vanniel. Lui ordonna Michael. Il faut… Il faut que j’y réfléchisse. C’est pour ça que je veux savoir ce que vous en pensez. J’ai pas passé quinze ans de ma putain de vie à obéir aux petits jeux pervers du Maître pour lancer mes loups dans une guerre ouverte à peine 3 ans après ça.

Je réprimai un frisson à ces mots. Mon dieu, si j’étais vraiment la cause de tout ça… Michael ne me le pardonnerait jamais.

- Il y a aussi la possibilité qu’il nous ait mentis. Déclara calmement Nathan.

Thomas releva brusquement la tête de dessus son verre de scotch.

- Je ne crois pas. Je veux dire… il était fou mais… il a dit la vérité, j’en suis certain. Les… les détails qu’il a donné sur la mort de Bellinda, ils étaient tous exacts.

- Ca ne veut pas dire qu’il n’a pas mentis pour le reste. Ajouta néanmoins Michael.

-Et… Ça te parait plausible à toi ? Demanda Nathan à mon compagnon.

Michael soupira profondément avant de répondre.

- Je ne sais pas, j’ai du mal à le concevoir. Durant ces quinze ans, j’ai eu le temps de comprendre comment fonctionnait le Maitre. C’est une enflure c’est clair mais… bordel, l’honneur est tout pour lui. Je ne le vois pas briser un serment sous prétexte d’une potentielle menace. Et je n’arrive toujours pas à comprendre en quoi le fait que j’ai pris Lucy pour compagne puisse être si dangereux. D’accord, ils ont l’air de savoir des choses qu’on ne sait pas nous-même, mais bordel, c’est une guérisseuse ! Qui plus est même avant ça, elle était déjà de notre côté alors je ne comprends rien.

J’avais moi-même une petite idée différente des raisons du Maître mais je n’osai pas l’exposer comme ça, devant Michael, devant tout le monde. Mais c’était sans compter sur le lien qui me liait à mon loup.

- Lucy ? Tu as quelque chose à dire ?

Tous les loups se tournèrent vers moi dans un même mouvement. Je relevai les yeux, le nez encore plongé dans ma tasse. Je soupirai moi aussi, mon souffle formant de petite vaguelette sur la surface ébène du liquide amer.

- Est-ce que… Tu as envisagé la possibilité que… Enfin Michael, si le Maître envoie une formation pour attaquer ta meute juste après que tu m’aies prise pour compagne, et au vu de votre passé ensemble… ce n’est peut-être pas une coïncidence.

Bon je n’avais peut-être pas choisi les meilleurs termes, me dis-je en constatant la tension qui saisit le corps de Michael à l’écoute des mots « passé ensemble ». Ok, ça évoquait un consentement d’un côté comme de l’autre, ce qui n’était clairement pas le cas, je le savais bien. J’avais foiré dès ma première intervention ! Bravo Lucy ! Dix sur dix ! Si ça continue comme ça, on va te décerner le prix de la plus grande gaffeuse de tous les temps.

- Lucy, c’était…

- Non attends, je sais, je n’aurais pas dû dire ça, ce n’était pas ce que je voulais dire. Mais tu dois avouer que c’est quand même une drôle de coïncidence. Je sais bien que de ton côté, c’est le devoir envers ta meute qui a dicté tes actes, mais… de son côté à lui… ? As-tu déjà réfléchi à ce qui l’a poussé à poser cette condition ?

- Je ne vois pas où tu veux en venir. Me dit mon compagnon, de plus en plus perplexe.

Je regardai Nathan, Thomas et Van, qui semblaient tout aussi gênés que moi. Aucun doute là-dessus, eux avaient compris où je voulais en venir.

- Vous l’avez remarqué vous aussi n’est-ce pas les gars ? Et pas seulement la dernière fois, ça remonte à plus longtemps que ça puisque même toi Nathan, tu t’en aies rendu compte. Et pourtant, vous n’avez pas envisagé cette hypothèse une seule fois ? Je ne vous comprends pas.

Le sujet m’agaçait sans que je puisse m’en empêcher.

- Bon, j’aimerais comprendre de quoi vous parlez, une bonne fois pour toute. Reprit Michael qui s’impatientait visiblement.

- Lucy pense que ce qui a pu pousser les vampires à nous attaquer, sous couvert d’une potentielle menace, serait en fait, les sentiments du Maître… pour toi. Expliqua alors Nathan, d’une voix sans intonation.

- Les quoi ? S’étouffa presque mon compagnon.

- Il est dingue de toi Michael, ça crève les yeux, même pour moi ! Lui répondis-je. Quand je l’ai rencontré j’ai directement ressenti une certaine antipathie à son égard. A l’époque j’ai mis ça sur le compte de sa nature de vampire, mais ça va bien plus loin que ça. Je ne peux pas m’empêcher de le haïr, et pas seulement pour ce qu’il t’a fait. Je crois que je me suis immédiatement rendue compte qu’il ne laisserait jamais tomber, qu’il ne t’abandonnera pas aux mains de quiconque.

Michael écarquilla les yeux et déglutit plusieurs fois, péniblement.

- Attendez, je crois que vous n’avez pas cerné le personnage. Nous dit-il. Il n’agit pas par amour où je ne sais quoi. Je veux dire… Il n’est pas capable d’un tel sentiment, ça j’en suis certain. Ce qui le pousse c’est le pouvoir et la concupiscence, comme tous les vampires un peu puissants.

- Non Michael, Lucy a raison, je l’ai ressenti de la même manière. Intervint Van. C’est toi qui es aveuglé par ta haine. Son comportement avec toi… ce n’était pas de la concupiscence… enfin pas seulement.

L’alpha se passa lentement la main sur le visage avant de nous observer, les yeux hantés.

- Et vous pensez qu’il a agi par quoi ? Jalousie, c’est ça ?

- Ca a du sens Michael, quoi que tu en dises. Il t’a eu à sa merci pendant quinze ans, il pensait sans doute t’avoir brisé. En me mettant à sa place je me dis qu’il a dû penser que s’il ne pouvait plus t’avoir alors, il serait heureux que personne ne t’ait non plus. Et voilà que tu trouves ta compagne ! Bon sang, moi ça m’aurait rendue folle… tu… tu es le genre de mecs qui déclenche ce genre de réaction chez les autres. Expliquai-je fébrilement.

Michael ne bougeait plus à la fin de mon explication, je me demandai même s’il respirait, les yeux obstinément fixé au fond de son verre, le liquide ambré se reflétant dans son regard émeraude. Il finit par relever la tête au bout de nombreuses secondes de silence.

- Vous avez raison, c’est… plausible. Il en serait capable… oui je pense qu’il en serait capable.

Je sentis soudain le besoin pressant d’aller m’aérer, de sentir de l’air frais sur mon visage, de respirer à plein poumon, d’expulser le poids énorme dont je n’arrivais pas à me débarrasser et qui comprimait ma poitrine, enserrant ma gorge par la même occasion. Et puis je réalisai que ce poids n’était pas le mien, il était trop ancien, teinté de rancœur et de dégout. Je rapprochai ma chaise de celle de Michael et posai ma tête sur son épaule. Et comme ça, sans rien dire de plus, le poids s’en alla comme il était venu, ne laissant que mon propre sentiment de culpabilité, avec toute la place disponible pour s’épanouir.

- Ce n’est qu’une hypothèse. Finis-je néanmoins par briser le silence. Il y a aussi la possibilité que le vampire ait dit la vérité.

Prononcer ces mots à voix haute ne m’apaisa aucunement, contrairement à la croyance populaire. Enoncer quelque chose que l’on garde pour soit n’a pas toujours pour effet le soulagement, et dans ce cas, ça ne faisait que rendre un peu plus réel, le cauchemar dans lequel j’étais.

Les loups me regardèrent tous avec inquiétude et Michael me saisit la main.

- Dans ce cas, on fera ce qu’il faudra pour qu’ils ne puissent pas t’atteindre. On te protègera quoi qu’il nous en coute. Me promit Michael. Les loups acquiescèrent tous en silence mais avec détermination.

Merde ! Voilà qui ne me consolait pas, mais alors pas du tout. Il faisait une grosse erreur en pensant que ce qui m’effrayait était qu’on s’en prenne à moi, non, ça je pouvais faire avec, mais provoquer la mort d’autres loups… ça me serait insoutenable.

- De toute façon, on ne peut rien dire tant que nous n’en savons pas plus, et les propos du vampire peuvent aussi bien être sans fondement, alors je refuse de m’inquiéter de ça pour l’instant. Dit Van en croisant les bras d’un air buté sur la poitrine.

Je savais qu’il tentait de détourner le fil de mes pensées, m’incitant à ne pas trop m’attarder sur le sujet, aussi, je lui adressai un sourire timide, reconnaissante.

- Et puis nous avons un autre problème. Dit alors Nathan, prenant la parole d’un air solennel. J’en ai déjà parlé avec Michael, et c’est aussi pour cette raison que nous sommes en aussi petit comité.

Chacun de nous se concentra sur les mots du lieutenant, inquiet de la tournure que prenait le ton de sa voix. Qu’allait-il encore nous tomber dessus ? Michael avala le contenu restant de son verre d’une seule gorgée et serra les dents, sa mâchoire frémissant de spasmes inconscients.

- Il y a sans doute une taupe dans la meute.

Le coup qui venait d’être asséné était tel qu’un silence de plomb retomba sur la pièce. Pendant de longue secondes, personne n’osa prononcer le moindre mot. Et puis Van craqua.

- Mais bordel ! Qu’est-ce que c’est que ces conneries ? Une taupe ? Et puis quoi encore ? Merde Michael, dis quelque chose ! Tu ne peux pas croire que l’un d’entre nous pourrait te trahir ! C’est impossible ! Je n’arrive pas à y croire !

- Calme-toi Van. Lui ordonna son alpha. Tu crois que je ne dis rien de gaité de cœur ? J’ai entièrement confiance en chacun de mes loups. Mon instinct ne m’a jamais trahi concernant ma meute mais là, je dois avouer que les faits…

- Les faits ? Mais quels faits bordel ? Qu’est-ce qui justifie que tu doutes de l’un d’entre nous ?

- ça suffit ! S’emporta Michael en tapant sur la table. Rassis-toi et écoute bon sang ! Tu crois que j’ai besoin de tes leçons de morale ? Tu crois que je ne ressens rien quand je t’annonce qu’un de mes loups me trahit sans doute en ce moment même ? Tu me demandes quels faits ? Je vais te le dire ! Nos six frères morts dans l’attaque, voilà les faits en question. Merde ! Quand j’y pense ça me rend malade ! Les évènements se sont enchainés et je comprends que pas un de vous n’y ait pensé mais putain, des vampires dans ma maison, Van ! Dans ma maison ! Tu expliques ça comment toi ?

Le choc s’inscrivit sur les traits de Van qui retomba sur sa chaise telle une masse sans force.

- Quelqu’un les a laissé entrer. Murmura Thomas à bout de souffle.

- Mais qui ? Qui ferait ça, et pourquoi ? Demanda Julian qui osait enfin prendre la parole.

Tous les loups se tournèrent vers Michael en quête de réponses.

- C’est là qu’il y a un autre problème. Je n’en sais rien et je ne comprends pas comment c’est possible. Si l’un de mes loups décide de me trahir, le sentiment engendré est si puissant que je devrais le ressentir, à travers mon lien avec la meute. Expliqua-t-il à mon adresse. Or, je ne sens rien, rien du tout. Même en me concentrant sur chacun de vous, tout ce que je sens c’est de la loyauté et je n’arrive pas à m’imaginer que l’un de vous puisse…

Michael ne finit pas sa phrase, les mots devenant trop douloureux à prononcer.

- Bien sûr que non ! Si tu ne sens pas la trahison chez l’un de nous, c’est parce qu’il n’y a pas de traitre, un point c’est tout. Trancha Van.

Michael regarda son lieutenant, si certain de la loyauté de ses compagnons et une lueur d’espoir s’alluma dans ses yeux. Or, il fallait se rendre à l’évidence, l’espoir n’était pas permis, au regard des évènements la conclusion logique était qu’il y avait effectivement une taupe dans la meute.

- Et comment tu expliques que les vampires aient pu entrer dans la maison ? Tu penses vraiment que l’un des loups les a laissé entrer par mégarde ? Dis-je d’un ton sec. Bon sang, on n’avait plus la possibilité de tergiverser. Si l’un des loups était un traître, nous étions tous en danger.

- Je n’en sais rien, mais je sais que tous autant qu’ils sont, aucun des loups de cette meute ne trahirait Michael ! Jamais ! Même pas pour tout l’or du monde.

- Je suis assez d’accord avec Van sur ce point Lucy. Ajouta Thomas. Ils ont de nombreux défauts mais la duplicité n’en fait pas partie. Je sais que c’est un peu difficile à appréhender pour toi qui n’est pas louve mais tu dois comprendre que le lien qui unit chaque membre de la meute à l’alpha pousserait la majeure partie d’entre eux à se couper un bras plutôt qu’à trahir leur chef.

- Et en ce qui concerne l’infime partie que tu n’inclus pas dans cette catégorie ? Demandai-je en pensant tenir un argument.

- Les autres loups, ce sont nous, ceux autour de cette table, ceux qui ne donneraient pas leur bras mais leur vie pour Michael. Dit Van, l’air solennel. Thomas acquiesça.

- Dans ce cas, comment expliquer la réaction de Farkas ? Michael tiqua au nom du loup qui s’était retourné contre lui en voulant m’attaquer, et qu’il avait dû tuer.

- Farkas a toujours évolué un peu en marge de la meute, il n’aurait jamais dû devenir loup pour commencer. Son caractère profond était trop fluctuant pour avoir le contrôle nécessaire. Qui plus est, il n’a jamais cherché à se mêler à nous, je pense que son intégration dans la meute n’était essentielle pour lui que pour assurer sa protection. Ça arrive parfois, certains loups sont trop… indépendants. M’expliqua Michael.

- Très bien, mais dans ce cas, comment expliquer le sang, chez les vampires, celui qui a mis le feu aux poudres ? Parce que la théorie de la taupe expliquerait la présence de ce sang chez les vampires, il aurait pu leur en donner un peu pour provoquer le désastre qui a suivi. Arguai-je, bien décidée à leur faire ouvrir les yeux.

Je n’avais pas songé qu’un traitre puisse se cacher dans la meute mais à partir du moment où l’idée avait été lancée, plus j’y avais réfléchi et plus ça m’avait semblé plausible.

- Le sang ne provient pas forcément d’un des loups de cette meute, ils auraient pu se le procurer n’importe où ! Répondit Thomas.

J’observais Van à la dérobée. Celui-ci fixait son verre avec silence, les sourcils froncés.

- Je ne crois pas, non ! Au moment où tu t’es fait transpercer… Dis-je à Van. Tu voulais me dire quelque chose sur ce sang, et je suis quasi-certaine que tu l’avais reconnu.

- Raison de plus Lucy. Annonça le lieutenant. J’ai déjà vécu longtemps, et dans de nombreuses meutes, alors que je ne suis ici que depuis une dizaine d’années. Il se peut tout à fait que j’ai rencontré le propriétaire de ce sang ailleurs qu’ici.

Ok, ça je pouvais le concevoir.

- Et… Tu ne te souviens toujours pas ?

Van soupira avant de lever les yeux vers moi.

- j’ai essayé Lucy, j’ai vraiment essayé mais… c’est comme si un barrage bloquait mes souvenirs de ces moments-là, et les rêves que je faisais se sont arrêtés il y a plusieurs jours.

- Je vois. Dis-je, un peu déçue. Mais vous ne m’enlèverez pas l’idée qu’un traitre se cache dans la meute. Je veux dire… c’est la conclusion la plus logique. Sans compter que… Vous ne trouvez pas ça étrange que les vampires aient choisi ce soir-là en particulier pour attaquer ? Justement le soir où l’alpha s’est absenté, laissant la meute sans protection ?

- Et tu supposes que le traitre les aurait informés de votre soirée ? Demanda Nathan.

- Eh bien ça se tient. Conclus-je

- Mais bordel, pourquoi tiens-tu tant que ça à ce que l’un de nous soit une taupe ? S’insurgea soudain Van en bondissant de sa chaise.

Michael gronda une fois, et le loup se rassit immédiatement.

- Je n’y tiens pas, loin de là mais… si j’ai raison, nous sommes peut-être en danger et il y a déjà eu assez de morts. Et si l’un de vous était blessé ou pire… La suite de la phrase resta coincée dans ma gorge.

Van se renfrogna dans sa chaise en maugréant quelques obscénités.

- Ecoute Je sais que je donne l’impression de vouloir me disculper mais crois-moi, ce n’est vraiment pas le cas. Je sais bien que ce qui s’est produit est sans doute de ma faute mais je voudrais vraiment essayer de comprendre le pourquoi du comment.

Les loups se mirent tous à me fixer avec un air perplexe.

- Qu’est-ce que tu veux dire par « ta faute » amour ? S’inquiéta Michael.

- C’est bon, je veux dire, vous l’avez tous entendu comme moi. Il y a quelque chose chez moi qui a provoqué toutes ces catastrophes. Mais ça va. Je veux dire… vous y avez surement pensé aussi mais c’est normal… J’arrive et les tragédies s’enchainent… ça ne peut pas être une coïncidence.

- Oh merde ! Lucy ! Tu nous fais quoi là ? S’exclama Van en se levant précipitamment, pour venir s’accroupir à côté de moi, posant sa grande main sur mon genou. Dans le même temps, les trois mains de Nathan, Thomas et Julian, se tendirent dans ma direction, saisissant mes propres mains et mon bras. Michael passa son bras autour de mes épaules, m’attirant à lui dans une étreinte d’ours.

- Lucy ! Jamais nous n’avons pensé ça enfin. S’exclama Thomas.

- Il a raison amour. Quoi que cette sangsue ait dit, il ne l’a fait que pour te blesser, ne lui donne pas tant de crédits et ne te laisse pas avoir par un tel subterfuge. Me chuchota doucement Michael. Peu importe ce que tu es, moi je sais qui tu es pour moi, et pour mes loups, et c’est tout ce que nous avons besoin de savoir.

Bon sang ! C’était dans ces moments-là que la définition du mot « mignon » prenait pour moi, l’image de centaines de kilos de muscles gonflés à la testostérone.

- Tu fais partie de la famille, et on protège notre famille. Déclara Nathan, m’arrachant un sourire, lorsque je constatais que cette réplique aurait eu une place de choix dans la trilogie du « Parrain ».

- Merci. Leur dis-je en serrant les mains qu’ils avaient tendues vers moi et en embrassant Michael sur la joue. Mais ça ne fait pas avancer nos hypothèses. Van je sais que c’est difficile à concevoir pour toi mais en tant que « non-louve » justement, je pense que mon jugement n’est pas faussé par ce lien qui vous unit à Michael, puisque celui que je partage avec lui est d’un tout autre ordre.

- C’est aussi exacte Van, tu ne peux pas le nier. Insista Michael.

- Je suis d’accord sur ce point mais si je trouve cette hypothèse si inconcevable justement, c’est parce que je ne vois pas quelles raisons un loup aurait de s’allier aux vampires.

- Et si… Ce n’est qu’une idée mais… si c’était pour le pouvoir ? Après tout, dans l’état actuel des choses, y’a-t-il un loup susceptible d’être assez puissant pour défier Michael en duel ? Demandai-je. Les loups me fixèrent avec intérêt, comme si j’avais mis le doigt sur quelque chose. Peut-être qu’un loup de la meute s’est associé aux vampires qui cherchaient un moyen de m’atteindre. Si on y réfléchit, avec l’absence de Michael, ils devaient penser pouvoir nettoyer le terrain facilement et nous attirer par la même occasion. Ensuite ils n’auraient eu qu’à nous tomber dessus à eux cinq et le tour était joué, plus de couple alpha, plus de problème !

- Sauf qu’ils ne s’attendaient pas à trouver les trois lieutenants sur place. Intervint Michael. Quand on y pense, toi Van, tu n’aurais pas dû revenir si vite après avoir déposé Lucy, quand à toi Thomas, c’est un jour de la semaine où tu n’es jamais présent normalement. Reste Nathan, mais ils ont dû penser qu’avec ta femelle à protéger, tu ne les traquerais pas, ils n’avaient pas imaginé que Marli parviendrait à s’échapper. Bon sang, ça commence à prendre forme !

- D’accord, donc si on part de ce principe… quel loup est le plus susceptible de vouloir le statut d’alpha ? Demandai-je.

- Aucun je dirais. Répondit Thomas. Je ne vois pas un seul loup souhaiter cette responsabilité où être assez dominant pour le vouloir.

- eh bien… pas tout à fait… Murmura Julian.

Il avait été tellement silencieux que nous semblions tous avoir oublié sa présence.

- Si tu sais quelque chose, parle loup. Ordonna Michael, voyant que le jeune lycan hésitait.

- En fait… J’ai entendu Vadim, une fois, qui parlait de créer sa propre meute. C’était avant ma transformation et personne ne faisait attention à moi alors.

- Vadim ? Mais c’est l’un de ceux qui a été tué ce soir-là ! M’exclamai-je.

- Oui je sais, c’est pour ça que je ne voulais pas en parler, c’est idiot ! Dit Julian.

- Non attends. Le reprit Van. C’est pas si idiot que ça. Après tout, Vadim arrivait juste en dessous de moi dans la hiérarchie, et s’il voulait créer sa meute, il a peut-être voulu emmener certains loups de celle-ci avec lui, mais il savait que tu ne le laisserais pas faire aussi, il avait besoin que tu sortes du champ. Ça se tient ! Et ça expliquerait aussi pourquoi tu ne sens aucun loups sur le point de te trahir… parce qu’il n’y en a plus ! Il a très bien pu faire entrer les vampires, être retourné s’assoir au salon pour que personne ne se doute de rien et attendre bien gentiment que le carnage se produise.

- C’est bien beau comme hypothèse, mais je vous rappelle qu’il a été tué lui aussi, tu crois que ça faisait aussi partie de son plan ? Lui rétorqua Nathan.

- Attends, si c’est bien le cas, ses alliés étaient des vampires. Ils ont peut-être fait une erreur, où alors ils n’avaient pas l’intention de le laisser vivant une fois dans la place. Après tout, ils se moquent éperdument de ces histoires de pouvoir, leurs cibles étant Lucy et Michael.

- Ca tient la route en effet. Décida Michael. Merde! Vadim! Jamais je ne l’aurais cru capable de ça! Et je n’étais même pas au courant pour cette histoire de vouloir créer sa meute !

Il secouait la tête d’un air de dépit et je voyais bien que cette histoire l’affectait plus qu’il ne le laissait paraitre devant ses plus proches loups. Nathan lui posa une main sur l’épaule et la serra un peu, en un geste de soutien purement masculin. Ça ne m’étonnait pas que le premier lieutenant ait lui aussi discerné l’agitation cachée de mon compagnon. Il était capable d’une telle empathie envers lui que je me demandai, comme je l’avais déjà fait plus d’une fois, comment ces deux-là s’étaient rencontrés. En tout cas je ne m’étonnais plus depuis longtemps de l’amitié qu’ils partageaient et qui leur permettait aussi de dépasser parfois les bornes, sans que l’autre n’en tienne jamais rigueur au premier.

Je souris brièvement au premier lieutenant pour lui communiquer l’estime que je lui portais.

- Et maintenant ? Demanda Julian. Que va-t-il se passer ? Parce que même si nos hypothèses sont justes… hum… qu’est-ce qu’on est censé en faire ?

Michael soupira bruyamment. Et voilà nous en étions à la question cruciale, celle qu’il savait devoir aborder, celle qu’induisait son statut d’alpha. Et je comprenais rapidement que les deux choix s’ouvrant à lui n’étaient plaisants dans aucun des deux cas.

- Ils ont pénétré dans ma maison, ils ont assassiné mes loups, ils s’en sont pris à ma compagne… Je ne peux pas laisser passer ça. Il en va de l’honneur de la meute. Néanmoins je ne peux prendre une telle décision sans l’avis de mes lieutenants et de ma femelle, et c’est aussi pour ça que vous êtes ici ce soir. Aussi je vous le demande,

Que choisissons-nous ? Le retrait… ou la guerre ?

Les trois lieutenants se levèrent d’un même mouvement, posant les mains sur la table devant eux, se penchant en avant.

- La guerre ! Clamèrent-ils d’une même voix.

Je me reculai sur ma chaise pour accuser le choc ! Ainsi donc la décision était prise, et la guerre contre les vampires était déclarée. Et dans mon esprit, ça n’impliquait pas seulement la vengeance et l’honneur de la meute, mais surtout des morts… beaucoup de morts.

- Lucy ? Tu es la femelle alpha, j’ai besoin de ton assentiment. Déclara solennellement Michael.

Je pris le temps d’inspirer et d’expirer deux fois avant de répondre.

- Je n’ai sans doute pas encore intégré toutes les implications de mon rôle dans la meute mais s’il y a une chose que j’ai comprise, parce que je la ressens, c’est que j’occupe la place de… comment le dire… la mère. Je ne sais pas si l’honneur est plus important que la vie des membres de cette meute, et si je devais un jour faire ce choix, j’ignore si vous seriez d’accord avec ma réponse. Ce que je sais en revanche, c’est l’importance de cet honneur pour vous, et je comprends aussi que si un tel acte ne connait pas de répercutions, toutes les créatures un tant soit peu puissantes, vont penser qu’attaquer notre meute est un acte anodin. Alors en tant que votre amie, votre sœur, et ta compagne… Dis-je en observant chacun leur tour, Nathan, Thomas, Van puis Michael. Je suis contre les morts que va forcément engendrer cette guerre, mais en tant que femelle alpha… Je ferai tout ce qui est nécessaire pour protéger mes loups, aussi j’ajoute mon vote à celui des lieutenants. Je dis, la guerre !

- Très bien ! La guerre est déclarée ! Prévenez tous les loups qu’une session est prévue demain soir dans le gymnase pour déterminer d’un plan.

- Demain soir ? Demandai-je. Si tôt ?

- Nous n’avons plus de temps à perdre amour, notre réponse à l’attaque n’a déjà que trop tardée et je ne souffrirai pas plus longtemps que nos loups soient morts en vain. Mais pour l’heure, rentrez chez vous, la journée a été longue et j’ai besoin de mes lieutenants en pleine forme demain. Les congédia Michael.

Les quatre loups se levèrent, et finirent leurs verres d’une seule traite avant de nous saluer d’un mouvement de la tête et de se diriger vers la sortie sans dire un mot.

Je me tassai sur moi-même en regrettant déjà le choix que j’avais fait. Lorsqu’ils eurent tous passé le coin du couloir menant au salon puis à la porte d’entrée, un sentiment de panique m’assaillit. Et s’il s’agissait d’une des dernières fois où je les voyais, et si l’un d’entre eux, ou même plusieurs, était mortellement blessé… comment arriverais-je à le supporter ? La vengeance était-elle si importante qu’ils devaient risquer leur vie ? Et puis soudain certains mots du vampire me revinrent en mémoire. Je me levai à mon tour et fonçai en direction de la porte. Bon sang, tellement engluée dans mon auto-apitoiement, j’avais oublié Thomas.

Heureusement, celui-ci se tenait encore dans l’entrée lorsque j’arrivais en trombe pour lui saisir le bras et le retenir.

- Thomas ! Attends ! M’écriai-je en agrippant sa manche. Je me rendis alors compte qu’il tremblait de tout son corps. Merde ! Pourquoi avais-je tant tardé à m’inquiéter pour lui ?

- Qu’est-ce qu’il y a Lucy ? Me demanda-t-il. Son ton était dur et cassant et je comprenais qu’il parlait avec les dents serrées.

- Si… Si tu veux parler je suis là. Lui dis-je gentiment. S’il y a quoi que ce soit que je puisse faire… Tu dois être un peu confus alors…

- Confus ? Me coupa-t-il. Il n’y a pas une décision qui a été plus facile à prendre de toute ma vie. Les choses sont simples. Le chasseur qui a tué Bellinda devrait être mort et il ne l’est pas. Je ne vois pas ce qui devrait me rendre confus. Je vais le traquer et je vais le tuer.

Seigneur je n’en revenais pas, ses beaux yeux bleus clair venaient de se colorer du noir le plus profond, des yeux de son loup. Et puis un son humide parvint à mes oreilles, un bruit de gouttes s’écrasant sur le sol. Je baissai les yeux et constatai que du sang dégouttait des mains du lycan. Je me saisis rapidement de celle-ci avec inquiétude. Pourquoi était-il blessé ? Ma gorge se serra en constatant que les ongles de thomas s’étaient allongés en de griffes redoutables pendant qu’il m’avait parlée, et que celles-ci lui transperçait la peau alors qu’il avait serré ses poings le plus fort possible.

- Oh Thomas… Gémis-je.

Il me regarda puis fixa ses mains comme s’il les voyait pour la première fois. Il ne s’était visiblement pas rendu compte de son geste. Cette réalisation eut pour effet de le calmer instantanément, ses yeux reprenant la couleur azure d’un lagon du pacifique.

Ses traits se détendirent et il arracha ses mains blessées à ma prise avant d’entourer ses bras autour de moi.

Et puis il me chuchota des mots qui s’implantèrent au fond de moi aussi surement que s’il les avait cloués sur mon cœur.

- Je ferai tout pour que jamais, tu n’aies à souffrir de la même douleur que moi Lucy. Mais ce soir je ne dois pas être ta priorité. Tu as la chance de pouvoir être auprès de ton compagnon cette nuit. Alors va ! Et profite de lui et de tout ce que cette nuit a à t’offrir… Parce que s’il arrive un malheur, tout c’à quoi tu seras en mesure de penser sera le temps perdu que tu n’auras pas passé avec lui.

Je lui rendais à mon tour son étreinte. Ces moments qu’il avait perdus, il y pensait donc encore.

- Lucy. Me dit-il en plongeant ses yeux dans les miens. Les regrets… C’est ce qu’il y a de pire dans la vie… Alors va le rejoindre et sois heureuse ! Sois heureuse cette nuit, pour toute une vie ! Sois heureuse pour moi qui ne le serai jamais plus ! Et aime-le ! Parce qu’il n’y a pas un homme au monde qui mérite plus ce don que Michael.

Et sans attendre de réponses de ma part, il se tourna et sortit de la maison, s’enfonçant dans les profondeurs de la nuit.

Il n’eut pas même le temps d’entendre ce que je m’étais apprêtée à dire.

- Si ! Il y a toi !

 

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8 mai 2012 2 08 /05 /mai /2012 14:35

Je suis une fille forte ! Je suis une fille courageuse et je… Bordel mais à qui j’allais faire croire ça ? Ok, en fait j’étais morte de trouille. Ma dernière rencontre avec les vampires ne m’avait pas laissée le plus charmant des souvenirs, celle d’avant non plus d’ailleurs. Et là, encastrée entre Michael devant moi, Van sur mes pas, Julian à ma droite, et Thomas à ma gauche, je me sentais toute petite et très très faible. J’avais peur de ce sur quoi j’allais tomber en entrant dans la cellule, et le sourire inquiet de Julian ne me rassurait pas, mais alors pas du tout.

Les loups avaient été partagés quant à ma décision d’affronter le prisonnier et Van, le plus véhément de tous, avait tout fait pour me dissuader de mettre un pied dans la geôle. Mais j’avais tenu bon, je ne m’étais pas laissée démonter et là, maintenant, je commençais vraiment à le regretter. Bon sang mais comment j’étais censée être sereine quand je sentais mes gardes du corps, près de six cent kilos de muscles et de testostérone, plus tendus qu’un cardiaque qui doit subir son troisième pontage coronarien.

Dans quoi je m’étais encore fourrée ? Et surtout, pourquoi ça devait toujours tomber sur moi ?

Quand Nathan, en dehors de notre petite procession, tourna la clé du verrou de la porte qui menait à l’intérieur de la cellule, j’eus soudain l’impression de comprendre ce que ressentait l’agneau qu’on emmène à l’abattoir.

En entrant dans la pièce, je me concentrai sur ce qui me parvenait de ma vision périphérique, la vue étant totalement bloquée par le large dos de Michael devant moi. Il me dissimulait totalement, à dessein d’ailleurs. Il n’avait pas douté que le vampire ressentirait ma présence à l’instant où j’allais poser un pied dans la pièce mais il souhaitait retarder le contact visuel le plus longtemps possible.

La cellule était sombre, les murs de béton était brut, le sol ne présentait aucun revêtement et se composait du même matériau que les murs. Une odeur de saleté, de sueur et de sang planait dans l’air.

- Vous me l’avez amenée ? Entendis-je une voix inconnue s’élever. Elle avait l’intonation de la folie, à la fois mielleuse et empressée. Que se passe-t-il quand la petite souris entre dans l’antre du chat ? Dit-il à nouveau.

Je me recroquevillai sur moi-même, cette voix me glaçait le sang. Mon instinct me hurlait de prendre mes jambes à mon cou, et pourtant je restai là, sans bouger. Qu’est-ce qui n’allait pas avec moi ?

Un grognement terrifiant, chargé de menace, s’éleva de la poitrine de Michael.

Mon compagnon n’appréciait visiblement pas la comparaison imagée que le vampire venait de faire.

- Allez petite souris, sors de ta cachette que je puisse te voir. Minauda le vampire.

Michael se tourna vers moi un instant pour vérifier si j’étais prête, et j’aperçus finalement le prisonnier qui se dévissait le cou pour me voir.

- Tu te souviens amour ? Pas les yeux ! Ne le regarde jamais dans les yeux.

J’acquiesçai rapidement en déglutissant difficilement. Alors Michael se décala, très légèrement, d’à peine un pas, mais c’était suffisant pour dégager mon champ de vision. Je me trouvais à quatre ou cinq mètres du vampire mais c’était encore trop proche pour moi. Je voulais me reculer mais Van m’en empêchait et lui-même était déjà dos à la porte.

Pour obéir à la mise en garde de l’alpha, j’évitai consciencieusement de croiser le regard du prisonnier. Celui-ci, attaché par de gros anneaux sur une chaise en métal forgé, fixée au sol, gigotait comme un beau diable pour s’extirper de sa prison.

- Hum… petite souris. Geignit-il en inspirant bruyamment. Tu sens si bon, si bon pour une petite souris. Je veux te gouter, je suis sûr que tu es sucrée. Je veux te lécher et te sentir sous ma langue. Je veux te cajoler et te sentir sous mes doigts. Ton sang est comme un phare dans la nuit pour moi, il m’appelle, il m’invite, tu ne le sens pas ? Moi je ne sens que ça. Je veux te saigner, je veux te saigner, je veux te saigner. Chantonna-t-il finalement.

Il était définitivement fou, à moins qu’un vampire saint d’esprit ressemble à ça, après tout, il représentait parfaitement l’image démoniaque que je me faisais d’eux.

Pour ne pas me laisser aller à la panique, je me concentrai sur les liens qui empêchaient le vampire de s’approcher de moi. Les charnières de la chaise ne grinçaient même pas, c’était plutôt bon signe, il ne pourrait pas s’échapper.

- Ça suffit ! Tonna Michael en me faisant sursauter. Ne t’adresse pas à elle !

- Oh, le grand méchant loup est vilain avec moi petite souris, il ne veut pas me laisser me nourrir sur toi. Se plaignit de nouveau le vampire.

- Ca suffit j’ai dit ! S’emporta Michael qui s’approcha rapidement du détenu pour lui envoyer un magistral crochet du droit.

Le vampire éclata de rire et le son se répercuta dans ma tête longtemps après qu’il se fut tu.

- Tu protèges ta putain sale chien dégénéré ! Mais elle n’est que la putain d’une putain, es-tu bien sûr qu’elle le mérite ? Siffla-t-il entre ses dents.

Des tremblements de rage semblèrent agiter tout le corps de Michael et je m’attendais à le voir se transformer d’une seconde à l’autre mais Nathan intervint presque immédiatement.

- Dis-nous ce qu’on veut savoir et tu mourras sans souffrance. Lui promit-il.

- Non non non, mon petit toutou, je ne parlerai qu’à la petite souris. Chantonna-t-il de nouveau. Approche-toi donc de moi ma petite souris, approche ton oreille et je te révèlerai des mystères dont tu n’as pas idée. Approche-toi de moi et je te dirai pourquoi quand tu es en colère, tu deviens plus puissante que toutes les créatures de cette pièce réunies, approche-toi de moi et je te dirai pourquoi je dois te tuer. Dit-il avant d’éclater d’un rire aigu, d’un rire de fou.

- Elle ne s’approchera pas, ni maintenant, ni jamais. Se crispa Michael. Elle est dans la même pièce que toi, et c’est déjà beaucoup trop. N’imagine même pas pouvoir te rapprocher d’un centimètre de plus de ma compagne.

Le vampire cessa de rire à la seconde où il entendit le mot « compagne ». Il fusilla Michael du regard avant de cracher dans sa direction. Mon loup ne cilla même pas.

- Tu blasphèmes ! Tu insultes mon maître ! Tu l’offenses ! Tes outrages ne resteront pas impunis sale clébard. Hurla-t-il soudain, avant de se recroqueviller sur lui-même la seconde d’après.

- Tu as été son préféré si longtemps. Continua-t-il d’une voix plaintive, à la limite de l’agonie. Il n’avait même plus l’envie de jouer avec nous. Et c’est comme ça que tu le remercies pour sa bienveillance ?

Ses changements d’humeur étaient impressionnants, je n’avais jamais vu personne passer de l’amusement à la colère à la lamentation en si peu de temps.

Michael ne se démontait pas et accusait les reproches avec stoïcisme.

- Je n’ai rien fait qui ait pu contrarier le Maître. Dit-il d’une voix calme qui dénotait avec la tension de son corps. J’ai respecté les termes du contrat, c’est vous qui nous avez attaqués sans raison aucune.

- Lalalala ! Fredonna le vampire en dodelinant de la tête. C’est une belle musique que tu me chantes là ! Mais je ne peux pas l’écouter plus d’une fois, mes oreilles me font déjà mal d’avoir entendu tant de mensonges.

- Je ne mens pas et tu le sais bien.

- Tu mens ! Tu mens, tu mens, tu mens, tu mens ! Hurla-t-il de nouveau. Ta petite meute ridicule a accueilli le descendant des Hellsing, ce sale assassin de ma race. L’affront était déjà suffisant pour que ta meute entière soit exterminée. Mais non ! Le Maître, dans sa grande clémence, t’a accordé son pardon, il t’a choisi toi, avant de choisir les siens, encore une fois ! Inadmissible ! Cria-t-il de plus belle.

- Est-ce pour ça que vous nous avez attaqués ? Demanda Thomas.

- Oh, un nouveau participant à la discussion. S’exclama le vampire qui semblait jubiler à présent, eut-il eu les mains détachées, qu’il les aurait sans doute frappées l’une contre l’autre pour applaudir comme un gamin. Tu es le gentil petit chienchien incapable de protéger sa chienne, c’est bien ça ?

Le corps de Thomas se tendit comme un câble en entendant ces mots.

- Tu veux que je te révèle quelque chose d’amusant ? Mais de vraiment très drôle hein ! Continua la sangsue qui semblait prendre un malin plaisir à torturer mon ami. Le chasseur qui a tué ta compagne a été transformé en vampire quelques temps après. N’est-ce pas ironique ?

- Tu mens ! Je l’ai tué de mes propres mains. Affirma Thomas d’une voix tremblante.

- Ah ! C’est pour ça que les basses besognes ne devraient pas être confiées à des novices en la matière. Vous les loups ne savez pas ce que tuer veut dire. Expliqua le vampire d’un ton sarcastique. Alors laisse-moi t’expliquer quelque chose. Si tu ne coupes pas la tête, n’importe quel humain peut être transformé en vampire plusieurs heures après la mort. Alors, tu es toujours aussi sûr de toi ?

Mon ami tremblait de plus en plus à côté de moi, la rage qu’il contenait se bataillait avec le besoin de faire ravaler ses mensonges au vampire.

- C’est… c’est impossible ! Je suis certain qu’il n’a pas pu survivre, je l’ai laissé se vider de son sang entièrement… c’est impossible ! Mais le ton de Thomas n’était plus aussi catégorique.

- Alors laisse-moi te dire une chose petit loup effrayé. Il m’a raconté comment il a fait mouche sur ta femelle… quatre fois, en plein cœur, avant qu’elle ne s’effondre pitoyablement dans la boue. Il m’a raconté comment elle l’a supplié de ne pas la tuer alors qu’il allait lui tirer sa cinquième balle dans la tête… et il m’a raconté comment, tétanisé par la peur, tu l’as supplié d’en finir avec toi une fois que tu as compris qu’elle ne reviendrait pas. Tu étais pathétique et ça le faisait beaucoup rire, tu sais. Et si un autre loup n’était pas arrivé pour te tirer de là, il l’aurait fait tu sais, il aurait exaucé ton souhait.

Thomas, les yeux exorbités, le corps parcouru de frissons, semblait revivre en direct le cauchemar qu’il avait vécu des années auparavant. Mon dieu, comment le vampire pouvait-il connaitre ce genre de détail ? Disait-il vrai ? L’assassin de Belinda était-il toujours sur cette terre, quelque part, à profiter d’une non-vie offerte par les vampires ?

Je me saisis de la main de Thomas et la serrait le plus fort possible. Mon ami s’y accrocha comme à une bouée de sauvetage, faisant craquer les os de mes phalanges. Aucune importance, la douleur que je ressentais n’était rien en comparaison de celle qu’il devait supporter.

Le vampire éclata de nouveau, de son rire sardonique, très fier qu’il était de son petit effet. Michael lui envoya encore une fois son poing dans la figure, ce qui ne fit qu’accroitre son hilarité.

- Tu vas la fermer maintenant !

- Il faudrait savoir, tu voulais que je parle et maintenant que je me taise. Décide-toi mon petit loup.

J’avais la nausée. Comment une créature pouvait avoir autant de cruauté en elle ? C’était abominable, plus démoniaque encore que je ne l’avais imaginé et je portais ma main à ma bouche par reflexe et par dégout.

- Petite souris, je t’ai choquée ? Tu ne devrais pas pourtant. Tu es tellement pire que moi !

Cette fois, les mains de Michael se refermèrent sur le cou du vampire pour tenter de l’étrangler, dans l’espoir sans doute qu’il cesse enfin de prononcer toutes ces abominations. J’entendais un « crac » significatif et je sus que Michael venait de lui briser la nuque, mais alors, horreur, Nathan s’interposa afin que mon compagnon ne finisse pas son œuvre en arrachant la tête du prisonnier qui avait encore des choses à révéler, et sans le soutien des mains de l’alpha sur son cou, la tête du vampire s’affaissa mollement sur le côté, tandis qu’il continuait à nous sourire. Mon dieu c’était si atroce que je ne pus en supporter d’avantage et détournai les yeux le plus vite possible. Malgré tout, l’image de cette tête pendante, souriante et qui clignait encore des yeux, s’incrusta dans ma rétine avant d’avoir pu m’en détourner.

- Sombre enfoiré, dis-nous pourquoi vous nous avez attaqués une bonne fois pour toute. Hurla Michael, au bord de la transformation.

Mais comme il ne se passait rien, je reportai finalement mon regard sur la scène. Le vampire, souriant comme un bienheureux, me fixait de ses prunelles ardentes et j’eus la sensation d’un courant glacé me parcourant tout le corps.

- A cause d’elle ! Assena-t-il enfin, sa voix rendue si gutturale qu’elle en était presque incompréhensible. C’est une erreur de la nature. Elle est la créature la plus abominable qui soit ! Et tu l’as prise pour compagne ! Tu pensais vraiment que le Maître laisserait passer une telle menace ? Vous les loups, êtes si stupides, inconscients des conséquences de vos actes… Vous ne méritez rien de mieux que l’extermination, comme on élimine des cafards.

- Vous faites erreurs bordel ! Elle est humaine ! S’écria Julian qui s’exprimait pour la première fois, son cri résonnant comme un appel de détresse.

- Humaine ? Et moi je suis le Christ réincarné alors ! S’étouffa presque de rire le vampire. Celle que vous avez choisi pour femelle alpha n’est ni plus ni moins que la créature la plus recherchée par les instances supérieures. Et oui, mon petit loup chéri ! Ta putain est l’ennemi public numéro un chez les êtres de notre genre, la cible à abattre si tu préfères. Tu comprends, petite souris ? Tu comprends que tu es la cause de leur malheur ? Tu comprends que ton existence met tous ceux que tu aimes en danger ?

Le vampire ne jubilait plus, il exultait littéralement ! Trop heureux de lâcher la bombe qui laisserait sans aucun doute possible, le reste de ma vie en lambeau. Mais je ne pouvais pas en rester là ! Je devais savoir, absolument ! Aussi m’avançai-je de quelques pas, le regard braqué sur lui, sur son cou difforme, sur cette masse molle qu’il était devenu. Un vide abyssal, un vide qui avait commencé à se creuser au moment où ce monstre avait ouvert la bouche, s’était ouvert en moi. Je devais savoir, alors… je lui posai la question.

- Que suis-je ?

Le regard du vampire devint plus fou qu’il ne l’avait jamais été, ses prunelles virèrent au rouge sang tandis qu’il siffla dans ma direction. Il chercha à s’agiter, mais son corps ne répondait plus aux ordres de son cerveau et il poussa un hurlement strident de frustration.

- Ce que tu es ? Petite souris ignorante, ce que tu es, je vais te le dire, et ce seront là mes derniers mots. Expliqua-t-il d’un air qui se voulait solennel mais qui apparut comme caricatural de par sa position. Et alors, comme un poème, le vampire se mit à réciter.

- « Lorsque les hommes eurent commencé à se multiplier sur la face de la terre, et que des filles leur furent nées, »

Michael se jeta alors sur moi, tandis que des flammes jaillissaient de nulle part, enflammant le vampire.

- « les fils de Dieu virent que les filles des hommes étaient belles, et ils en prirent pour femmes parmi toutes celles qu’ils choisirent. »

- Qu’est-ce qui se passe ? Hurlai-je par-dessus les psalmodies du vampire et le crépitement du feu.

- « Alors Dieu dit : Mon esprit ne jugera plus l'homme pour ses fautes, car l’homme est fait de chair, et ses jours seront de cent vingt ans. »

- Il cite la bible ! S’écria Michael pour se faire entendre. Il se suicide si tu préfères, il ne va pas tarder à…

Mais Michael ne put même pas finir sa phrase, j’entendis une courte détonation, prompte, mais assourdissante, et Michael se plaqua contre moi, faisant barrage de son corps, me protégeant du feu.

Quelques secondes s’écoulèrent sans qu’aucun son ne parvienne à mes oreilles, puis enfin, un appel lancinant se fraya un chemin jusqu’à mes tympans.

- Lucy, ça va ? Dis-moi que tu n’as rien ?

C’était mon compagnon qui s’inquiétait pour moi.

- Non ça va, grâce à toi. Lui répondis-je au bout d’un moment. Qu’est-ce qui s’est passé ? Je n’ai rien compris.

- Je crois que… enfin…

- Il a cité un passage de la bible. Intervint Nathan qui, dans un coin de la pièce, époussetait ses vêtements rendus blanchâtre par de la cendre, cendre qui s’était éparpillée partout dans la cellule et qui recouvrait complètement le fauteuil de métal au centre de la pièce. Et bien entendu, le vampire avait disparu.

- Que… Je n’y comprends rien du tout ! M’exclamai-je.

- Les vampires sont des entités démoniaques Lucy. Reprit-il. Le mal fait partie intégrante de leur être, et la bible… comme tous les livres saints d’ailleurs sont à l’opposé de ce qu’ils sont. C’est pour ça que les croix et l’eau bénite les repoussent. En prononçant lui-même ces mots, il s’est donné la mort par la même occasion.

- Il a dû se dire qu’il n’avait plus d’autres choix, il était déjà condamné de toute façon, et il ne pouvait plus se défendre. Présuma Michael.

- Mais… Ce qu’il a dit… quelqu’un sait ce que ça signifiait ? M’enquis-je aussitôt.

- Lucy, amour, n’y accorde pas trop de crédits s’il te plait. Se dépêcha d’ajouter mon loup. Tu l’as vu comme nous, il était fou, et je pense qu’il a voulu nous faire du mal, nous faire douter avant de mourir. C’était sans doute une ruse ou un piège dans lequel il a voulu nous faire tomber.

- Je… oui… Tu as peut-être raison mais… au cas où… est-ce que quelqu’un dans cette pièce a reconnu ces mots ? Est-ce que vous avez déjà lu la bible ? Est-ce que vous savez de quoi parlait ce passage ?

Je comprenais que Michael veuille me protéger, pourtant je ne pouvais m’empêcher de vouloir en savoir plus. Il avait l’air de savoir quelque chose que j’ignorais. C’était peut-être un piège, mais dans le cas contraire… je devais savoir ! Les implications n’en étaient que trop importantes, surtout si je mettais véritablement la meute en danger… surtout si je mettais véritablement Michael en danger.

Les loups s’entreregardèrent pendant un moment, mais aucun d’eux ne put me donner la réponse que j’attendais.

- Je vais faire quelques recherches. Me promit alors Thomas. Mais ses yeux hantés m’apprenaient qu’il était aussi ébranlé que moi par les révélations du vampire et je ne pouvais pas l’en blâmer. Si le meurtrier de Belinda était encore en vie, les conséquences sur le futur de mon ami allaient être catastrophiques.

- Il a dit quelque chose sur les fils de Dieu et les filles des hommes c’est bien ça ? S’enquit Van. Qu’est-ce que ça peut bien vouloir dire ?

Personne ne répondit, la formulation était aussi énigmatique que la prophétie de Sorcha et j’espérais que des réponses à mes questions se profileraient bientôt. Parce que ça n’engageait plus seulement ma nature à présent, non, il devenait impératif de comprendre ce que j’étais vraiment. Il en allait de la vie de ma meute et de l’homme que j’aimais.

 

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8 mai 2012 2 08 /05 /mai /2012 14:33

J’avais comme une impression de déjà vu !

Je descendais les escaliers qui me menaient au sous-sol, comme quelques jours auparavant. Le but était différent mais l’impression restait la même. J’étais poussée par un sentiment fort et cette fois ce n’était pas de la colère.

J’avais senti le besoin impérieux de retrouver mon compagnon, l’intensité du sentiment, renforcé par la séparation que nous nous étions infligé d’un côté comme de l’autre, n’en étant que plus forte.

C’est étrange, parfois, comme certains sentiments aussi puissants que la colère, peuvent paraitre dérisoire face à l’amour après seulement quelques jours de réflexion. J’avais beau chercher, je n’arrivais tout simplement plus à me souvenir du petit air arrogant de Michael, alors qu’il m’avait annoncé que malgré mon statut d’alpha, je n’étais pas à l’abri de quelconques représailles de sa part. Cette vision m’avait pourtant accompagnée tout au long de ces derniers jours, attisant la brûlure de notre dispute. Et pourtant tout ce à quoi j’étais capable de penser en poursuivant ma descente, c’était la douceur de ses lèvres lorsqu’il m’avait embrassée la veille, la délicatesse de son toucher, l’émotion contenue dans la raucité de sa voix alors qu’il m’avait dit que je lui manquais. Toutes ses petites choses qui m’étaient devenues indispensables et dont j’avais été privée depuis trop longtemps. Néanmoins, une inquiétude sourde au creux de mon ventre, me fit ralentir sur les dernières marches de l’escalier. Qu’en était-il pour lui ? Où en était-il de son raisonnement me concernant ? Il m’avait en effet dit que je lui manquais mais cela allait-il suffire pour nous réconcilier comme je l’espérais ? J’ignorais encore tellement de choses sur Michael, et en l’occurrence, je ne savais pas à quel point sa fierté et sa rancune pouvait le pousser à m’en vouloir.

Quoi qu’il en fût, ça ne servait à rien de se perdre en digressions. Le seul moyen d’en avoir le cœur net était de lui parler directement.

Mais malgré mes encouragements intérieurs, les pas qui me portèrent jusqu’au couloir des cellules me semblèrent terriblement lourds.

D’un signe de tête, je saluai Matthew qui, fidèle au poste, me rendit mon salut, l’air inquiet. Bon, je ne l’avais pas volé, en même temps. Pour me racheter de la situation délicate dans laquelle je l’avais placé la dernière fois que j’étais venue au sous-sol, je m’appliquai à lui parler d’une manière douce et agréable.

- Euh… Matthew… Michael… il est… ?

Bon d’accord, pour la voix douce et agréable on repassera, je venais de bredouiller grotesquement quatre mots sans queue ni tête. Matthew me sourit fébrilement avant de désigner la porte sur ma droite d’un mouvement du menton.

- Merci et… euh… M’apprêtai-je à m’excuser pour la fois précédente, mais le cliquetis métallique d’une serrure que l’on ouvre me fit sursauter avant d’avoir pu prononcer les mots.

- Lucy ? Qu’est-ce que tu fais là ? M’interrogea Michael, sur le seuil de la cellule qu’il venait d’ouvrir.

Prise de court par son arrivée soudaine, j’écarquillai des yeux ronds.

- Ne sois pas si surprise, je t’ai sentie arriver depuis que tu as quitté la cuisine. M’annonça-t-il avec un petit sourire en coin. Oh non ! Pas ce sourire ! Je me sentais déjà fondre. Il fallait que je le touche, il fallait que je l’embrasse, il fallait que je… Non, non, je devais me reprendre.

- Tu m’as sentie ? Comment ça ? Demandai-je pour faire diversion.

Michael prit ma main et la posa sur son cœur.

- Je te sens partout où tu es amour.

Sans retirer ma main, je baissai la tête, tentant de cacher le trouble qui m’animait. Mon compagnon releva mon menton de l’index et du pouce pour me capturer de son regard.

- Tu voulais me voir ? Me demanda-t-il en penchant la tête sur le côté.

- Je voulais te demander si tu pensais ce que tu m’as dit hier ? Lâchai-je finalement. Est-ce que je te manque vraiment.

- Aaaaah Lucy, mon amour, tu n’imagines même pas à quel point ces quelques jours ont été une torture pour moi. Gémit-il en me prenant dans ses bras, serrant mon corps très fort contre le sien. Je t’aime tellement.

C’était si bon de le sentir contre moi, de pouvoir enfin me sentir en sécurité au creux de ses bras musclés et puissants. Je pouvais ressentir toute la retenue qu’il mettait dans ses gestes, me touchant, me caressant avec précaution comme si j’étais une poupée de porcelaine. Ce que j’étais objectivement entre ses bras. Il aurait pu me briser totalement en quelques secondes et cette force en lui, me rendait folle au lieu de m’effrayer, et pour cause, elle était là, bien présente, je pouvais la sentir tout autour de lui, et pourtant, il la mettait totalement en sourdine en ma présence.

- Moi aussi je t’aime. Lui murmurai-je dans un souffle.

- Aah amour, je crois que je ne m’en lasserai jamais. Me dit-il en enfouissant son nez dans mes cheveux.

- Je suis une idiote, j’aurais dû te le dire plus tôt !

- Indubitablement. Confirma-t-il.

Je m’arrachai à son étreinte pour lui lancer un regard plein de reproches. Michael éclata de rire en fondant sur mes lèvres. Dieu que ce rire m’avait manquée, si chaud, si suave. Des frissons remontèrent ma colonne vertébrale au moment même où ses lèvres entraient en contact avec les miennes. Le baiser commença doucement, mais quand sa langue s’insinua entre mes lèvres, dansant de concert avec la mienne, je perdis tout contrôle, me plaquant entièrement contre son corps, comme si je voulais me fondre en lui. Sa bouche se déplaça rapidement dans mon cou, embrassant, léchant, mordillant, tandis que ses mains caressaient mon dos avec frénésie. Je passais les miennes sous sa chemise pour effleurer sa peau brûlante. Les bosses fermes de ses abdominaux que je sentais sous mes doigts m’électrisaient complètement. Ma main semblait hésiter, ne sachant si elle préférait se déplacer vers le haut, vers ces pectoraux que je savais si parfaitement musclés et dessiné, ou vers le bas, vers…

Mais avant que j’aie pu prendre une décision, un raclement de gorge nous rappela que nous n’étions pas seuls. Matthew écarquillait les yeux devant le manque de tenue de ses alphas. En pointant du doigt vers la sortie, et sans prononcer le moindre mot, il se dirigea de lui-même vers la sortie, un peu embarrassé par ce à quoi il venait d’assister, mais visiblement très embarrassé par la bosse qui déformait son pantalon au niveau de l’entrejambe. Bon sang, j’oubliais trop souvent que les loups était de vrais éponges à émotions, et vu celles qui m’animaient à ce moment-là, je n’étais pas vraiment surprise par la réaction physique du lycan.

Michael me sourit avec indulgence.

- Tu verras, bientôt ils auront l’habitude de te bloquer et ces petits désagréments n’arriveront plus.

- Oui j’espère. Mais ça va, je ne lui en veux pas. Je crois qu’on l’a un peu pris de court. L’excusai-je bien volontiers.

- Oui mais maintenant nous somme seuls… Commença-t-il avec un petit sourire coquin. Et j’ai certains projets qui me trottent dans la tête depuis très très longtemps.

Je feignais l’innocence En ouvrant de grands yeux surpris.

- Ah vraiment ? Et à quoi tu penses là ? Poursuivis-je en mode « naïf »

- Hum… je pense que tu n’as pas encore fait connaissance avec la technique de réconciliation estampillée Michael Madison, et je pense qu’il va falloir y remédier très rapidement.

Sur ces mots tentateurs, il me souleva de terre en m’empoignant sous les fesses. Je m’agrippai à lui en entourant sa taille de mes jambes et me laissai porter jusqu’à l’escalier.

Mais un cliquetis derrière nous, nous fit tourner la tête.

- Je ne sais pas ce que vous avez prévu dans l’immédiat et je ne veux pas le savoir. Nous annonça Nathan qui venait d’apparaitre sur le seuil de la cellule où était retenu le vampire. Mais ça va devoir attendre.

Michael me reposa délicatement sur le sol, et je défaisais à regret mes bras et mes jambes enroulés autour de lui.

- Qu’est-ce qui se passe ? Demanda immédiatement l’alpha, le regard inquiet.

- Le vampire… Il s’agite. Nous informa le lieutenant, et il ne cesse de dire… des choses.

- Quelles genres de choses ?

Michael fronça les sourcils en posant la question.

- Eh bien… Commença Nathan, un peu gêné et ne cessant de me jeter des petits coups d’œil en coin.

S’il espérait que je m’en aille maintenant, il pouvait toujours courir.

Michael, repérant son manège, me serra contre lui.

- Parle loup ! Lucy est ma compagne, et je… je ne compte plus lui cacher quoi que ce soit désormais.

A ces mots, mon visage se fendit d’un incontrôlable sourire ému. Si je continuais sur ma lancée j’allais bientôt me mettre à pleurer devant les films tristes.

Nathan prit une grande inspiration et avança vers nous. La lumière exposa totalement son visage et je retins difficilement un gémissement à la vue des trois balafres qui scindaient son visage en plusieurs parties.

- Michael, il… il a commencé à s’agiter quand Lucy est arrivée. Nous annonça le lieutenant. Et il dit que… qu’il doit la tuer.

En entendant ces mots, je sentis des étincelles de pouvoirs crépiter sous les doigts de ma main qui était posée sur le dos de mon compagnon. Je regardai celle-ci avec surprise, ne comprenant pas d’où ce pouvoir pouvait provenir alors que je n’y avais pas fait appel. Et puis je regardai Michael. Le pouvoir crépitait tout autour de lui, ses cheveux commençaient à s’agiter comme sous l’effet du vent, la lumière au plafond devint erratique et l’ampoule se balança d’avant en arrière sans aucune raison apparente. Une brise chaude tourbillonnait autour de nous alors que le lieu était complètement clos. Je regardai alors le visage de l’alpha, crispé en un masque de fureur, et ses yeux devenus bleus et strié de petits éclairs lumineux.

Et soudain, sa voix éclata en même temps que l’ampoule la plus proche.

- Il veut quoi ?! Rugit-il en faisant trembler les murs du couloir. Il n’a pas ouvert la bouche depuis des jours et la première chose qu’il dit c’est qu’il doit tuer MA compagne.

Il insista sur le « ma » avec une sorte de grognement.

- Je vais le tuer de mes propres mains ! Je vais lui arracher chaque membre du corps ! Je vais le saigner comme un porc et attendre que la soif le rende fou ! Et alors, seulement je le décapiterai, centimètre par centimètre jusqu’à ce qu’il ne reste qu’un putain de tas de cendres de ce sombre connard. Gronda-t-il en me serrant plus encore contre lui. On ne menace pas MA compagne ! Jamais !

Michael était effrayant, surprotecteur, menaçant et dangereux, et pourtant tout ce que j’étais capable de ressentir, le corps écrasé contre le sien, était cet incroyable sentiment de sécurité. Un vampire, l’une des créatures les plus mortelles pour les humains en ce monde, semblait vouloir ma mort plus que tout, et tout ce que je ressentais, c’était un sentiment de bien-être. Ok, passez-moi la camisole, j’étais bonne à enfermer.

- Attends, calme-toi ! Lui intima le lieutenant. Ça peut être une bonne opportunité… Je veux dire, il n’a rien voulu lâcher depuis qu’on le retient ici, mais au moment où ta compagne arrive et qu’il la sent, il devient quasiment fou… Tu ne crois pas que ça pourrait être d’une grande aide ?

Michael plissa les yeux, suspicieux, avant de reprendre.

- Et tu suggères quoi au juste ?

Nathan prit une grande inspiration avant de continuer.

- Eh bien, elle vient avec nous dans la cellule et on voit comment il réagit.

Le pouvoir se mit à crépiter de plus belle autour de Michael.

- Tu veux que MA compagne se retrouve dans la même pièce que cette sangsue ? Tu veux que Ma compagne serve d’appât, et tu veux que MA compagne risque sa vie alors que tu sais qu’elle est sans défense ?

Bon ok, là ça commençait à bien faire ! Je n’étais pas un objet, et la façon dont il s’appropriait ma personne avait cessé d’être mignonne après le deuxième « MA », qui plus est, sa remarque sur mon incapacité à me défendre avait tendance à égratigner légèrement ma fierté. Est-ce qu’il regardait ailleurs quand j’avais failli faire cramer l’un de ses lieutenants dans le gymnase ?

- Qui est sans défense ? Lui demandai-je, en m’écartant un peu pour le regarder dans les yeux. Tu as séché le cours où j’ai fait sa fête à un tapis de course ?

Michael ne répondit rien mais me regarda en fronçant les sourcils. Ses yeux bleus intenses, parsemées de stries azures me mettaient mal à l’aise, comme s’il pouvait lire en moi, plus encore qu’il ne le faisait habituellement.

Mais en réalité, je voyais bien qu’il pesait déjà le pour et le contre. Son désir de me protéger et le désir de protéger sa meute entraient une fois de plus en contradiction dans sa tête. Il m’avait avouée être incapable de faire un choix entre les deux, mais encore une fois, il se trouvait dans l’obligation de prendre une décision par ma faute.

- Ecoute, elle n’a pas tort. Ajouta finalement Nathan. Elle est plus que capable de se défendre si le besoin s’en fait sentir. Et puis elle ne sera pas seule. Nous allons évidemment l’accompagner et on gardera tous les deux un œil sur le vampire. Et si ça ne te rassure pas, on peut aussi demander à Van de nous accompagner.

Michael se tourna vers son ami puis vers moi avant de soupirer profondément, en fermant les yeux. Lorsqu’il les rouvrit, ses yeux étaient toujours aussi bleus, mais les éclairs avaient disparu, et la brise autour de nous s’était calmée.

- Tu veux le faire ? Me demanda-t-il.

- Et bien, si un vampire veut me tuer j’aimerais bien comprendre pourquoi, oui.

- Très bien, dans ce cas… Je veux que Van, Thomas et… oui, Julian aussi… Je veux qu’ils soient là aussi.

Mais à peine Michael eut-il finit sa phrase que les trois loups en question dévalèrent les escaliers, plus bruyamment qu’un troupeau de buffles au galop.

Je regardai tour à tour Michael et Nathan avec une expression ahurie. Est-ce que ça faisait partie des pouvoirs extraordinaires de l’alpha que de faire apparaitre les personnes qu’il souhaitait voir à la seconde où il souhaitait les voir ?

- Qu’est-ce qui se passe ? Hurla Van. En descendant la dernière marche.

En nous voyant les dévisager avec surprise mais néanmoins calmement, Van et Thomas se stoppèrent immédiatement et Julian, juste derrière eux leur rentra dedans de plein fouet. Les deux lieutenants ne bronchèrent presque pas, mais Van, sans se retourner, saisit le bras du jeune loup pour l’aider à se stabiliser.

- Nous avons senti que tu faisais appel au pouvoir de l’alpha, Michael, et on a cru que… Commença Thomas.

- Que Lucy t’avait encore mis en rogne. Finit Van.

- Fermez-la vous deux ! Vous n’y êtes pas du tout en plus. Corrigea Nathan. En fait si je ne les avais pas arrêtés, ils seraient en train de nous faire un petit sur les marches de cet escalier.

- Toi ferme-là ! Intervins-je en frappant le loup à l’épaule.

- Bon, ce n’est pas le sujet. Dit Michael en reprenant la parole. Je me suis un peu énervé, mais pas contre Lucy.

« Un peu énervé », c’était un bel euphémisme, pensai-je. Les poils de mes avant-bras étaient toujours au garde-à-vous après la démonstration de pouvoir de mon loup.

- Mais attendez ! Ne pus-je m’empêcher d’intervenir. Pourquoi il n’y a que vous qui êtes descendus ? Tous les loups de la maison ont pourtant dû sentir le pouvoir que puisait Michael.

J’avais un peu de mal à comprendre qu’alors que la maison était en permanence remplie de lycans, seuls trois d’entre eux avaient eu le courage de pointer le bout de leur nez.

- Ils sont resté en haut, nous leur avons dit de nous attendre. M’expliqua Thomas.

J’avais toujours du mal à comprendre le lien hiérarchique qui régissait le comportement des loups.

- C’est le rôle des dominant de protéger les autres. Me glissa Michael à l’oreille.

- Hum… je vois mais dans ce cas…  Pourquoi es-tu là toi ? Interrogeai-je Julian.

Van se rembrunit tout à coup et Thomas prit la parole avec un sourire indulgent.

- Eh bien, tu sais ce qu’il a dit à Van ce matin, Lucy. Partout où cet imbécile va…

Ok je comprenais maintenant, et ça expliquait également pourquoi entre le moment où Michael avait commencé à « un peu s’énervé » et leur arrivée, il s’était écoulé de nombreuses minutes. Van avait dû s’opposer à ce que Julian le suive, mais ce dernier n’en avait, bien sûr, fait qu’à sa tête.

- Bon en tout cas, vous tombez bien. Me tira Michael de mes pensées. J’allais justement vous faire venir.

Les trois loups le regardèrent avec la même expression interrogatrice.

- Le vampire s’est enfin décidé à bouger… grâce à Lucy. Expliqua-t-il avec réticence. Du coup on va tenter une confrontation et pour ça… Je vais avoir besoin de vous…

 

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8 mai 2012 2 08 /05 /mai /2012 14:32

Les jours suivants se passèrent dans une sorte de brouillard. Je ne décolérais pas et malgré les différentes interventions de Nathan, Marli, Van et même Julian, pour tenter de m’apaiser un peu, je n’étais toujours pas capable de me trouver dans la même pièce que Michael sans ressentir une furieuse envie de le frapper. Chouette alors ! L’amour faisait vraiment ressortir le meilleur de ma personnalité !

Heureusement, pour ce qui était de le croiser, je n’avais pas trop à m’inquiéter puisqu’il passait ses journées au sous-sol pour interroger le vampire, toujours retenu prisonnier. Les choses ne semblaient pas avancer d’ailleurs et je me demandai au bout de combien de temps les loups finiraient par abandonner. En attendant, je reprenais doucement ma vie de tous les jours, enchainant les rendez-vous avec mes clients, dans mon ancienne maison, mon bureau s’y trouvant toujours. J’avais supposé que Michael serait contre cette idée et je m’étais donc réjouie de lui désobéir mais contre toute attente, et bien que je n’ai pas caché mon désir de reprendre le travail, il n’avait pas émis d’objections. Encore aurait-il fallu que l’on se tolère plus de cinq minutes pour aborder le sujet. Néanmoins, et sans que je lui demande, Van m’escortait, me conduisant chaque matin et me ramenant chaque soir, s’assurant que je rentrais avant la tombée de la nuit. J’étais prête à parier qu’il agissait sur ordre de son alpha et ce constat me rassurait un peu. Au moins n’était-il pas devenu insensible à mon sort. Qui plus est, je soupçonnais Van de profiter de ces occasions pour échapper à l’attention très particulière de Julian qui ne le quittait pas d’une semelle, le poursuivant de ses assiduités toute la sainte journée. Van ne l’ayant toujours pas mis K.O, j’en conclus, mais je me gardai bien de lui en faire part, qu’il n’était pas si insensible aux avances du jeune loup, malgré ses protestations véhémentes.

Les choses auraient pu continuer ainsi longtemps, d’autant que l’absence prolongée de Thomas qui n’avait toujours pas remis les pieds chez Michael depuis l’incident, me rappelait sans cesse pourquoi j’en voulais à mon compagnon. Seulement, au milieu de la nuit du quatrième jour, alors qu’une fois de plus j’étais allée me coucher seule, je me réveillai en sursaut à la suite d’un des nombreux cauchemars que je faisais depuis la nuit de l’attaque des vampires. Je m’agitai un peu et réalisai alors qu’un bras puissant et chaud m’enserrait la taille, m’empêchant de me retourner sur le dos. La prise se fit plus serrée et le grand corps brûlant de Michael, vint se plaquer contre mon dos, avec un faible grognement ensommeillé. Je ne protestai pas, encore apeurée par mon cauchemar et me rendormis presque immédiatement, dans le giron rassurant de mon compagnon. Le lendemain matin, je me réveillai seule dans le lit et la journée se déroula de nouveau avec Michael aux abonnés absents. Mais la nuit venue, je décidai de ne pas m’endormir immédiatement, comme je l’avais fait les jours précédents. Je luttais désespérément contre le sommeil depuis deux bonnes heures quand un cliquetis résonna faiblement dans la pièce. Quelqu’un venait d’ouvrir la porte et se déplaçait silencieusement dans la chambre. Une bouffée du parfum musqué de Michael parvint jusqu’à mes narines et je me forçai à ne pas ouvrir les yeux alors que je sentais mon compagnon tout proche. Quelques secondes plus tard, le lit s’affaissa légèrement et un souffle chaud, provenant d’un long soupir de Michael, caressa mes cheveux. Je me surpris à souhaiter qu’il ne s’en aille pas aussi restai-je parfaitement immobile, tentant de feindre le sommeil du mieux que je le pouvais. Michael ne tarda pas à enfouir son nez dans mes cheveux et cette proximité à laquelle je n’avais pas eu droit durant ces longues journées, me bouleversa. Lorsqu’il déposa un baiser sur ma tête, je sentis mes défenses commencer à s’effondrer. Et lorsque dans un souffle il me chuchota « tu me manques », je ne savais déjà plus pourquoi je lui en avais tant voulu.

En même temps qu’il s’installait à mes côtés, je prenais conscience que chacune des nuits que j’avais cru passer seule, Michael m’avait rejointe alors que je dormais, ne me quittant qu’aux premières heures du jour, juste avant que je me réveille.

- Toi aussi tu me manques. Chuchotai-je à mon tour en nouant mes doigts à ceux de sa main qu’il venait de poser sur mon ventre.

Michael se figea, surpris de constater que je ne dormais pas, puis, voyant que je ne souhaitais pas entamer la dispute, il colla de nouveau son corps au mien, m’attirant autant qu’il le pouvait contre lui, comme s’il souhaitait se fondre en moi. Cette nuit-là, aucun cauchemar ne vint perturber mon sommeil.

J’avais espéré que Michael se trouverait à mes côtés le matin suivant mais lorsque je tendis la main, celle-ci ne rencontra que le vide et les draps froids. Il était déjà parti depuis longtemps. Avec un soupir, je me forçai à me lever, prête à subir une nouvelle journée sans mon loup.

Dans le couloir menant à la cuisine, la bonne odeur du café fraichement préparé et des toasts grillés, apaisa un peu ma déception matinale et me redonna un peu de courage.

En pénétrant, sur le seuil de la pièce, je me figeai, clignant des yeux pour m’assurer que je n’étais pas victime d’une hallucination. Thomas, un tablier attaché autour de ses hanches, préparait des œufs au plat devant la cuisinière, tandis que Van, assis à la table de la cuisine attendait patiemment qu’il remplisse son assiette, en tentant d’éviter les coups d’œil amoureux de Julian, assis à quelques centimètres de lui. En fait, je me fis la remarque que si Julian se rapprochait encore plus, il atterrirait sur les genoux de Van.

- Lucy, ma belle ! Me gratifia Thomas avec son plus beau sourire. Il était radieux. La scène qui aurait parue normale quelques jours plus tôt, me laissa sans voix. Thomas n’avait plus mis les pieds dans cette cuisine depuis l’attaque des vampires et les évènements qui avaient suivis, alors que faisait-il ici, à préparer le petit déjeuner comme si rien ne s’était passé ?

- Tu veux des œufs pour ton petit-déjeuner ? me demanda-t-il en venant m’embrasser sur la joue.

- Euh… j’ai loupé un épisode ? Bredouillai-je, interloquée.

- Est-ce qu’un loup n’a pas le droit de venir préparer son repas à sa femelle alpha ? demanda-t-il comme si de rien n’était. Il a appelé ce matin pour me dire que j’étais de nouveau le bienvenu ici. Me chuchota-t-il ensuite en se penchant à mon oreille.

- Quoi ? Il s’est excusé ? M’écriai-je, surprise par la capitulation de mon borné de compagnon.

Thomas émit un petit rire gêné.

- Eh bien, pas vraiment… Enfin disons juste que c’est tout comme.

Je me renfrognai sous le coup du faux espoir que je venais de subir.

- Mouais, ça m’aurait étonné aussi. Dis-je sans cacher le dépit dans ma voix.

- Attends Lucy, c’est bon, honnêtement, je ne me suis jamais attendu qu’il s’excuse. M’avoua-t-il avec un sourire en coin.

- Michael est l’alpha, ma belle, il ne s’excuse pas, jamais. Ses décisions sont inéluctables alors il n’a pas à le faire. M’expliqua Van en repoussant pour la deuxième fois depuis que j’étais arrivée, la main de Julian qui s’aventurait sur sa cuisse.

- Mais, Lucy, tu dois comprendre que pour Michael, ce coup de fil était comme des excuses. Crois-moi, il a dû sacrément prendre sur lui pour m’appeler et revenir sur sa décision. Alors je ne sais pas ce qui s’est passé pour qu’il change d’avis mais ça me suffit amplement. M’informa mon ami.

Je repensai aux mots que nous avions échangés la veille et qui étaient les premiers depuis des jours en me demandant s’ils avaient suffi à faire pencher la balance.

- Bon, j’imagine que si le principal intéressé considère qu’il s’agit d’excuses, je vais devoir m’y plier. Dis-je en soupirant.

Les trois loups me regardèrent avec un sourire lumineux et je comprenais que la situation tendue entre leur alpha et moi les avait également fait souffrir. J’avais encore un peu de mal à appréhender le lien étrange qui unissait chaque loup au couple d’alpha ainsi qu’entre eux. Mais en constatant le plaisir que Thomas avait à se retrouver avec ses compagnons de meute, après plusieurs jours d’absence et celui qu’ils prenaient tous à envisager une réconciliation entre Michael et moi, il me sembla évident que j’avais sous-estimé ce lien.

- Bon et bien sur ce, veillez m’excuser un instant, je reviens. Nous avertit Van en se levant.

Julian bondit sur ses pieds presque au même instant.

- Toi ! Assis ! Lui ordonna Van avec exaspération en lui pointant du doigt la chaise qu’il venait de quitter.

- Mais pourquoi ? Geignit Julian. Si tu vas quelque part, je t’accompagne un point c’est tout.

Van soupira d’agacement.

- Ecoute Julian, tu ne peux pas me suivre partout où je vais, c’est pas possible, ça peut pas durer indéfiniment.

- Et pourquoi ça ? Se renfrogna le jeune loup en croisant les bras sur son large torse de manière butée. Tu vas où pour que je ne puisse pas t’accompagner ? Tu as quelque chose à me cacher ?

Van leva les yeux au ciel avant de se tourner vers moi.

- Je rêve ou il me fait une crise de jalousie ? Me demanda-t-il avant de se tourner de nouveau vers Julian. Je vais aux chiottes d’accord ! Aux chiottes ! Tu vas quand même pas m’y suivre si ?

Les yeux du jeune loup s’animèrent en un regard coquin.

- Si tu veux je peux t’aid…

- Tu la fermes ! Asséna Van au bord de l’apoplexie. Prononce ces mots et je te promets que ton cul ne s’en remettra pas de sitôt.

Un sourire se dessina sur les lèvres de chacun d’entre nous, tentant de retenir l’hilarité que nous inspirait ce qu’il venait de dire.

- Des mots, toujours des mots. Se plaignit gentiment Julian avant d’éclater de rire.

Incapable de me retenir plus longtemps, je le suivis immédiatement tout comme Thomas à côté de moi.

Comprenant l’énormité de ce qu’il venait de dire, Van écarquilla les yeux et rougit comme une pivoine.

- Non… je… je voulais dire que j’allais te le botter… et… Merde… vous êtes vraiment une bande de dégénérés ! Bredouilla-t-il. Allez tous vous faire foutre ! Nous gratifia-t-il en quittant la pièce.

- Justement j’aimerais bien. Lui hurla Julian avant qu’il disparaisse au coin du couloir.

Notre hilarité redoubla de plus belle en entendant Van prononcer une bordée d’injures tandis qu’il s’éloignait sans se retourner.

 

-Tu voudrais pas lui foutre un peu la paix ? Dit Thomas en retournant à ses fourneaux.

J’en profitai pour m’installer à la place vacante laissée par Van.

Julian se contenta d’hausser les épaules.

- Je ne suis pas sûr que ce soit le meilleur moyen de parvenir à tes fins moi non plus. Intervins-je à mon tour. Peut-être que si tu le laisses un peu respirer… je sais pas… il se rendra compte que tu lui manques par exemple.

Julian se tourna vers moi, le regard blasé.

- Ca c’est bien un raisonnement de gonzesses ! Me gratifia-t-il.

Je soulevai un sourcil pour lui signifier de continuer et que je n’appréciais pas particulièrement le qualificatif.

- Vous les femmes. Commença-t-il en en insistant sur le mot « femme ». Vous êtes persuadées qu’en créant le manque, vous allez attirer notre attention, mais ça, ça marche que sur vous !

Thomas ricana brièvement de son côté.

- Et qu’est-ce qui fonctionne alors ? Ne pus-je m’empêcher de lui demander, beaucoup plus intéressée par son point de vue que ce que j’aurais voulu avouer.

- Il faut être là ! Partout où il va. De manière à ce que son esprit ne soit empli que par moi. D’autant que vouloir être avec la personne que tu aimes, ça n’a rien d’anormal. Si tu veux faire craquer un mec, y’a pas trente-six solutions, il faut lui montrer ce qu’il pourrait avoir et à côté de quoi il passe. Et puis s’il ne me voit plus, je sais bien qu’il va m’oublier et passer à autre chose.

- Tu ne crois pas que tu exagères un peu là ? Lui demandai-je, dubitative. A mon avis, tout ce que tu vas réussir à faire c’est l’énerver.

- Ouais t’as raison, c’est vrai qu’en me la jouant timide et effacé ça m’a réussi jusqu’à maintenant. Me dit-il avec ironie.

- Je ne sais pas, je le trouvais plutôt ému par toi, moi. Je ne pense pas que tu n’avais pas tes chances avant ta transformation. Enfin en dehors de Michael qui te mettait des bâtons dans les roues. Ajoutai-je avec un haussement d’épaule.

- Oh allez Lucy, tu vas me faire croire que tu regrettes le petit Julian, effacé et trouillard ! S’exclama-t-il. Moi en tout cas je ne regrette pas, et puis je trouve que j’ai plutôt bien gagné au change. M’annonça-t-il avec un clin d’œil et en passant ses mains d’une manière lascive sur son T-shirt blanc, toujours un peu trop moulant pour son nouveau corps musclé.

Je m’apprêtai à éclater de rire quand un raclement de gorge se fit entendre depuis le seuil de la porte.

- Je vous dérange peut-être ? Nous demanda Van, les bras croisés sur la poitrine et les sourcils froncés.

Le regard de Julian s’illumina au moment où il posa les yeux sur l’homme qu’il aimait. Pas de doute que ses sentiments étaient vraiment profonds. Il y avait quelque chose de troublant pour moi, chez ce jeune loup qui ne montrait aucune réserve quant à ses démonstrations d’affection. Tout ça semblait si facile pour lui.

- Pas du tout mon cœur. Lui répondit vivement Julian. Le spectacle t’a plu ? Tu veux que je recommence rien que pour toi ?

- Rien à foutre de ton petit show de chippendale ! Si tu crois que ça pourrait me faire le moindre effet, tu te fourres le doigt dans l’œil. S’énerva Van. Et puis je t’ai déjà dit d’arrêter de m’appeler comme ça, et bordel… va… va t’acheter des fringues !

Julian, loin de se décourager, se tourna vers moi et me montra un petit sourire satisfait qui signifiait clairement « qu’est-ce que je t’avais dit ».

- Tu sais chéri, si je ne te connaissais pas si bien, je jurerai que tu me fais une crise de jalousie parce que je me suis caressé devant Lucy. Et puis je ne vois pas où est le problème avec mes vêtements, ils me mettent en valeur je trouve, pas toi ? S’amusa Julian à le taquiner.

Je vis alors le regard de Van balayer le corps ferme de Julian, et brièvement, deux flammes dorées, s’allumer dans ses yeux.

Au temps pour moi, même si Van réfutait avec véhémence, l’assertion un brin lubrique de Julian, il était clair que le jeune loup ne le laissait pas indifférent.

- C’est ça ! Garde espoir petit con. S’insurgea Van avant de se laisser tomber sur la chaise opposée à celle de Julian. Celui-ci se rapprocha prestement et se pencha vers lui.

- J’aime quand tu me donnes des petits surnoms affectueux. Lui chuchota-t-il à l’oreille.

Van se détourna en grognant, cachant son expression à l’autre loup, mais pas assez pour me priver du spectacle d’un petit sourire discret qui s’afficha sur ses lèvres.

Ouais ! Ce n’était plus qu’une question de temps, me dis-je. Peut-être que la technique de Julian fonctionnait finalement. Et dans ce cas, qu’en était-il de Michael et moi ?

Je me demandai ce qu’il pensait de moi après tous ces jours passés loin l’un de l’autre. Est-ce que ses pensées était toujours tournées vers moi ? Bien sûr il m’avait dit que je lui manquais mais le ressentait-il vraiment comme ça en plein milieu de la journée, alors qu’il était occupé à autre chose ?

Soudain, les questions se mirent à tourbillonner dans ma tête et le sentiment de manque qu’une femelle alpha ressentait pour son mâle, revint me transpercer de plein fouet. Merde ! Ça devait vraiment signifier que je ne lui en voulais plus. Après tout, il m’avait laissé tranquille durant tous ces derniers jours, mis en sourdine par la colère qui avait pris toute la place en moi. Je me levai d’un bond, faisant vaciller la chaise sur laquelle j’étais assise.

- Il faut que j’y aille ! M’exclamai-je à voix haute comme pour finir de me convaincre. Je devais aller retrouver Michael, là, maintenant. Je n’allais pas pouvoir supporter une seconde de plus sans le voir, le toucher, l’embrasser.

- Non mais… Attends, j’ai même pas encore pris mon petit déjeuner. Se plaignit Van. Laisse-moi deux minutes et j’arrive.

- Non pas au travail ! Je… je ne vais pas travailler aujourd’hui. Décidai-je sur un coup de tête. Van, appelle mes clients et dis leur que j’annule leur rendez-vous… et… enfin trouve un truc quoi.

Je finissais ma phrase alors que j’étais déjà en train de sortir de la cuisine.

- Génial les mecs, j’ai eu une promotion ! Je viens de passer de garde du corps à secrétaire particulier. Et je n’ai même pas eu besoin de coucher pour l’obtenir. Ironisa-t-il.

- Je veux bien te nommer PDG de n’importe quoi, mon cœur, par contre avec moi, va falloir donner de ta personne. Dis Julian en sautant sur l’occasion.

J’eus tout juste le temps de tourner au coin du couloir quand j’entendis le bruit d’une assiette qui se casse, et au son du petit cri de douleur de Julian, j’étais prête à parier que c’était sa tête qui avait servi de marteau.

 

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7 mai 2012 1 07 /05 /mai /2012 14:40

Je descendais les marches quatre à quatre. Peu m’importait de risquer de me rompre le cou, je ne supportais pas l’idée que Thomas soit enfermé par ma faute. J’allais le faire libérer dans la minute, que cela plaise à Michael ou non. Il ne l’avait peut-être pas tué mais l’enfermer à l’abri des rayons du soleil et de la lune, voilà qui arrivait en deuxième position après la mort, au palmarès des atrocités à faire subir à un lycan. Les loups étaient des créatures libres et sauvages qui avaient besoin d’espace et de la nature pour vivre. D’ailleurs, il n’existait que très peu de meutes établies dans les régions surpeuplées des mégalopoles, Michael lui-même me l’avait appris.

J’ignorais ou se situait exactement la cave mais je savais une chose. Mon compagnon s’y trouvait et il  me suffisait donc de suivre le lien qui m’unissait à lui en permanence désormais, pour rejoindre les cellules de la demeure. Je débouchai sur le gymnase au sous-sol et le traversai sans hésitation pour rejoindre une porte peinte de la même couleur que le mur, ce qui expliquait que je ne l’ai pas vue la première fois. Elle n’était pas vraiment cachée mais j’avais eu d’autres priorités à ce moment-là.

Lorsque je l’ouvris à la volée, un nouvel escalier se dévoila devant mes yeux. Bon sang mais de combien de niveaux disposaient cette maison ?

En me hâtant, je franchis le seuil, entreprenant de descendre la première marche. Une ampoule s’alluma immédiatement, me permettant de voir où je posais les pieds. Je m’étais attendue à des marches de pierre et pourtant le bois grinça sous mes pas à chaque marche que je descendais. J’arrivai finalement dans un couloir assez large, moquetté et tapissé de bordeaux et de vert sombre. La luminosité était faible mais suffisante pour voir ce qui m’entourait. De nombreuses portes en bois se découpaient de part et d’autres du couloir mais je ne m’y attardai pas, préférant me diriger vers les trois lourdes portes d’acier qui se trouvaient tout au bout. Je cherchais des cellules capables de retenir des lycans et il était certain qu’aucune créature magique n’aurait pu être retenue par du bois.

Arrivée à l’extrémité du couloir, je me stoppai devant un lycan que je ne connaissais presque pas et qui semblait monter la garde. Il s’appelait Mike ou Matt, je ne me souvenais plus.

- Où est Thomas ? L’interrogeai-je sans tact.

Le loup me regarda, les yeux ronds, interdit.

- Je t’ai posé une question loup ! M’exclamai-je en tentant de reproduire le ton autoritaire que prenait parfois Michael avec sa meute.

- Euh… il… il est là. Me répondit-il en me montrant la porte derrière lui de son pouce. Mais on n’a pas le droit de…

- Libère-le tout de suite ! Lui ordonnai-je en entendant le bruit des clés qu’il gardait dans sa poche et qui venaient de cliqueter alors qu’il avait refermé sa main dessus.

- Je suis désolé mais les ordres…

- Les ordres viennent de changer ! M’écriai-je. Je suis ta femelle alpha et tu vas devoir m’obéir.

J’avais un peu de peine pour ce pauvre bougre qui n’avait rien demandé à personne et qui ne souhaitait qu’obéir aux ordres que son alpha lui avait donné, mais je ne pouvais pas me montrer faible face à lui.

- Mais… mais… bredouilla-t-il en fixant la porte à ma droite d’un air paniqué alors qu’il sortait déjà les clés de sa poche.

Bon, il n’y mettait pas particulièrement de la bonne volonté mais il était à deux doigts de me céder. Il ne me manquait qu’un tout petit peu de persuasion, et Thomas serait libre.

- Ne discute pas avec moi, et ouvre cette foutue porte, plus vite que… Mais un clic métallique me coupa au milieu de ma phrase.

Le lycan regarda la porte sur ma droite, s’ouvrir avec soulagement.

- Lucy ! Que fais-tu là ? Tu devrais te reposer dans la chambre au lieu de torturer ce pauvre Matthew.

Ah voilà, Matthew, c’était ça !

Michael me regardait l’air complètement ahurit, la fatigue et l’inquiétude se dessinant sur ses traits.

- Je viens libérer mon ami qui n’a rien à faire ici. Lui dis-je, en colère.

L’expression de Michael se fit dure.

- Il est là parce que je l’ai décidé Lucy. Et au sein de cette meute, mes mots sont la loi, que ça te plaise ou non. M’asséna-t-il âprement.

- Eh bien ta loi est nulle et totalement partiale. Maintenant arrête de jouer à l’alpha avec moi et fais le libérer ! M’exclamai-je de plus en plus en proie à l’exaspération.

- Non ! Répliqua-t-il. Il a désobéi délibérément à un ordre et j’ai décidé qu’il devrait rester dans cette cellule jusqu’à nouvel ordre. Ordre qui viendra de moi.

- Oh je t’en prie ! Ne joue pas à ça avec moi Michael ! Tu sais bien qu’il n’y a pas plus loyal que Thomas. M’indignai-je. S’il a fait ça c’était pour toi. Pour nous !

- Peu importe sa raison, il a désobéi et c’est tout ce qui compte. Et je te signale que son insubordination aurait été punie de bannissement ou même de mort dans bien d’autres meutes. Se justifia-t-il.

- Oh ? Et tu veux peut-être que je t’applaudisse pour ta grande magnanimité ? Ironisai-je.

J’étais bien décidée à ne pas céder. Michael avait tort, même s’il ne s’en rendait pas encore compte.

- Bon écoute ça suffit Lucy, remonte dans la chambre et retourne te reposer, on en reparlera plus tard. Pour l’instant je ne suis vraiment pas d’humeur.

Alors celle-là c’était la meilleure ! Espérait-il vraiment que j’allais bien gentiment lui obéir ? Il me connaissait pourtant mieux que ça.

- Donc, tu n’as pas l’intention de le relâcher ? Quoi que j’en dise ? Lui demandai-je en croisant les bras.

- Non en effet. Dit Michael sans se démonter le moins du monde, croisant lui-même ses bras sur sa large poitrine.

- Très bien, dans ce cas…

J’avançai d’un pas décidé vers Matthew qui recula de quelques pas en me voyant lui fondre dessus. Je lui arrachai les clés des mains sans qu’il ne montre de résistance, bien trop surpris par mon geste soudain, et ouvrai la cellule dans la volée. Heureusement pour moi, il n’y avait que trois clés sur le trousseau et je tombai immédiatement sur la bonne.

- Lucy ! Me réprimanda Michael dans mon dos tandis que je pénétrais dans la pièce. Thomas, assis sur un lit militaire, me regarda comme si j’étais un fantôme. Ses yeux étaient hantés et son désespoir transparaissait par tous les pores de sa peau.

- Thomas, est-ce que tu vas bien ? Lui demandai-je immédiatement en me précipitant sur lui.

- Ça… Ça va. Bredouilla-t-il sans conviction. Mais tu ne devrais pas être là.

- Lucy ! Rugit Michael juste derrière moi. Sors d’ici tout de suite !

- Non ! Assénai-je en me retournant pour faire face à mon compagnon. Je ne bougerai pas d’un poil. Que les choses soient bien claires, tu refuses de libérer Thomas ? Parfait ! Mais tu vas devoir m’enfermer ici moi aussi parce que je ne ressortirai qu’avec lui.

Et tandis que je parlais je m’assis sur le lit à côté de Thomas, et lui pris la main.

Mon ami nous regardait alternativement, Michael et moi, d’un air paniqué.

- Je… Non Lucy, ne fais pas ça. Pas pour moi. Me dit-il d’un ton coupable.

- Tu ne mérites pas ça Thomas, quoi que ton imbécile d’alpha en dise. Puis me tournant vers Michael je continuai. Et si tu dois être puni pour ce que tu m’as dit alors je peux tout aussi bien rester avec toi. Après tout c’est moi qui t’aie incité à me dire ce que tu savais. Je suis aussi coupable que toi.

Et voilà ! Qu’est-ce que tu dis de ça espèce d’abrutis ? Pensai-je immédiatement en foudroyant mon compagnon du regard.

Michael me fixait, la mâchoire serrée, les traits tirés en un masque de fureur.

- Cesse de faire ta gamine et sors d’ici. M’ordonna-t-il finalement. Tout ça te dépasse alors ne fais pas semblant d’en comprendre les tenants et les aboutissants. De plus, si tu penses que ton statut de compagne te mets à l’abri de l’enfermement, tu te fourres le doigt dans l’œil ma petite, et jusqu’au coude !

Non, mais je rêvais, est-ce qu’il venait vraiment de m’appeler « sa petite » ? Loin de m’effrayer, ses menaces ne firent que rajouter un peu plus d’huile sur le feu.

- Je ne suis pas une louve Michael et tu ne peux pas disposer de moi comme bon te semble. Si tu tentes de m’enfermer où que ce soit ! Soit bien assuré que je ne me laisserai pas faire si facilement. Grondai-je plus que je ne parlais.

- Bordel Lucy, je t’ai déjà prévenue, ne me pousse pas à bout, tu ignores de quoi je suis capable.

- Et tu vas faire quoi hein ? Je n’ai pas peur de toi, Michael Madison, tout alpha que tu es, tu t’es choisi une compagne humaine, à toi d’assumer à présent et…

- Ça suffit ! S’interposa Thomas entre nous. Mais ça va pas ? Qu’est-ce qui vous arrive ? Vous avez perdu la tête ?

Son regard affolé ne cessait d’aller et venir entre nous.

- Ne te mêle pas de ça loup ! Grogna Michael.

Je me plaçai immédiatement entre les deux lycans, faisant barrage de mon corps.

- Tu ne te rends même pas compte qu’il fait ça parce qu’il s’inquiète pour nous ! M’exclamai-je avec dédain. Mais qu’est-ce qui t’arrive, je ne te reconnais plus ?

Et c’était vrai. Quelque chose en l’alpha semblait différent depuis la dernière fois que je l’avais vu, trois jours auparavant. Il ne paraissait plus être lui-même, comme si quelque chose était brisé en lui. Une terreur insidieuse s’infiltra en moi, me soulevant l’estomac. Et si le fait d’avoir obligé Michael à faire face à ses démons cette fameuse nuit, avait provoqué un changement irrévocable en lui ? Et s’il ne redevenait jamais l’homme que j’aimais et en qui j’avais confiance ? Serais-je encore capable de rester auprès de lui alors que son comportement me révulsait ?

- Tu me pousses dans mes retranchements, voilà ce qui m’arrive. Me répondit Michael, exaspéré. Et je me contrefous de son inquiétude et de ses bonnes intentions !

Thomas parut terriblement blessé par les paroles de son alpha alors que le choc s’inscrivait sur son visage.

- Michael. Commença mon ami. Je suis profondément désolé de t’avoir désobéi mais… si j’ai fait ça, c’est pour ton bien. Tu ne pouvais pas continuer à lui cacher indéfiniment.

- Garde tes excuses, je n’en ai rien à foutre. Tu n’aurais pas dû lui dire ! Jamais ! S’insurgea l’alpha.

- Elle avait le droit de savoir. S’écria Thomas. Elle devait pouvoir prendre une décision en toute connaissance de cause ! Et tu sais que j’ai raison.

- Je voulais la protéger. Répliqua mon compagnon, de plus en plus furieux.

- Mais enfin Michael, elle est là, devant toi, c’est une vraie personne, qui vit, qui respire, qui réagit et qui fera ses propres expériences. Dit Thomas sur un ton un peu plus calme. Tu ne peux pas décider ces choses-là pour elle et tu ne pourras pas la protéger contre tout ! Tu dois la laisser vivre et déterminer ce qui est bon ou non pour elle.

- Et ta technique fonctionne, c’est vrai ! protesta Michael, les dents serrées. Rappelle-moi où est ta compagne, loups ? Et réexplique-moi en quoi ta façon de faire est si formidable.

Ma main sembla se mouvoir de sa propre volonté, pour atterrir sur la joue de Michael, dans une gifle qui claqua au point que le son se répercuta sur les murs de la cellule. Pourtant, c’est Thomas qui parut le plus choqué des deux. Fixant son alpha, les yeux écarquillés, bouche bée, il ne semblait pas capable d’assimiler complétement ce qu’il venait d’entendre. Il ne semblait pas en état non plus de lui répondre, aussi, je m’en occupais à sa place.

- A compté de cet instant et jusqu’à ce que tu lui présentes tes excuses, ne songe même pas te présenter devant moi. L’avertis-je, impassible. La cruauté dont tu viens de faire preuve, rattrape l’affront qu’il t’a fait en te désobéissant.

Sur ce je m’emparai de la main de Thomas, qui ne broncha pas, et sortis de la cellule, laissant seul, l’homme que je ne reconnaissais plus et qui ne fit pas un geste pour me retenir.

 

- Hé ! Ça va aller ? M’inquiétai-je pour mon ami.

- Bien sûr que ça va aller, mais c’est plutôt à moi de te poser cette question. Me répondit-il en tournant son visage blême dans ma direction.

- Arrête ça, c’est toi qui te tiens prostré sur le canapé la tête dans les mains. Moi je vais très bien.

Evidemment que j’allais bien, la colère que je ressentais et l’adrénaline dans mes veines ne me laissaient pas l’opportunité de me rendre compte de ce que je venais vraiment de faire.

- Tu n’aurais pas dû faire ça ! Michael doit être fou de rage en ce moment. Dit-il en secouant la tête.

- Peu importe, jamais il n’aurait dû te dire ça. C’était un coup bas et c’était particulièrement mesquin. Et ça ne ressemblait pas à l’homme que j’aime.

Thomas tourna de nouveau la tête vers moi, dans un mouvement plus brusque cette fois-ci.

- L’homme que tu aimes ? Est-ce que tu lui as dit ?

- Hum hum. Acquiesçai-je d’un air absent. Mais ça l’a transformé en monstre au lieu du prince charmant on dirait.

- Ecoute Lucy, ne sois pas trop dur avec lui d’accord ? Il vient de subir un sacré choc là, entre la perte de nos frères et son secret qui t’a été révélé. Laisse-lui un peu de temps. M’expliqua-t-il.

- Je n’arrive pas à croire que tu continues à le défendre ! Vraiment, des fois tu es trop gentil Thomas. M’indignai-je.

Le loup me regarda avec douceur avant de laisser se dessiner un faible sourire sur ses lèvres.

- Tu sais, il n’a pas toujours été le Michael attentionné que tu connais. Avant ça… enfin disons juste qu’il a vraiment beaucoup changé. Son expérience avec le Maître l’a profondément marqué Lucy, et considérant tous les sacrifices qu’il a fait pour nous, je ne peux pas lui en vouloir pour une phrase malheureuse qu’il ne pensait pas.

Je n’étais pas sure de vraiment comprendre, après tout je ne connaissais Michael que depuis trois ans, mais les mots de Thomas me firent réfléchir.

- Tu penses vraiment que j’ai eu tort de lui parler ainsi ? M’enquis-je.

Son sourire se fit plus prononcé.

- Je ne sais pas. J’ai apprécié que tu prennes ma défense mais… tu es encore très jeune et lui, de son côté, est loin d’avoir de l’expérience dans les relations sérieuses avec des femmes.

- C’est mon cas aussi tu sais. Je ne me suis jamais engagée sur un tel chemin, et je ne me suis jamais laissée tomber amoureuse avant lui, mais ça n’excuserait en rien que je me comporte comme il l’a fait. Répondis-je, bornée.

- Ce n’est pas ce que j’ai voulu dire. Reprit-il en riant légèrement. Dans ton cas, tu n’as pas eu le temps de t’habituer à l’attention des hommes, aussi tout est nouveau pour toi, mais ça te facilite aussi les choses dans le sens où, tu acquiers cette expérience avec lui, petit à petit. Dans son cas à lui, il n’acquiert pas cette expérience mais il doit la remplacer. Les relations qu’il entretenait avec les femmes avant toi, sont les mêmes depuis plus de cent ans. Elles se pavanent devant lui, prêtent à tout pour l’accueillir dans leur lit et ça signifie aussi lui obéir au doigt et à l’œil. Il a toujours tout eu apporté sur un plateau si je puis dire.

- Merci, voilà qui est rassurant ! M’exclamai-je en relevant un sourcil.

- Ah ah ! Tu n’as pas à t’inquiéter. Il n’y a pas plus fidèle qu’un loup qui prend compagne. S’il y a une chose dont tu peux être certaine, c’est que tu seras la seule et unique femme qui partagera le lit de Michael, et ce jusqu’à la fin de sa vie.

J’écarquillai les yeux en prenant conscience pour la première fois de ce que ça impliquait pour Michael. En me choisissant moi, une mortelle, il s’était condamné à une quasi-éternité d’abstinence après ma mort. Voilà qui donnait un nouveau sens au mot « fidélité ».

- Est-ce que ça signifie que depuis que ta compagne est morte tu n’as pas… Demandai-je sans terminer ma phrase.

- Pas une fois.

- Oh. Dis-je en baissant les yeux, un peu embarrassée.

- Hé ! Ne fais pas cette tête. Me dit-il en me poussant doucement avec son épaule. Ça ne me manque pas tu sais. Si ce n’est pas elle je ne ressens absolument rien.

- Tu veux dire que tu n’as plus jamais ressentis du désir pour aucune femme ? Vraiment ? M’écriai-je.

- Non. Il n’y a jamais eu qu’elle et ce sera le cas jusqu’à la fin de mes jours. M’expliqua-t-il, le regard dans le vague, comme s’il était capable de la voir à travers le voile de ses pensées.

- Thomas ! Comment s’appelait-elle ?

Il se figea avant de se tourner doucement vers moi, les yeux brillant d’émotion.

- Bellinda. Elle s’appelait Bellinda.

Je me sentis coupable en constatant à quel point la compagne de Thomas lui manquait, tandis que moi, qui avait la chance de pouvoir être avec mon compagnon, je préférais me disputer avec lui.

- Si je comprends bien, en persistant dans ma colère, je condamnerai Michael à une éternité de souffrance. C’est bien ce que tu essaies de me dire ?

- Tu as tout compris ma belle. Me répondit-il avec un clin d’œil. Ça fait cher payé pour une phrase de travers qui ne t’était même pas destinée tu ne crois pas ? Et pour ma part, je ne lui en veux déjà plus alors…

- Mouais, ça mérite réflexion. Dis-je après un long soupir. Je vais quand même le faire mariner un peu, il l’aura bien mérité. Et puis si je cède déjà, il va se croire tout permis. Ronchonnai-je.

- A ta guise, ma belle, mais la vie est trop courte pour gaspiller le peu de temps que vous allez passer ensemble, tu peux me croire. M’avertit-il, un voile de douleur passant devant ses yeux. Alors ne traine pas trop d’accord ? Il a fait une erreur, ça arrive à tout le monde.

Sur ce, il se leva et se dirigea vers la porte d’entrée. Il devait avoir hâte de rentrer chez lui. Mais alors qu’il posait sa main sur la poignée, je ne pus m’empêcher de lui poser une dernière question.

- Thomas ! L’interpellai-je. Qu’est-ce qui a fait changer Michael en celui que je connais ?

Mon ami se tourna et m’offrit son plus beau sourire avant de me répondre.

- C’est toi ma belle. C’est toi.

 

Suite>>

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7 mai 2012 1 07 /05 /mai /2012 14:38

- Il… Il va s’en sortir ? Michael ? Il va s’en sortir n’est-ce pas ? Ne cessait de demander Marco.

- Je ne sais pas. Dit l’alpha, la voix empreinte de tension retenue. Lucy peut faire des miracles mais…

- Mais il faut le sauver ! supplia de nouveau Marco. C’est… c’est de ma faute ! Il s’est mis devant moi et il a pris le coup du vampire pour me protéger !

- On sait Marco. Calme-toi ! Tu n’as rien fait de mal. Ajouta Nathan.

- Oui, il a pris sa décision seul, c’était son rôle de dominant de te protéger ! dit Michael.

- Mais s’il ne s’en sort pas ? Si Lucy n’arrive pas à le soigner ? S’inquiéta de nouveau le plus jeune loup.

- Et si vous la fermiez plutôt ! Explosai-je. Bordel ! Comment je suis censée me concentrer avec tout le boucan que vous faites ? Vous croyez peut-être que c’est facile ? C’est le troisième loup gravement blessé que je dois soigner ce soir et j’en ai ma claque de devoir guérir mes amis alors vous allez la boucler sinon, les dernières force qui me reste, c’est pour vous botter le cul que je vais les utiliser.

Cela faisait déjà cinq bonnes minutes que je m’échinais à faire sortir mon pouvoir par quelque moyen que ce soit et l’état de Thomas ne cessait d’empirer. Une mare de sang aux proportions hallucinantes – un corps pouvait-il réellement contenir autant de sang – s’étendait sous lui. Son T-shirt en lambeau laissait apparaitre trois longues griffures qui lui barraient tout le torse, de l’épaule gauche à la hanche droite. Les plaies étaient profondes et laissaient entrevoir les os de la cage thoracique sous les muscles déchiquetés. Et si on ajoutait à ça, la petite séance de voltige que lui avait fait subir Michael, c’était déjà un miracle que son cœur continue de battre, faiblement certes, mais il battait néanmoins. Mais en attendant, mon pouvoir refusait de se montrer, et j’avais beau essayer de tirer de toutes mes forces sur le filament qui composait la base de mon pouvoir, rien ne se produisait. Et ces trois idiots ne cessaient de me distraire avec leurs jérémiades.

Plus les minutes défilaient, plus la sensation que j’allais perdre Thomas se faisait sentir.

- Meeeeerde ! Jurai-je à voix haute. Pourquoi ça ne veut pas marcher ?

- Amour, calme-toi, peut-être que…

- Peut-être que rien du tout d’accord ! Hurlai-je sur Michael. Tu n’en sais rien du tout ! D’ailleurs moi non plus je n’en sais rien, je ne comprends rien à ce putain de pouvoir qui fonctionne que quand ça lui chante ! En fait le seul qui semblait y comprendre quelque chose est en train de me claquer entre les doigts sans que je ne puisse rien faire !

Je hurlais parce que j’étais en colère. J’étais furieuse. Furieuse contre les vampires qui avaient fait tant de mal ce soir, furieuse contre les loups qui n’avaient pas réussi à se défendre, et furieuse contre moi-même qui n’étais pas assez forte pour protéger ma meute.

- Qu’est-ce qu’il te dirait ?
Je relevai la tête pour voir apparaitre Van sur le pas de la porte, le loup de Julian sur ses talons.

- Quoi ?

- Allez ma belle ! Tu le connais depuis trois ans. C’est ton ami et ton confident depuis tout ce temps. Moi tu me connais pour des raisons différentes et Michael c’est pareil, mais lui tu le connais parce que votre amitié s’est forgée avec le temps alors s’il y a une personne capable de savoir ce qu’il dirait en ce moment, c’est toi.

Je regardai Van, mon loup, mon frère comme si je le rencontrais pour la première fois. Je le connaissais taquin, espiègle et narquois, mais c’était la première fois que j’entrevoyais en lui la sagesse, et l’esprit vif, que lui avait conférer ses nombreuses années d’existence.

- Van… Gémis-je avant d’éclater en sanglot. Je ne sais pas… J’ai l’impression de ne plus rien savoir…

Van me sourit et son sourire fatigué creusa de petites ridules d’expression aux coins de ses yeux. En cet instant, il aurait pu porter une longue barbe blanche que ça ne m’aurait pas surprise outre mesure.

- Bien sûr que tu le sais. Réfléchis bien. Se contenta-t-il juste de me dire.

J’inspirai profondément, cherchant un souvenir de Thomas, de sa voix douce, calme et profonde, et cherchant ce que cette voix aurait pu me dire pour m’aider.

- Il me dirait de me calmer. Soufflai-je enfin. Il me dirait que mon pouvoir fait appel à mes sentiments et que ce n’est pas la colère que j’utilise pour soigner.

- Non en effet ! Acquiesça Van. Tu es une alpha Lucy, et pas seulement parce que Michael a fait de toi sa compagne. Tu l’as toujours été, c’est inscrit en toi. Maintenant, dis-moi quel sentiment tu utilises pour guérir ?

Son sourire entendu me disait qu’il connaissait déjà la réponse, mais je savais – et lui aussi sans doute − qu’en cherchant la solution moi-même, je prendrais vraiment conscience de la réalité du fait.

- Le besoin de protéger. Dis-je dans un souffle, alors que tout me paraissait soudain d’une clarté absolue.

Le sourire du lieutenant s’illumina un peu plus et j’eus la curieuse impression de me trouver face à un père fière de son enfant.

 - C’est très bien ma belle. Maintenant, guéris-le ! Me dit-il comme s’il n’avait pas douté une seule seconde de ma capacité à y arriver.

Je souris et me concentrai de nouveau. C’était vrai, à chaque fois que j’avais fait appel à ce pouvoir de guérison, j’avais voulu protéger mon patient.

Je cherchai donc au fond de moi, ce qui me reliait à Thomas, les années d’amitié que nous avions partagé, les sentiments profonds que nous ressentions, ma peine lorsqu’il m’avait raconté son histoire, mon désir de le réconforter et d’effacer sa douleur et… mon besoin de lui, à mes côtés, en tant qu’ami important, dans ma vie, tout simplement.

La lueur dorée s’échappa aussitôt de moi, se précipitant sur les blessures de Thomas, s’infiltrant dans chaque parcelle de son corps. Ça allait être difficile et épuisant mais, je le savais, j’en étais sûre, j’allais le sauver… oui ! J’allais le protéger.

 

Il faisait sombre autour de moi et mes yeux ne parvenaient pas à s’habituer à l’obscurité. J’avais terriblement chaud et pourtant des frissons parcouraient tout mon corps. Une odeur désagréable emplissait mes narines et j’avais du mal à respirer. J’essayai de me relever mais je me cognai à quelque chose de dur et pour ne pas m’écrouler au sol, j’essayai de me raccrocher à n’importe quoi à ma portée. Mes mains se posèrent sur une paroi rugueuse, humide et tiède. Le mur auquel je m’étais agrippée était désagréable à toucher, un peu comme quelque chose de poisseux mais il avait au moins le mérite de m’empêcher de tomber et de me permettre d’évoluer alors que les ténèbres m’entouraient.

J’avançai à tâtons, incapable de savoir où je me trouvais mais certaine que je devais bouger. Quelque chose semblait me pousser vers l’avant, le silence était complet et pourtant je ressentais une sorte d’appel provenant de la direction vers laquelle je me dirigeais. Au bout d’un long moment, mes yeux perçurent une lueur diffuse et vacillante et plus je m’en rapprochais, plus les ténèbres reculaient. Finalement je parvins à reconnaitre l’endroit dans lequel je me trouvais. C’était un tunnel, un tunnel aux parois rocheuses et ruisselantes. Je parvenais enfin à y voir assez clair, surtout grâce à la lueur qui se faisait de plus en plus vive au fur et à mesure que je m’en rapprochais, et j’avançai sans l’aide des parois.

Ma progression me fit déboucher dans une cavité plus grande de la roche, une sorte de grotte. Au centre, un feu écarlate crépitait sur quelques bûches calcinées, origine de la lueur qui m’avait menée jusque-là. Et au-delà, une silhouette sombre se dessinait.

Tout de noir vêtu, un long manteau de cuir lui descendant jusqu’aux pieds, la silhouette releva la tête en m’entendant approcher. L’homme me regarda d’un air choqué, ses beaux yeux bleus pâles écarquillés. Un tremblement le secoua, agitant ses longs cheveux blancs. Il n’avait pourtant pas l’air vieux, bien au contraire. Il était incroyablement beau, de cette beauté qui ne semble pas naturelle sur terre, trop irréprochable, trop parfaite, comme les statues modelée par la main d’un sculpteur.

Lorsqu’il ouvrit la bouche, sa voix profonde résonna en moi comme un million de carillons tintinnabulant.

- Que fais-tu là ? Il n’est pas temps. Retourne d’où tu viens.

- Je ne sais pas où je suis. Dis-je, d’une petite voix apeurée.

- Bien sûr que tu l’ignores. Je te l’ai dit, il n’est pas temps. Lucinda, rentre chez toi !

L’homme connaissait mon nom et bien que je ne l’aie jamais rencontré, ce constat me réchauffa le cœur plus profondément que le brasier qui ne se trouvait qu’à quelques mètres de moi.

- Comment faire pour rentrer chez moi ?

- Si tu ne sais pas comment rentrer, tu ne dois pas venir. Me dit-il en secouant la tête, et sa désapprobation me fit l’effet d’un coup de poignard en plein cœur.

- Mais je ne l’ai pas fait exprès. Protestai-je pour me défendre.

- Evidemment ! Dois-tu me faire répéter sans cesse la même chose ? Il n’est pas temps !

- Mais quand sera-t-il temps alors ?

Le visage de l’homme se radoucit instantanément.

- Bientôt mon amour. Bientôt.

Et tandis que je buvais ses paroles, ses lèvres s’étirèrent, ses yeux se plissèrent, et mes jambes me lâchèrent. Il venait de me sourire et ce sourire… c’était le mien.

 

En ouvrant les yeux, la première chose dont je me rendis compte fut que mes poumons me faisaient mal. J’avais pris une trop grande inspiration en me réveillant en sursaut.

- Dieu merci, chérie, tu es enfin réveillée ! S’écria Marli.

Je tournai les yeux pour constater qu’elle était assise dans un fauteuil à côté de mon lit, me tenant la main.

- Marli ? Qu’est-ce qui s’est passé ? Demandai-je d’une voix éraillée et pâteuse.

- Tu t’es effondrée. Après avoir soigné Thomas, tu t’es écroulée et nous n’avons pas réussi à te réveiller. Nous nous sommes tous relayés à ton chevet en espérant que tu finirais par nous revenir. M’expliqua-t-elle, des trémolos dans la voix.

- Marli, depuis combien de temps je dors ?

- Trois jours, chérie. Les trois jours les plus angoissants de ma vie.

Je me redressai d’un bond dans le lit mais me rallongeai aussitôt, prise de puissants vertiges.

- Bon sang ! Trois jours ? Mais comment j’ai pu dormir autant ?  Demandai-je complètement ahurie.

- Eh bien… tu étais vraiment épuisée après nous avoir soignés alors…

- Mon dieu c’est vrai ! Ta blessure ! Comment tu vas ? Lui demandai-je précipitamment.

Marli me sourit et son visage s’illumina.

- Je suis toute neuve ! Tu m’as sacrement bien rafistolée. Dit-elle en soulevant son pull pour m’exposer ses côtes.

Sa peau blanche et laiteuse contrastait avec le rouge de son vêtement et en effet, la blessure avait disparu. Mais en concentrant mon regard sur sa peau, je vis une zone d’environ deux centimètres de diamètre, légèrement plus sombre et en relief. Elle avait une cicatrice.

- Marli… Ta peau… pourquoi tu as une cicatrice ? Lui demandai-je, un peu inquiète. Les loups n’avaient pas de cicatrices, jamais. Leur guérison rapide ne le permettait pas, à fortiori quand je les soignais.

Mon amie prit un air un peu gêné.

- Eh bien… Tu sais… la blessure a été créée par de l’argent. Enfin, c’était plutôt un alliage de plusieurs métaux mais le pourcentage d’argent était suffisant pour nous tuer alors forcément… ça a laissé quelques traces.

- Oh Marli… je suis tellement désolée… Nathan… Me contentai-je de dire, consciente que la terrible blessure de son mari allait se dessiner sur son visage pour le restant de sa vie.

- Ne t’excuse pas Lucy. Ne t’excuse surtout pas ! Tu lui as sauvé la vie et pour ça je t’en serai éternellement reconnaissante. Me dit-elle, sincère, en me prenant la main. Et puis il a toujours été trop beau, j’ai toujours eu peur qu’on me le pique. En plus, j’ai toujours aimé les hommes marqués, c’est un signe de son courage. Ajouta-t-elle pour me faire sourire.

Pour ma part, je ne ressentais aucune envie de rire, j’étais encore à moitié groggy et je me demandais ce que j’avais encore loupé pendant ces trois jours.

- Et où est Michael ? Demandai-je finalement.

Marli soupira profondément.

- Il est là où il n’a pas cessé d’être depuis ces soixante-douze dernières heures. A la cave. M’annonça-t-elle.

- Quoi ? Comment ça ?

- Il y a des cellules à la cave. En générale, elles ne sont utilisées que pour la détention des loups qui perdent la tête où les nouveaux qui n’ont pas encore appris à se contrôler, mais… Ils y ont enfermé le vampire et ils essaient de le faire parler.

- Oh ! Je vois. Me contentai-je de dire, ne sachant pas trop quoi en penser.

Soudain la porte de la chambre s’ouvrit dans un grand fracas, nous faisant sursauter toutes les deux.

- Elle est réveillée ? Brailla Van qui venait de débouler en trombe dans la chambre. Je suis sûr d’avoir entendu sa voix !

J’éclatai de rire en me demandant comment j’avais pu penser à lui comme à un homme sage la dernière fois que je l’avais vu. Mon ami se précipita sur moi et bien qu’il soit seul, j’eu soudain l’impression de comprendre ce que ressentait quelqu’un chargé par un troupeau d’éléphant. Il se jeta quasiment sur le lit, me plaquant dans ses bras et me forçant à me recroqueviller sur moi-même.

- Nom de dieu ! Espèce d’idiote ! Ne me refais jamais plus une telle frayeur ! Me souffla-t-il à l’oreille. Jamais plus !

Sa voix tremblait et son corps, empreint de tension, frissonnait. Je resserrai mes bras autour de lui et le serrai fort moi aussi.

- Je suis désolée. Tu me pardonnes ?

- Hum… Gémit-il seulement contre moi.

- Mais au fait ? Tu n’avais pas le bras cassé toi ? Lui demandai-je à moitié étouffée dans son giron.

- Pfff, tu plaisantes, c’était trois fois rien, je n’ai déjà plus mal.

- Alors là, laisse-moi rire ! Intervint Marli. L’os avait déjà commencé à se reconstruire, mais comme la fracture n’était pas réduite, on a été obligé de le rebriser. Et il a pleuré tout le long comme une fillette. Se moqua-t-elle avant d’éclater de rire.

- Espèce de sale petite vipère ! Ta langue fourchue finira par te perdre. Lui répondit-il avant de rire lui aussi, me décollant de son étreinte juste le temps de lui administrer une pichenette sur le front pour me reprendre bien rapidement dans ses bras.

- Euh… Van… Tu vas finir par m’étouffer. Finis-je par me plaindre.

- Je suis assez d’accord. Intervint une voix grave sur le seuil de la chambre. A moins que tu veuilles me rendre jaloux, tu ferais mieux de la laisser respirer un peu.

J’écarquillai les yeux en constatant qui se tenait dans l’embrasure de la porte. Encore plus grand qu’avant, les épaules carrées, les muscles saillants sous le tissu d’un T-shirt incontestablement trop petit pour lui, Julian souriait, les bras croisés, appuyé contre le chambranle de la porte. Il était méconnaissable et avait l’air d’avoir vieilli de dix ans en quelques jours. Sa mâchoire était plus carrée, ses traits plus adultes, son corps était celui d’un homme et pas n’importe quel homme. En fait il aurait facilement pu prétendre au titre de l’homme le plus sexy de l’année. Pourtant sa chevelure blonde juste en dessous des épaules et ses yeux d’un bleu limpide n’y trompaient pas, c’était bien Julian, pas de doute là-dessus.

Van enfouit sa tête dans mon épaule et gémit.

- Non ! Fiche moi la paix toi ! Pleurnicha-t-il. Lucy, dis-lui d’arrêter ! Il ne me laisse pas respirer deux minutes.

- Allons mon cœur, tu sais bien que tu adores ça. Ajouta Julian en lui envoyant un baiser.

Waouh ! Visiblement, le corps de Julian n’était pas la seule chose à avoir changé ! Son comportement était aux antipodes de ce qu’il avait été jusqu’à maintenant.

- Dans tes rêves seulement Julian ! Dans tes rêves ! Se plaignit Van.

- Oh oui mon cœur, dans mes rêves tu adores ça. Et bien d’autres choses encore ! S’exclama le tout nouveau loup, un sourire suave sur les lèvres.

- Euh… J’ai loupé quelque chose ? Demandai-je en tentant de résister au fou rire qui menaçait de s’échapper de ma bouche à chaque instant.

- Rien qui vaille la peine d’être mentionné… pour l’instant du moins. M’annonça Julian. Mais… J’y travaille.

Marli éclata de rire et il ne m’en fallut pas plus pour laisser éclater mon hilarité à mon tour.

- J’étais certaine que tes sentiments n’étaient pas du chiqué ! Lui dis-je entre deux éclats de rire. Contente de voir que tu es toujours toi-même… pour ça au moins.

Julian s’approcha de moi et Van resserra son étreinte autour de moi.

- Ne t’approche pas d’elle espèce de dépravé lubrique ! Tu vas la contaminer ! Ronchonna-t-il.

- Ravi de te retrouver Lucy ! Tu nous as fait une belle frayeur. Dit Julian avant  de déposer un baiser sur ma joue et d’en voler un sur celle de Van.

- Touche-moi encore une fois et c’est la dernière chose que tu feras. Le menaça ouvertement le lieutenant.

Je perdis toute trace d’humour et me préparai à intervenir au cas où ces deux-là se décidaient à faire un peu plus que se chamailler, mais la tension retomba bien vite lorsque je vis les yeux de Julian pétiller.

- Techniquement, c’est la quatrième fois que tu me dis ça, et pourtant… Julian fit mine de se regarder de haut en bas. Je suis toujours entier.

Je repartais dans un éclat de rire incontrôlable alors que j’assistais à l’insolence affichée du jeune loup.

Van détourna les yeux, un peu gêné.

- Pff ! Bien sûr que oui. Je ne vais pas te mettre une branlée pour un bisou sur la joue. En revanche, j’ai été plutôt conciliant ce matin, mais si je te retrouve dans mon lit encore une fois tu vas passer un sale quart d’heure crois-moi ! l’avertit-il en le pointant du doigt.

Je manquai m’étrangler avec ma propre salive en entendant ça, et Marli me tapota le dos pour m’aider à faire passer la quinte de toux entrecoupée d’éclat de rire.

- Ne rigole pas Lucy ! c’est pas drôle ! Est-ce que tu as une idée de l’effet que ça fait de se réveiller avec quelqu’un qui n’a rien à faire dans ton lit ? Me réprimanda-t-il.

Je soulevai un sourcil en repensant à ma première matinée en tant que compagne de Michael, alors que je m’étais réveillée en compagnie de quatre loups.

- Oui j’en ai une idée assez précise en tête. Me contentai-je dire. Il comprit parfaitement le message.

- Rien à voir ! Me corrigea Van. Crois-moi, ses intentions étaient bien moins louables que les nôtres.

Ca je voulais bien le croire. Il me suffisait de voir le regard que Julian posait sur mon ami pour me rendre compte des pensées lubriques du jeune loup à son égard.

Eh bien voilà qui promettait de belles séances de fou rire en perspective… Du moins, tant que tout cela restait un jeu pour l’un comme pour l’autre. Le problème était que j’avais bien compris que, d’une part, les sentiments de Julian n’étaient pas factices comme l’avait cru Michael de prime abord, et d’autre part que Van ne souhaitait pas le blesser. J’espérais sincèrement que mes deux amis n’allaient pas finir par souffrir de tout ça. Mais pour l’heure je n’avais pas envie d’y voir autre chose qu’une plaisanterie un peu trop poussée, j’avais d’autres préoccupations plus importantes en tête.

- Hé ! Interpellai-je les loups de la pièce, en reprenant mon sérieux. Vous voulez bien me dire comment va Thomas ?

La réaction ne se fit pas attendre et me laissa présager le pire quant à la santé du lycan. Ils détournèrent tous le regard, le sol semblant soudain être devenu plus intéressant que moi.

- Il va bien. Se borna à me dire Van.

- D’accord ! Mais encore… ?

- Il se repose et ne doit pas être dérangé.

- Van… Gémit Marli.

Mais celui-ci lui lança un regard douloureux lui intimant le silence.

- C’est bon, arrêtez ça et dites-moi ce que vous essayez de me cacher, sans grand succès d’ailleurs.

Van soupira et se passa la main dans la nuque d’un air gêné.

- Lucy… Commença-t-il. Il a… désobéi aux ordres…

- Et alors ? Tu le fais tout le temps.

- Oui mais… avec moi, ça ne va jamais aussi loin. Se justifia-t-il, embarrassé. Le sujet de… de Michael et du Maître… c’est tabou tu comprends ? On le sait tous mais on n’en parle pas… et surtout pas à toi. Jamais.

- Van ! Où est Thomas ? Commençai-je à m’énerver.

- Attends, avant ça, tu dois savoir que ce n’est pas une bonne idée d’aller embêter Michael. Il est vraiment sur les nerfs avec ce qui s’est passé, plus le vampire qui ne crache pas un mot. Et puis tu dois aussi savoir que ça aurait pu être pire. Après l’affront que Thomas lui a fait en désobéissant ostensiblement, il était parfaitement en droit de le tuer ou de le bannir de la meute, or, il ne l’a pas fait. Débita-t-il d’une seule traite.

- Van ! Dis-moi où il est. Lui ordonnai-je avec la voix de l’alpha.

- Il est dans une cellule à la cave. M’avoua-t-il aussitôt.

- Quoi ? C’est une blague ? M’insurgeai-je.

- Il est incarcéré jusqu’à nouvel ordre. Mais ça va aller Lucy. Je suis sûr que ce n’est que le temps que Michael se calme un peu et qu’il se rende compte que Thomas a fait ça pour son bien. Tenta-t-il de défendre son alpha. Parfois la loyauté des lycans me tapait vraiment sur les nerfs.

- Sortez tous ! Ordonnai-je. Je dois m’habiller. J’ai deux mots à dire à mon compagnon.

- Lucy… Tenta d’intervenir Van. Mais je n’avais pas la moindre envie de l’entendre déblatérer des justifications qui sonneraient forcément fausses à mes oreilles. Cette fois Michael était allé trop loin, et je n’avais pas du tout l’intention de laisser passer ça. Louve ou non, cette meute était désormais la mienne, au même titre que celle de mon compagnon.

- Sortez j’ai dit !

Les loups sortirent tous de la chambre et je me levai de mon lit. Ça n’allait pas être agréable mais j’allais faire sortir Thomas… quoi qu’il m’en couterait.

 

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7 mai 2012 1 07 /05 /mai /2012 14:35

- Arrête Lucy, je ne plaisante pas. M’avertit Michael.

- Moi non plus ! Alors ça suffit, ma décision est prise ! Et cesse de me couver comme une mère, je veux le voir de mes propres yeux. Lui répondis-je, bien décidée à entrer dans la maison pour constater l’étendue des dégâts.

- Mais bon sang tu ne peux pas voir que je fais ça pour te protéger ! S’exclama mon compagnon. Que t’attends-tu à trouver à l’intérieur ?

- Je n’en sais rien ! D’accord ! Mais je m’en fiche je veux y aller quand même ! Rétorquai-je. Et s’il y a encore un loup vivant je le sauverai.

Michael me saisit par les épaules et planta son regard dans le mien.

- Ils sont morts, amour, ils sont tous morts. M’annonça-t-il sans détour. Tu ne peux plus rien faire, pas dans ton état.

Je fixai toujours les yeux humides de mon compagnon alors qu’il m’annonçait qu’une partie de sa meute avait été décimée par les vampires. Et alors que même à cet instant il ne semblait penser qu’à moi, je ne cessai de me répéter que je devais quand même essayer quelque chose.

- Je sais mon cœur. Lui dis-je en posant ma main sur sa joue. Mais je dois quand même y aller.

Michael ferma les yeux, de découragement sans doute.

- C’est un vrai carnage à l’intérieur… tu ne le supporteras pas. Chuchota-t-il, peut-être plus pour lui-même.

- Je suis forte moi aussi. Je le supporterai je te le promets. Tentai-je de le rassurer. Thomas pourrait te le dire, j’ai tenu bon dans l’antre des vampires alors…

Mais mon compagnon ne m’écoutait plus, il s’était redressé d’un coup et fixait Nathan, Marli et Van tour à tour.

- Est-ce que l’un d’entre vous a vu Thomas ce soir ? Demanda-t-il précipitamment. Je… Je ne le sens plus… je… je ne sens rien du tout… je ne le trouve pas.

Michael se concentrait, les yeux clos pour tenter de retrouver son lieutenant parmi tous les loups de sa meute dont il sentait le pouvoir en lui.

- Je ne l’ai pas vu… mais ça ne veut pas dire qu’il n’était pas là. Admit Van à regret.

Les deux autres loups acquiescèrent avec inquiétude.

- Michael… couinai-je difficilement tandis que les larmes emplissaient tout mon champs de vision d’un voile trouble. Je me raccrochais à l’idée qu’il allait trouver son lieutenant d’un instant à l’autre, je n’avais qu’à attendre, il allait le trouver, c’était certain. Sauf que les secondes passèrent et Michael, figé tel une statue de marbre, continuait de chercher en lui la présence de Thomas, sans la trouver.

N’y tenant plus je partis en courant vers la maison et aucun des loups n’eut le temps de me barrer le chemin. Si Thomas était quelque part, je devais le trouver et… faire tout ce qui était en mon pouvoir.

Je passai par la porte de derrière, qui menait dans la cuisine. Tout était sans dessus-dessous et je manquai trébucher sur une casserole en inox.

Je me précipitai dans le salon, lieu de ralliement préféré des loups. Mais en arrivant dans l’encadrement de la porte, mes jambes cessèrent de me porter et je m’écroulai à genoux, en portant une main à ma bouche dans un cri silencieux. C’était pire que ce que j’avais imaginé, c’était un massacre, un véritable massacre !

Les larmes brouillèrent la vision d’horreur qui s’étalait devant mes yeux et qui avait pris le temps de s’inscrire sur ma rétine.

- Amour… Chuchota Michael juste derrière moi. Je me retournai pour le regarder, lui qui venait de perdre six de ses loups, du moins c’était le nombre de corps que j’avais pu dénombrer dans la pièce. Il tomba à genoux à côté de moi et m’entoura de ses bras, calant ma tête dans son cou pour que je n’aie plus à supporter la scène terrible que j’avais devant les yeux.

- Michael… pourquoi ? Pourquoi ils ont fait ça ? Demandai-je en pleurant.

- Je ne sais pas encore, mais je vais le découvrir… je te promets de le découvrir. Me répondit-il, l’intensité de sa voix faisant vibrer son torse tout contre moi.

- Tu as pu trouver Thomas ? Lui demandai-je en me reculant un peu pour l’observer.

Il détourna le regard sans me répondre, baissant les yeux par la même occasion.

Je me relevai donc en m’appuyant sur l’épaule solide de mon compagnon. Il était mon soutien en toutes circonstances et ce geste n’en était qu’une preuve de plus.

- Qu’est-ce que tu fais ? Me demanda-t-il en retenant ma main dans la sienne.

Je poussai un profond soupir et me résignai à l’inéluctabilité de ce que je devais faire.

- Je dois savoir Michael, je dois savoir si Thomas est ici, parmi les… les loups qui n’ont pas survécu.

Mon compagnon se releva à son tour en gardant ma main dans la sienne.

- Je vais t’aider. Me dit-il finalement.

- Nous aussi. Dit Nathan qui se tenait un peu en retrait dans le couloir, Marli pleurant et hoquetant dans ses bras. Van et Julian sont restés en arrière pour surveiller le vampire.

- Bien, allons-y. dis-je d’une voix moins déterminée que je ne l’avais espéré.

 

La pièce était dans un état épouvantable ! Le canapé blanc, les meubles, la télévision… tout était retourné, détruit, brisé, taché. J’avais l’impression d’entrer dans un monde cataclysmique étranger et je ne reconnaissais rien. De longues estafilades rayaient les murs habituellement immaculés de la pièce. Et le sang… le sang était partout. De longues gerbes déjà noirâtres de coagulation avaient été projetées un peu partout et des flaques rouges sombres s’étendaient sous les six corps, maculant les tapis blancs et se rejoignant parfois sur le carrelage. C’était un vrai cauchemar, un monde apocalyptique, un univers de douleur que, jamais, je n’aurais pu imaginer.

L’odeur métallique du sang imprégnait toute la pièce et je dus retenir un haut-le-cœur en y pénétrant complètement.

Je m’approchai avec hésitation du premier corps, Michael sur mes talons, me tenant par les épaules. Mais alors qu’il s’accroupissait pour retourner le cadavre qui était sur le ventre, je fermai les yeux, soudainement en proie au doute quant à ma capacité à rester dans la pièce une seconde de plus.

- C’est Arthur. Entendis-je Michael s’adresser aux autres personnes présentes. Sa voix paraissait exceptionnellement calme mais quand je rouvris les yeux ses deux mains serrées en poing, tremblaient sur ses cuisses. Je jetai un coup d’œil sur le visage du loup qui avait visiblement été égorgé, je ne me souvenais pas d’un loup du nom d’Arthur mais quand je le vis je me souvins immédiatement de lui, souriant et plaisantant avec ses frères de meute, l’après-midi même, alors que je déballais les cadeaux que m’avait envoyée leur alpha. De nouveau, mon estomac se manifesta douloureusement.

- Et ici, il y a Stan et Vadim. Répondit Nathan avant d’envoyer son poing sur le carrelage.

- Merde, je n’y comprends rien ! Jura-t-il. Pourquoi ? Qu’est-ce qui s’est passé pour que ça arrive ?

Michael ne répondit pas, préférant se diriger vers le cadavre suivant, mais je savais qu’il se posait la même question, tout comme nous tous d’ailleurs.

- Ici, il y a Victor et… Danny. Nous informa-t-il après avoir vérifié. Ils ont été égorgés.

- Ici aussi. Précisa Nathan. C’est la même chose pour Amal.

- Quoi ? Amal aussi ? demanda mon compagnon.

- J’en ai bien peur.

- Bon sang, il était avec moi depuis le début. Presque aussi vieux que moi… Dit-il, la voix tremblante de colère et de chagrin. Ils me le paieront… ils me le paieront tous autant qu’ils sont.

- Ils ne leur ont laissé aucune chance. Ajouta Nathan. Ils ont tous été égorgés ! Ça signifie qu’ils les ont attaqués par derrière, alors qu’il ne s’y attendait pas. Ça s’est sans doute passé très rapidement et ils n’ont pas dû avoir le temps de comprendre ce qui leur arrivait.

Mais Michael ne semblait pas écouter, et préférait regarder le ciel nocturne à travers la baie vitrée brisée. Son expression neutre ne trahissait rien, mais je sentais au fond de moi un terrible sentiment de culpabilité qui avait le gout amer d’un acte manqué. Ce n’était pas le mien, je le sentais bien, et je sentais aussi que Michael regrettait quelque chose, quelque chose qu’il n’avait pas fait et qu’il aurait dû. Je me dirigeai vers lui pour tenter de calmer son trouble par je ne savais quel acte réconfortant, mais c’est Nathan qui intervint le premier.

- Ce n’était pas ta faute.

Michael tourna des yeux dénués d’expression vers son premier lieutenant.

- Tu as déjà prouvé tout ce que tu avais à prouver et tu es un bon alpha mon frère. Continua Nathan. Ne te blâme pas pour ce qui n’est pas de ton ressort.

- Peut-être… si j’avais… Commença Michael.

- Si tu avais quoi ? Hein Michael ? Si tu avais quoi ? S’emporta le lieutenant. Tu trouves que tu n’as pas encore assez donné de ta personne ? Bordel Michael ! Quinze ans, c’est suffisant… largement suffisant.

Mon compagnon écarquilla des yeux devant la virulence et l’intervention de son ami.

- Nathan qu’est-ce que… ? Demanda-t-il sans pouvoir finir sa phrase.

- Tu crois que je ne sais pas à quoi tu penses ? Bon dieu, je suis ton meilleur ami depuis près de quarante ans ! Je te connais tu sais ! Le coupa-t-il. Tu avais rempli ta part du marché, tu n’as rien à te reprocher… non… surtout pas toi. Pas après ce qu’il t’a fait…

- Loup ! Tais-toi ! Le coupa à son tour Michael. Tu outrepasses les règles que j’ai imposées.  Ne crois pas que ton statut te mette à l’abri de ma colère.

- Est-ce que c’est un ordre de l’alpha ? Demanda le premier lieutenant avec défi. Parce qu’il n’y a pas d’autres raisons à ces règles que sa présence. Combien de temps vas-tu encore lui cacher la vérité ? Finit Nathan en me regardant.

Michael fondit sur son ami à une vitesse ahurissante, le saisit à la gorge et le plaqua contre le mur derrière lui en le soulevant du sol d’une seule main.

- Je ne t’autorise pas à me dire ce que je dois révéler à ma compagne ou non. Hurla-t-il à quelques centimètres à peine du visage de son loup. Et quand je te dis de te taire tu m’obéis, c’est bien compris ?

Marli gémit de peur et je me précipitai sur les deux lycans, m’agrippant de toutes mes forces au poignet de l’alpha pour le faire lâcher prise, sans succès d’ailleurs.

- Michael arrête ! Lâche-le ! Criai-je, mais rien n’y faisait et mon compagnon refusait obstinément de relâcher sa prise, aussi dus-je me résoudre à employer la seule carte qu’il me restait à jouer, la plus répugnante de toutes.

- Je… je suis déjà au courant d’accord ! Lui avouai-je en pleurs. Je sais déjà tout, pour toi, pour le Maître, pour ce qui s’est passé pendant ces quinze ans… je sais tout.

La surprise fit lâcher Michael qui vacilla de quelques pas en arrière, les yeux exorbités d’horreur, alors qu’il me regardait comme s’il ne me connaissait pas.

- Tu… tu… quoi ? Non… tu… tu ne peux pas savoir… Bredouilla-t-il totalement perdu.

Nathan s’écroula à terre en toussant, se tenant la gorge d’une main tandis qu’il indiquait à Marli, de l’autre, de rester loin de nous.

- Si, je sais. Thomas m’a tout racontée, quand nous étions dans le repère des vampires, c’est comme ça que mon pouvoir s’est développé, c’est comme ça que j’ai pu ressentir suffisamment de colère pour l’utiliser, je sais que je n’aurais pas dû mais je voulais savoir, je devais savoir.

Je tentais d’accaparer les pensées de Michael afin qu’il n’ait pas le temps de trop réfléchir, afin qu’il ne décide pas, finalement, qu’il me détestait.

- Tu savais et tu ne m’as rien dit ? Finit-il par dire et le dédain contenu dans ses yeux m’atteignit comme un millier de poignards en plein cœur.

- Je ne voulais pas que tu te retournes contre Thomas et je voulais que tu m’en parles en premier, quand tu l’aurais décidé. Répondis-je en m’effondrant à genoux devant lui, le visage ruisselant de larmes entre mes deux mains.

- Thomas ! Rugit mon compagnon, qui ne l’était peut-être plus à ce moment. Il n’aurait pas dû, il n’avait pas le droit, il…Mais Michael s’arrêta une fois de plus. Il est là ! S’exclama-t-il soudain après une petite pause.

Je relevai la tête, surprise de son changement de ton.

- Quoi ? Le questionnai-je.

- Je le sens, il est là, dans la maison, c’est faible mais je le sens. Répondit-il alors que le bleu envahissait ses pupilles et qu’un grondement s’échappait de sa poitrine. Il partit en trombe, sortant précipitamment de la pièce, à la recherche de Thomas.

- Lucy, suis-le ! Me somma Nathan. Vite ! Il va le tuer si tu ne l’arrêtes pas ! Et il s’en voudra toute sa vie.

Je me relevai rapidement et partis en courant sur les traces de mon loup enragé.

- La colère l’aveugle Lucy ! Tu dois le calmer, et tu dois lui dire ! Il est temps ! Tu dois lui dire, il en a besoin. Entendis-je mon ami crier avant de sortir de la pièce.

Je devais lui dire ! D’accord ! Mais je devais-lui dire quoi ? Me demandai-je pendant tout le temps que je suivais Michael à travers le dédale des couloirs de sa foutue baraque. Et comment allais-je m’y prendre pour le calmer ? Il n’allait surement pas m’écouter maintenant qu’il me détestait. Et il me détestait, je n’en doutais pas, et je n’avais pas besoin de m’arrêter sur le sentiment de haine pure au fond de moi, et qui appartenait à Michael, pour en avoir la certitude. Je le savais parce qu’il était ce genre d’homme, incapable de perdre le contrôle de la situation, incapable de montrer ses faiblesses, fort en toutes circonstances. Il n’avait cessé de vouloir me démontrer sa puissance depuis que nous étions ensemble et je venais de lui dire que j’étais au courant de ce qu’il considérait comme sa plus grande faiblesse. J’étais une idiote, j’étais la plus grosse idiote que la terre n’avait jamais portée et je venais de détruire mon couple, la plus belle histoire de ma vie, en une fraction de seconde.

Michael s’arrêta finalement devant la porte d’un petit cagibi, situé au fond de l’immense garage. Je le rejoignis en courant, espérant arriver à son niveau avant qu’il n’ouvre la porte. Mais au lieu de l’ouvrir, il l’arracha littéralement, l’envoyant valdinguer derrière lui, je me baissai juste à temps pour l’éviter et la voir atterrir sur le Hummer, fracassant compétemment le pare-brise.

Je ne voyais pas ce qu’il y avait dans le cagibi, la silhouette de l’alpha m’en empêchant mais je le vis parfaitement se pencher et soulever quelque chose à bout de bras. Lorsque j’arrivai enfin à sa hauteur, je reconnus, entre les mains de Michael, le corps sanguinolent et sans connaissance de Thomas, pendant dans le vide alors qu’il avait enserré ses mains autour de son cou. Sans réfléchir aux conséquences que cet acte pourrait avoir sur ma vie, ou plutôt sur ma mort, je m’agrippai une fois de plus aux poignets de Michael. Tentative dérisoire de le faire lâcher, s’il en était, je ne pouvais pourtant pas penser à une autre manière d’agir.

- Arrête ! Hurlai-je. Arrête ! C’est ton ami ! Michael, c’est Thomas ! Ne fais pas ça je t’en supplie ! Michael ! Michael ! Par pitié, arrête !

Le lycan furieux finit par tourner les yeux vers moi, peut-être finalement attiré par mes supplications. Nous nous regardâmes pendant ce qui sembla durer des heures.

- Ne me regarde pas Lucy ! Ne me regarde pas pendant que je tue ce traître ! M’asséna-t-il finalement.

- Ce n’est pas un traitre, et tu n’es pas un tueur ! Pas comme ça ! M’écriai-je. Si tu dois en vouloir à quelqu’un c’est à moi et à moi seule, je suis la seule personne vraiment détestable ici ! Je suis la seule à t’avoir menti en prétendant ne rien savoir ! Alors si tu dois tuer quelqu’un tue-moi moi, pas lui !

Je hurlais, m’époumonais, pleurais, tout ça en même temps. Je voulais qu’il lâche Thomas et je voulais me trouver à sa place, les mains de mon loup sur mon cou, si je devais mourir de ses mains pour lui avoir menti alors j’étais d’accord, je le méritais, j’étais répugnante, tellement répugnante !

C’est à ce moment que je compris quelque chose qui me fit me stopper net. Je n’étais pas répugnante, et ces sentiments… ils n’étaient pas les miens !

Je lâchai les poignets de Michael et me jetai à son cou, entourant mes deux bras autour de sa tête, les pieds dans le vide, et je le serrai fort, très fort, jusqu’à ce que mes bras me fassent mal.

- Tu n’es pas répugnant mon cœur, jamais ! Jamais tu ne le seras ! Lui murmurai-je en pleurant pour lui, versant les larmes qu’il n’avait jamais pu verser.

Il libéra immédiatement sa prise sur Thomas qui retomba sans ménagement sur le sol, avec un bruit sourd.

Je pouvais vraiment le sentir maintenant, il ne me détestait pas, non, pas moi, mais lui. Il se haïssait avec tant de force que je n’avais pas pu discerner contre qui cette haine était tournée. Et mon désir de mourir de ses mains n’était en réalité que son propre désir de se supprimer pour échapper à son dégout de lui-même.

Les mains meurtrières de mon compagnon, se firent douces pour me serrer contre lui, et alors qu’il se laissa tomber à genoux par terre, m’enjoignant implicitement de le suivre, je sentis quelque chose que je n’aurais jamais cru sentir sur Michael. De faibles soubresauts agitèrent son dos, et alors qu’il posait son front contre mon cou, des larmes chaudes dégringolèrent sur ma peau, jusqu’entre mes seins et… ce n’était pas les miennes.

Michael pleurait, il pleurait pour la première fois depuis ce qui lui était arrivé avec le Maître, j’en avais la certitude.

- Ne m’en veux pas. Gémit-il entre mes bras, sa voix étouffée contre ma peau. Ne m’en veux pas je t’en supplie. Je ne le supporterai pas, plutôt mourir.

- Michael… haletai-je sous l’émotion. Jamais je ne t’en voudrai. Mon amour tu es un héros ! Tu voulais les protéger je le sais très bien.

- Ce qu’il… ce qu’il m’a fait faire… comment pourrais-tu encore tomber amoureuse de moi après ça ? Sanglota-t-il contre mon cou.

Je souris pour moi-même, il ne pouvait pas me voir mais je souris néanmoins, parce que je venais enfin de comprendre quelque chose qu’il avait pourtant essayé de me faire réaliser depuis le début.

- Parce que c’est trop tard. Lui répondis-je seulement.

- Quoi ? me demanda-t-il faiblement en se reculant un peu, plongeant ses yeux couleur d’émeraude dans les miens.

Je pris le temps de poser ma main sur sa joue maculée de larmes tandis que je lui souriais doucement.

- Pose-moi à nouveau la question. Lui demandai-je.

- Quelle question ?

- Celle que tu ne cesses de me poser et à laquelle je ne donne jamais la bonne réponse. Lui dis-je, toujours en souriant.

Les yeux de Michael se braquèrent sur les miens plus intensément encore. Je savais qu’il venait de comprendre de quoi je lui parlais.

- Quand… Quand tu me regardes… Qu’est-ce que tu vois ? Finit-il par me demander avec hésitation.

Je pris le temps de rassembler mes émotions, cessant de les repousser, mais tentant au contraire de m’en imprégner, de sorte que mon loup ressente ce que je m’apprêtais à lui dire au travers de notre lien.

- Je vois un homme fort, d’une générosité incroyable. Je vois un homme prêt à tout pour protéger les siens. Je vois un héros. Je vois mon avenir mais surtout, surtout… Je vois l’homme que j’aime. Lui révélai-je finalement et c’était facile, tellement facile que je ne comprenais pas comment j’avais pu ne pas m’en rendre compte avant. J’étais folle amoureuse de lui, c’était évident, je n’avais plus aucun doute.

Michael s’assit sur ses talons et ses épaules s’affaissèrent. La tension qui avait animée son corps une seconde auparavant semblait s’être évanouie. Il laissa retomber sa tête en avant et les mèches noires de ses longs cheveux retombèrent devant son visage, m’empêchant de voir l’expression qu’il affichait. Lorsque deux minutes furent passées, sans qu’aucun mot ne dépasse ses lèvres, une angoisse sourde commença à me vriller l’estomac. Mais alors que j’allais lui demander les raisons de son silence, un faible murmure m’en empêcha.

- Encore !

- Quoi ? Demandai-je, pas certaine de l’avoir bien entendu.

Il releva la tête et son regard vert émeraude sembla percer au plus profond de mon âme.

- Dis-le-moi encore !

J’écarquillais les yeux, surprise de son expression dure.

- Michael… tu… tu as compris ce que je t’ai dit ?

- Dis le moi encore ! S’écria-t-il en me saisissant les bras.

- Je… je t’aime.

- Encore !

- Je t’aime.

- Encore. Hurla-t-il.

- Je t’aime. Hurlai-je moi aussi, inquiète que ces mots ne parviennent pas jusqu’à son cerveau embrumé ?

Il se jeta sur moi comme la misère sur le monde. Inexorablement et aussi rapidement que le vent, je ne compris rien avant d’être étendue sur le dos, une main derrière ma tête pour ne pas que je me blesse au moment du contact avec le sol. Ses lèvres implacables se verrouillèrent aux miennes et sa langue s’infiltra dans ma bouche avec dextérité. Sa respiration se faisait haletante, sa main qui tenait ma tête, s’agrippa à mes cheveux et m’attira encore plus proche de lui, m’écrasant contre sa bouche comme s’il souhaitait me fondre en lui. Son baiser n’était pas doux, il n’était pas tendre, il était violent, passionné et douloureux. Mais en cet instant, ravagée par la terreur qui m’avait tenaillée toute la soirée, la douleur d’avoir perdu nos amis et l’amour que nous ressentions tous les deux, je ne voulais pas qu’il en soit autrement.

Je m’agrippai à ses épaules fermes, cambrant mon corps sous lui pour le sentir plus encore, collant autant que possible, mon abdomen au sien, avide de le toucher. Plus rien ne comptait que son corps au-dessus de moi, ondulant dans un simulacre de ce que nous avions tant attendu et souhaité tous les deux. Sa main libre se posa sur mes fesses, d’abord pour me plaquer fortement contre lui et contre sa fermeté turgescente, puis sa main se saisit de la ceinture de mon jean et je sentis une pression s’exercer dessus. Mon dieu, il allait m’arracher mon jean et me prendre, comme ça, sur le sol de son garage, et je n’allais absolument rien faire pour l’en empêcher. Ses lèvres toujours plaquées sur les miennes, sa langue toujours dans ma bouche, sa main toujours dans mes cheveux, il fit craquer les coutures du pantalon et les boutons à ma ceinture. Un grognement provenant du fond de sa poitrine nous fit trembler tous les deux, j’en ressentais les vibrations tout au fond de moi et cette sauvagerie bestiale me plaisait. J’en voulais plus, je le voulais lui tout au fond de moi, plus profondément que tout ce que j’avais jamais ressenti jusqu’alors, et je le voulais tout de suite.

- Oh seigneur…

Le petit cri féminin me tira de mon abandon total et je basculai la tête en arrière pour voir ce qui se passait.

Nathan et Marli se tenait dans l’encadrement de la porte, Marli, une main sur la bouche, et Nathan les bras croisés sur la poitrine, appuyé contre le chambranle, un petit sourire aux lèvres.

- Bien joué ! Dit-il en me regardant d’un air satisfait. Je me demandais comment tu allais t’y prendre pour l’empêcher de tuer son ami, mais je vois que tu t’en es sortie comme un chef.

Michael releva la tête lui aussi, regarda Nathan, ramena ses yeux sur moi, en dessous de lui, arrondissant les yeux comme s’il prenait vraiment conscience de ma présence pour la première fois, puis tourna la tête à droite.

Il suffit d’un seul mot de sa part, et ce qui venait de se passer se brisa en morceau, aussi surement qu’un verre projeté contre un mur.

- Thomas !

 

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6 mai 2012 7 06 /05 /mai /2012 20:35

Nous nous étions attendus au pire en entendant le cri de Van, et en accourant à l’arrière de la maison. Michael m’avait fait basculer sur son dos avant de se transformer et de se précipiter à l’endroit d’où le cri avait retenti. Je m’étais agrippée tant bien que mal, mais avec le peu de force qu’il me restait, chevaucher un énorme loup d’un mètre cinquante au garrot ne s’était pas révélé des plus facile et je manquai de peu de basculer vers l’avant quand il stoppa net sa course effrénée.

Le spectacle qui nous attendait alors était des plus effrayant.

La première chose que je cherchai du regard en arrivant, était Van. J’avais tellement prié pour qu’il ne lui soit rien arrivé que je le trouvais immédiatement. Affalé contre un mur, il se tenait le bras droit, celui-ci pendant mollement au bout de son épaule. Il devait être cassé, du moins de ce que je pouvais en juger à plusieurs mètres de lui. Nom de dieu, ce mec avait une propension aux blessures absolument hallucinante. Par la force des choses, j’allais bientôt connaitre son corps par cœur, et de l’intérieur qui plus est. Après avoir fait l’inventaire de ses blessures éventuelles, je décidais que ça aurait pu être bien pire et choisissais de me concentrer sur quelque chose d’autre, quelque chose qui m’avait marqué mais sur lequel j’avais préféré ne pas m’attarder alors que je vérifiais l’état de santé de mon ami… Son regard.

Ses yeux étaient captivés, et l’angoisse les hantait. Quel que soit ce qui le paniquait tant, ce devait être terrifiant pour donner à Van ce regard-là. Peu importait, mon ami passait avant tout. Je décidai donc de me diriger vers lui pour le soigner, sans tenir compte de l’état de fatigue dans lequel je me trouvais déjà. Mais le corps puissant de mon compagnon de loup s’interposa, me bloquant le chemin.

C’est à ce moment que je me rendis compte que ma capacité à compartimenter mes priorités pouvait parfois se révéler dangereuse. Sans m’en apercevoir, mon désir de protéger Van avait été tel que j’avais occulté tout le reste, et pourtant, je me demande comment j’avais pu ne pas y prêter la moindre attention.

A quelques mètres de nous, un énorme loup doré, au pelage singulièrement long et brillant, venait de coincer le dernier vampire contre un mur. Celui-ci se retrouvait le visage plaqué contre le crépit, par une patte démesurée, lui pesant directement sur la nuque. Je poussai un incontrôlable cri de surprise mêlée d’effroi en découvrant la situation, et le loup tourna brièvement son incroyable regard orangé oui, j’ai bien dis orangé dans ma direction, avant de le refixer à peine une seconde plus tard sur la nuque du vampire.

Qui que soit ce loup, je ne l’avais jamais vu sous sa forme lupine. Il était magnifique et effrayant à la fois, un superbe mélange de beauté bestiale, et sa taille dépassait de loin celle de tous les autres lycans que j’avais pu voir.

Le vampire se débattait autant qu’il le pouvait, envoyant ses bras et ses jambes dans tous les sens, tentant de repousser le loup qui le maintenait fermement coincé sous son poids. Dans sa position le vampire ne pouvait atteindre son assaillant qui ne semblait d’ailleurs, montrer aucun signe de fatigue ou de difficultés à retenir la sangsue dans cette position si inconfortable soit-elle.

- Merde ! Qu’est-ce qui se passe ici ? Me fit sursauter Nathan qui venait d’arriver derrière moi, soutenu par Marli qui ne me semblait pourtant pas dans un meilleur état.

- J’en sais rien, on vient d’arriver et ce loup a coincé le dernier vampire mais je ne sais pas ce qu’il attend. Expliquai-je rapidement aux nouveaux arrivants.

Et en y regardant de plus près, quelque chose me semblait étrange. Qu’attendait le loup pour attaquer ? Il se contentait de le retenir alors qu’un coup de mâchoire aurait suffi à abréger la non-vie du vampire. Mais le lycan blond, à l’attitude pourtant clairement agressive, ne montrait aucun signe de vouloir en finir.

Michael gémit faiblement à mes côtés, tandis que Nathan inspira profondément au même moment.

- Non de dieu ! jura-t-il. C’est Julian ! Mais qu’est-ce qui s’est passé ?

Quoi ? Ce loup magnifique et agressif, plus grand que tous ceux que je connaissais, aux prises avec un vampire enragé, était Julian, le jeune, calme et timide Julian ?

J’avais du mal à le croire même si en y regardant de plus près, les yeux affolés de Van, m’indiquait que ce qu’avait dit Nathan était la vérité.

Bon dans un sens c’était assez rassurant, je pouvais donc aller soigner Van sans prendre trop risque.

- Ok, si c’est Julian alors je peux traverser sans risques non ? Formulai-je à voix haute ce que je venais de penser.

Une douce brise chaude et parfumée de l’odeur du sous-bois s’éleva à côté de moi et l’instant d’après, Michael se tenait debout sur ses deux jambes, sous sa forme humaine.

- Non, tu ne bouges surtout pas. M’avertit-il immédiatement. Pour l’instant, il est troublé par son nouveau corps et enragé contre ce vampire mais ses émotions pourraient rapidement se retourner contre n’importe qui. Elles sont puissantes, et je doute qu’il parvienne déjà à les contrôler.

- Mais il ne tue pas le vampire, c’est bien la preuve qu’il se contrôle non ? Hasardai-je, tentant de me raccrocher à la personnalité du Julian que je connaissais.

-Non, c’est juste la preuve qu’il ne sait pas comment tuer un vampire et qu’il est hésitant sur la conduite à tenir. Rétorqua Michael.

- Van a sans doute été blessé pendant son combat contre cette sangsue et Julian s’est interposé. Ajouta Nathan. C’est une chance qu’il n’ait pas blessé le vampire.

- Comment ça ? L’interrogeai-je.

- Eh bien… Michael va devoir le calmer, et affirmer son statut d’alpha, ce qui ne va déjà pas être simple avec Julian, mais si en plus il avait goûté au sang lors de sa première transformation, il serait devenu totalement incontrôlable et… nous aurions dû…

Nathan ne finit pas sa phrase mais j’imaginais assez bien le contenu de ce qu’il gardait sous silence, je savais comment les loups garous réglaient ce genre de problèmes.

- Pourquoi dis-tu que ce ne sera pas simple avec Julian ? Me concentrai-je sur ce qu’il venait de m’expliquer.

Mais c’est Michael qui me répondit.

- Tu te souviens de ce que je t’ai expliquée sur les premières transformations et le sentiment qu’il est nécessaire de trouver ? Me demanda-t-il.

- Oui.

- Julian s’est transformé pour protéger Van. Se contenta-t-il d’ajouter.

Je restais un peu perplexe quant au message que tentait de me faire passer mon compagnon quand soudain, le souvenir de notre conversation me revint en mémoire.

- Son sentiment… C’est le besoin de protéger ? Mais alors Julian est… un alpha ! M’écriai-je.

Les trois loups à mes côtés acquiescèrent d’un même mouvement.

- Je vais devoir y aller et ça ne va pas être simple. M’annonça Michael. Je vais utiliser l’autorité de l’alpha et tu risques de le ressentir, mais ne t’en fais pas, c’est normal. Il va aussi falloir que je le fasse se soumettre sans pour autant lâcher le vampire.

- Pourquoi ne le ferais-tu pas le tuer directement, ce serait plus facile non ?

- Hum… sans doute, mais… j’ai quelques questions à poser à cette sangsue. Me répondit-il avant de grogner légèrement.

Puis m’attirant à lui, il me déposa un baiser dans les cheveux avant de faire mine de s’élancer en direction de Julian. Pourtant une angoisse sourde m’interdisait de le laisser partir comme ça. Je retins son bras au moment où il allait me lâcher, le forçant à s’arrêter et à me regarder.

- Ca… Ça va aller n’est-ce pas ? Ce n’est pas trop dangereux ? M’inquiétai-je.

Michael prit le temps de me sourire avant de me répondre.

- Bien sûr que ça va aller, je suis fort, tu te souviens ? me dit-il en dégageant doucement son bras de ma main.

- Mais… et s’il était plus dominant que toi ? Paniquai-je soudain.

Mon compagnon s’esclaffa alors ouvertement.

- Personne n’est plus dominant que moi, amour ! Me dit-il avec un clin d’œil et en s’élançant véritablement cette fois-ci, à l’assaut de la montagne de muscles que représentait Julian.

Michael s’arrêta à deux ou trois mètres seulement du loup doré, ce qui me paraissait nettement trop proche. Il était nu comme un ver, mais n’en paraissait pas le moins du monde diminué. Sa posture était celle d’un guerrier, les deux pieds bien encrés au sol, le torse légèrement en avant et les épaules fermes et contractées.

- Et maintenant, qu’est-ce qui va se passer ? Chuchotai-je à Nathan.

- Il va s’adresser au loup avec la voix de l’alpha, et lui demander de se soumettre à lui. Me répondit-il d’une voix plus faible que précédemment. Marli aussi semblait avoir plus de mal qu’avant à soutenir le poids de son époux.

- Hé, vous deux, ça va ? M’inquiétai-je soudain.

- Oui, oui, chérie ça va ne t’en fait pas, c’est normal. M’expliqua Marli. Le… le pouvoir que doit utiliser Michael lui vient de la meute aussi il doit en puiser en chacun d’entre nous, mais avec nos blessures c’est juste un peu plus éprouvant pour nous.

- Mais vous êtes sûrs que vous ne voulez pas…

- Non, je vais bien ! Me coupa Nathan en se redressant tant bien que mal. Je suis à ma place ici, avec mon alpha. Et je le soutiendrai de mon mieux, comme je l’ai toujours fait.

Ses yeux montraient une telle détermination que je n’osai pas le contredire et décidai de reporter mon attention sur mon compagnon, en remerciant intérieurement, Nathan pour sa loyauté sans faille.

Au début, tout sembla calme, du moins aussi calme qu’était la scène avant l’arrivée de Michael, mais venant de nulle part, une brise entreprit de caresser le corps dénudé de mon loup, ballottant ses longs cheveux noirs de part et d’autre de son visage.

Le bleu saphir envahit ses yeux en une fraction de seconde quand la brise se transforma en bourrasque, se concentrant uniquement sur Michael.

Je sentais le pouvoir affluer en lui à travers notre lien. Il arrivait de toutes parts, des quatre points cardinaux, comme du ciel et de la terre. C’était impressionnant et effrayant à la fois, un alpha dans toute sa splendeur. Plissant légèrement les yeux dans un sourire en coin, il tourna juste assez sa tête vers moi pour que je capte sa satisfaction de me montrer ce dont il était capable. Mon compagnon était fort et puissant et il me laissait le constater à ma guise de sorte que mon inquiétude me paraisse dérisoire. Une façon de me rassurer, une façon qui lui ressemblait.

Sentant lui aussi le pouvoir de la meute, Julian se retourna et fixa l’alpha dans les yeux, un long moment. Le contact visuel ne s’interrompit pas et je sentais la détermination de Michael à le faire plier à sa volonté. Soudain, les yeux de mon compagnon se zébrèrent de bleu plus pâle, presque blanc, et c’était comme si des milliers de petits éclairs se mettaient à fendre le ciel nocturne. Julian, baissa les yeux à cet instant, et je poussai un soupir de soulagement intense.

- Ce n’est pas fini Lucy. Intervint Nathan. Julian reconnait que Michael est plus alpha que lui mais il ne l’a pas encore accepté comme SON alpha. M’expliqua-t-il en insistant sur le mot « son ».

Je retenais une fois de plus ma respiration, dans l’attente de l’affrontement à venir.

- Julian. Déclara Michael, et mes oreilles se mirent à bourdonner devant la voix si profonde du dominant, qui semblait composée de plusieurs voix grave à la fois, comme construite dans un écho. Obéis-moi. Je suis ton alpha.

Le loup doré secoua la tête, comme pour montrer sa résistance à l’injonction que venait de lui donner un mâle plus puissant que lui.

- A présent, tu vas m’écouter et t’abandonner à ma voix. Continua mon loup.

Julian grognait, manifestant son mécontentement. Il était de plus en plus agité et le vampire en profita pour essayer de s’échapper, mais dans son excitation, son gardien ne l’entendit pas de cette oreille et l’envoya se fracasser contre le mur le plus proche, le faisant retomber comme un tas désarticulé au sol.

- Bon, ça va faciliter les choses. Commenta Marli. A présent que le vampire est hors d’état de nuire, Michael va pouvoir se concentrer uniquement sur Julian.

Je me fis la remarque que j’étais pourtant persuadée que c’était déjà le cas. Mais le vampire assommé allait en effet permettre à mon compagnon d’assoir sa supériorité sans risquer de dommages collatéraux.

- Loup ! Reprit l’alpha de sa voix étrange. A présent, soumets-toi à moi.

Aussitôt une envie irrépressible de m’assoir et de me faire toute petite devant l’alpha de la meute, me saisit et je la réprimai avec la plus grande difficulté. Ce ne fut pas le cas de Marli et Nathan qui s’assirent par terre sans attendre, se faisant incontestablement plus petit que leur dominant. Même Van, pourtant déjà assis et malgré sa blessure au bras, se tassa un peu plus sur lui-même.

Bon sang, le pouvoir de l’alpha était quelque chose d’incroyable !

Et pour cause, l’échine de Julian commençait déjà à plier, avec réticence certes, mais elle pliait incontestablement, ses postérieures se courbèrent ensuite et la minute d’après le loup doré s’était assis, la tête baissée en signe de soumission, les oreilles rabattues, lui donnant un air malheureux. Michael avait réussi, il avait fait plier Julian à sa volonté, il était devenu son alpha, s’assurant sa loyauté. Je me tournai immédiatement vers Nathan, qui était toujours assis à même le sol, lui souriant fièrement, bien que je ne sois pas celle qui avait fait le boulot.

- Et maintenant ? C’est bon n’est-ce pas ? Demandai-je avec impatience.

- Eh bien… oui, pour l’instant, il risque d’être encore un peu instable mais je pense que ça devrait aller. Me répondit mon ami. Il n’en faudra pas beaucoup pl… Mais les mots de Nathan s’étranglèrent dans sa gorge lorsqu’il se tourna violemment vers Michael, bondissant sur ses pieds, d’un seul mouvement, tous les sens en alerte.

Je me retournai pour vérifier ce qui le troublait alors.

Le vampire venait de se relever et ne semblait souffrir d’aucune blessure dut à sa rencontre précipitée avec le mur de béton. Il fonça alors… sur moi. Non pas sur l’un des loups qu’il avait attaqué auparavant mais sur moi, je le sus à l’instant où je rencontrai son regard. Un tel désir de mort était-il possible ? Ses yeux semblaient me dire que oui. Sauf que perdu dans son besoin de me tuer, le vampire ne réalisa pas qu’un obstacle de taille se tenait sur son chemin entre lui et moi, mon compagnon, l’alpha, le loup le plus puissant qui existait.

Je crus d’abord que Michael ne l’avait pas senti arriver, lui tournant le dos mais au moment où il passait à sa portée, l’alpha, dans un mouvement souple, pivota sur lui-même et envoya sa jambe en l’air, assénant un coup de pied brutal dans l’estomac du vampire, si tant est que ces créatures aient un estomac.

- On ne touche pas à ma femme. Hurla Michael de sa voix d’alpha à la sangsue, alors qu’il se jetait sur lui avec la rapidité d’un aigle plongeant sur sa proie.

- Bordel de merde… Jura Nathan à quelques centimètres de moi, ce qui attira mon attention sur une autre partie de l’action qui m’avait échappée jusque-là.

Julian, libéré de l’emprise dominatrice de l’alpha, et incontestablement, encore instable, regardait le combat se dérouler sous ses yeux furieux. Son regard orangé, devenu presque rouge sang, suivait les mouvements de mon compagnon avec une rage non dissimulée. Visiblement il n’avait pas apprécié cette petite séance de domination forcée, et il avait l’intention de le faire payer à son alpha. Mouais, instable… pas de doute.

Deux courants d’air fusèrent de chaque côté de mes oreilles et je vis les silhouettes brouillée par la vitesse, de Nathan et Marli, fondre sur Julian. Aucun des deux ne s’était transformé mais j’ignorais si c’était dû à leurs blessures ou au type de combat qu’ils comptaient mener. En effet, loin de vouloir blesser le loup, ils tentaient simplement de le retenir. Seulement, Julian ne semblait pas l’entendre de cette oreille et essayait de se débarrasser de ses agresseurs à coup de griffes et de crocs. Heureusement, le couple étaient plus léger et donc plus rapide que le grand lycan, et qui plus est, formait une parfaite équipe, mais pour combien de temps encore ?

De son côté, Michael se démenait comme un beau diable, rendant coup pour coup, évitant les griffes d’argent meurtrières mais ne parvenant pas à toucher le point sensible du vampire.

Deux combats insoutenables se déroulaient sous mes yeux et je ne pouvais rien faire. C’était une véritable torture, je voulais aider mon compagnon, je voulais aider mes amis mais je ne pouvais utiliser mon pouvoir, d’abord parce que je n’étais pas certaine d’y parvenir étant donné mon état d’épuisement intense, mais aussi parce que je risquais de toucher par mégarde l’un des êtres qui comptaient le plus au monde pour moi. Que devais-je faire ? Un sentiment d’impuissance intense s’empara de moi. Je me sentais seule, terriblement seule, seule comme je ne l’avais plus été depuis mon arrivée dans la meute, et je haïssais ce sentiment. Mes jambes cessèrent de me porter et je m’accroupissais, me prenant la tête entre les mains, incapable de supporter plus longtemps cette sensation atroce.

Soudain, une voix d’une douceur et d’une pureté incroyable, une voix que je connaissais mais que je ne parvenais pas à attribuer à quiconque, murmura une petite litanie dans ma tête.

- Tu n’es pas seule ma chérie, tu n’es pas seule.

Et je l’entendais, encore et encore, emplissant petit à petit tout mon champ de pensée, m’incitant à me reprendre, à y voir plus clair.

- Si tu n’es pas assez forte, n’oublie pas mon ange, tu n’es pas seule, tu n’es pas seule.

Non en effet, je n’étais pas seule, je ne l’étais plus ! Et c’est à ce moment précis que Julian réussit à s’échapper de l’emprise de Nathan et Marli, bondissant furieusement en direction de Michael, toujours aux prises avec son vampire. Mais je n’étais pas seule et naturellement j’appelais à l’aide la seule personne qui pouvait encore m’aider, celle qui m’aiderait toujours, mon loup, mon ami, mon frère.

- Vaaaan !

Le cherchant du regard, à la place qu’il avait tenu depuis le début de l’action, je m’aperçus vite, qu’il n’y était plus. Je reportai donc mon regard sur Michael, qui trop occupé par la sangsue allait se prendre le lycan devenu fou, de plein fouet.

Dieu du ciel, non pas ça !

Mais le pire ne se produisit pas et c’est avec surprise qu’au lieu de mon alpha je regardai Van, se tenant bien droit sur ses pieds, à quelques centimètres à peine du combat qui se déroulait dans son dos, son seul bras encore valide, tendu à l’horizontale, formant un bouclier de son propre corps à son alpha.

Il n’avait pas pu arriver si vite, aussi rapide soit-il. Ce qui signifiait donc qu’il avait bougé avant que je l’appelle. J’ignorais à qui appartenait la petite voix que j’avais entendue dans ma tête mais elle avait raison, je n’étais définitivement pas seule.

Le lycan doré se stoppa net à quelques centimètres de Van, la truffe au niveau du visage de mon ami, un coup de mâchoire et s’en était fini de lui.

C’est ce moment que choisit Michael pour asséner un coup d’une brutalité ahurissante sur le crâne du vampire, le faisant s’écrouler par terre, inconscient.

Sans relâcher sa vigilance il se tourna vivement vers Van et Julian, surpris de les trouver si près de lui. Les éclairs bleutés zébrèrent immédiatement ses pupilles couleur de nuit, et ce fut comme si tout l’air était aspiré par lui alors qu’il semblait prêt à déchaîner sa colère sur la pauvre bête qui me sembla soudain dans la pire des postures possibles.

- Non attends, ne fais rien. Hurlai-je à mon compagnon, sans savoir comment les mots étaient sortis de ma bouche.

L’air retrouva sa place autour de nous tandis que les yeux de Michael reprenaient immédiatement la teinte normale de ceux du loup. Il tourna son regard glacial dans ma direction, se réchauffant instantanément lorsqu’il se posa sur moi. Et ce que j’y vis ne fut pas de la surprise ou de l’incompréhension, mais une confiance sans borne et sans faille. Mon compagnon avait foi en mon jugement et je me sentis aussitôt submergée par tout un tas d’émotions que je ne parvenais pas encore à reconnaitre.

Je lui souris et fit non de la tête pour lui dire de ne pas intervenir.

Julian, le Julian que je connaissais, étais là, quelque part, sous la surface, sous ses couches de férocité bestiale, et de rage, et il aimait Van, je le savais… et j’étais persuadée que Van aussi le savait, quoi qu’il puisse en dire.

Le loup et l’homme s’affrontait du regard, mais ce n’était pas un affrontement de dominance. Le regard de mon ami, bien que fatigué semblait percer l’âme du lycan, cherchant, traquant la moindre parcelle du jeune loup qu’il avait rencontré et aidé plus tôt, du jeune loup qui avait annoncé sans détour l’aimer et être sûr de ses sentiments. Julian ne bougeait pas, pas plus que Van, ni aucun d’entre nous d’ailleurs, même les animaux nocturnes semblaient avoir stoppé leurs activités, laissant le temps aux deux lycans de se chercher… et finalement de se trouver.

Au bout de plusieurs minutes d’immobilité qui me parurent être des heures, Van pencha légèrement la tête sur le côté, plissa les yeux et sourit en coin au loup doré en face de lui.

- Tu étais loin mais je t’ai trouvé. Lui dit-il en lui souriant plus franchement cette fois.

Julian cligna plusieurs fois des yeux et une énorme larme roula sur le pelage de son museau. Il enfouit son imposante tête dans le cou de Van, qui la tête toujours penchée, l’y accueillit volontiers. Les pattes du lycan semblèrent le lâcher et mes amis s’affalèrent sous le poids du plus lourd des deux.

Michael me rejoignit immédiatement, me serrant dans ses bras si fort que je crus étouffer et m’embrassa la minute d’après, sans me laisser le temps de reprendre mon souffle.

- Comment tu as su qu’il fallait m’écouter ? Lui demandai-je à l’instant où je pus enfin inspirer une profonde bouffée d’oxygène.

- J’ai toujours su que tu étais mon meilleur pari amour, toujours ! Me répondit-il seulement.

Je lui souris en embrassant doucement ses lèvres.

- Et toi le mien. Me contentai-je de dire.

Puis me tournant vers Van et Julian, le premier assis par terre, caressant la tête du deuxième, posée sur ses genoux, je posai la seule question qui était sur toutes les lèvres.

- Et maintenant ?

 

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6 mai 2012 7 06 /05 /mai /2012 20:33

Ça devait être une erreur ! Oui sans aucun doute, une terrible erreur. Marli ne pouvait pas être blessée aussi gravement. Elle… elle était une louve, elle était forte, sans doute la femme la plus incroyablement forte que je connaissais.

- Amour, allez, tu vas devoir te reprendre, je suis désolé mais on n’a pas de temps à perdre. Me secoua un peu Michael.

Sauf que c’était plus facile à dire qu’à faire, surtout, alors que tout ce dont j’étais capable en cet instant, et ce depuis deux bonnes minutes déjà, c’était de vider le contenu de mon estomac dans le fossé au bord de la route.

A l’instant où mon esprit avait assimilé l’idée que le loup grièvement blessé, étendu sur le flanc, dans l’herbe, était Marli, ma Marli, ma meilleure amie, mon estomac s’était contracté, rejetant la nourriture que j’avais ingurgitée, comme mon esprit rejetait à présent l’horrible vérité.

Nom de dieu, comment tout ça avait bien pu arriver ? Pas Marli, c’était complètement inconcevable. Elle était capable de se défendre, je le savais pertinemment, et de toute façon Nathan l’aurait défendu, quitte à y laisser la vie. Soudain, cette réalisation, stoppa les convulsions de mon ventre. Mon dieu, si Marli était blessée, si elle s’était enfuie en laissant Nathan derrière, alors ça voulait dire que…

Je me redressai précipitamment, envoyant valser la main chaude de Michael qui me caressait gentiment le dos pour m’aider à faire passer plus rapidement ma nausée.

- Michael… si Marli est… Nathan… Fut tout ce que je parvenais à articuler.

Mon compagnon afficha un masque sans expression sur son visage.

- Je sais. Se contenta-t-il de dire, mais le léger tremblement dans sa voix m’apprit qu’il était tout aussi inquiet que moi.

- Michael, il faut que je guérisse Marli. Je… je ne sais pas si je vais pouvoir la soigner, mais je dois essayer. Seulement ça va prendre du temps. L’informai-je en finissant de retrouver mon sang-froid.

- Ca va aller, j’ai confiance en mes loups, je suis sûr qu’ils pourront faire face encore…

- Non ! L’interrompis-je sans prendre de gants. Nous ne sommes qu’à quelques kilomètres de la maison. Toi, tu te transformes et tu les rejoins le plus vite possible. Pendant ce temps je soigne Marli et on vous rejoint avec la voiture dès que c’est fait.

- Quoi ? Tu es folle, je ne te laisse pas seule ici. S’écria-t-il. Nous sommes à un saut de puce de la maison pour des vampires, ils pourraient t’encercler en une seconde. Je reste et je vous protège, et ensuite on ira ensemble là-bas.

- Bon sang, écoute-moi pour une fois toi aussi ! On n’a pas le temps d’attendre ! Je t’en prie Michael. Lui dis-je en larme. J’ai besoin de savoir que tu vas les sauver, je sais que toi tu peux le faire. Ce… ce sont mes amis à moi aussi, ma famille… et je ne veux pas les perdre. Je t’en prie.

Je voyais bien que Michael était tiraillé entre le besoin de me protéger et celui de protéger sa meute. C’était l’un des choix qu’il ne pouvait pas faire alors je devais le faire pour lui.

- Tu y vas et tu les sauves, c’est bien comprit. Lui dis-je en agrippant le col de sa chemise et en utilisant toutes les forces disponibles en moi pour faire appel à la voix de l’alpha. Maintenant !

Les yeux de mon compagnon s’écarquillèrent de surprise, et l’instant d’après il me serrait dans ses bras.

- Je t’aime encore plus quand tu me donnes des ordres.

Une seconde plus tard, il avait disparu, ne m’indiquant la direction qu’il avait pris, que pas le bruit de ses vêtements se déchirant sous l’effet de sa transformation.

Et je me retrouvai alors complétement seule, dans le noir, et le silence à peine interrompu par le bruit des petits animaux nocturnes et la respiration difficile de Marli.

Allez, ce n’était pas le moment de me laisser aller, je devais me reprendre et faire ce pourquoi j’étais si douée.

M’approchant doucement du corps étendu, je me mis à genoux à côté de mon amie.

- Marli, ma belle, ça va aller, je vais te guérir.

Un gémissement plaintif s’échappa du corps immobile, me faisant comprendre qu’elle m’avait comprise mais aussi qu’elle souffrait.

Je me concentrai du mieux que je le pus sur elle, sur son corps déchiqueté et sa blessure la plus grave.

La vague guérisseuse commença immédiatement son effet, et un soupir de soulagement se fit entendre au même moment. Seulement j’ignorai s’il venait de moi ou de Marli.

Je reconstruisais doucement les chairs déchiquetées de mon amie en tentant de ne pas me laisser déconcentrer par les bruits de la nuit. Le problème était que la guérison prenait un temps considérable et je ne comprenais pas pourquoi. Le pouvoir du loup aurait dû m’aider et accélérer les choses, or, j’avais les plus grandes difficultés à soigner Marli plus rapidement qu’un humain. Soudain, en balayant rapidement le corps de la louve grâce à mon pouvoir, je m’aperçus qu’une zone de quelques centimètres ne guérissait pas alors que j’étais passée dessus plusieurs fois. Je me concentrais un peu plus, accentuant la puissance de la vague, mais rien n’y faisait. Il y avait quelque chose qui empêchait la guérison et qui ne parvenait pas à être expulser des chairs. J’allais devoir utiliser autre chose que mon pouvoir, et ça n’allait pas être agréable.

- Marli. Chuchotai-je doucement pour ne pas l’effrayer. Il y a quelque chose qui empêche mon pouvoir de fonctionner et je vais devoir l’enlever mais… ça risque de faire mal. Alors s’il te plait essaie de ne pas bouger.

Je priai pour qu’elle m’ait entendue et comprise, si, sous l’effet de la douleur, elle se mettait à m’attaquer, j’étais très mal.

Prenant mon courage à deux mains, je m’approchai doucement de la plaie aux côtes de Marli, lui faisant sentir par mon contact que je m’en approchais de plus en plus. Lorsque j’atteignis les bords encore ouverts, de la blessure, la louve sursauta mais ne montra aucun signe d’agressivité. Je plongeai donc les doigts dans les lambeaux de chairs ensanglantés, à la recherche de quelque chose qui n’aurait rien à faire là. Je pouvais entendre Marli gronder doucement en serrant les dents sous la douleur. Merde ! Je détestais vraiment mes capacités dans ces moments-là !

- Ca va aller Marli, je… Je l’ai ! M’écriai-je soudain en retirant un ridiculement petit morceau de… je ne savais quoi. Je tentai ensuite de le nettoyer du mieux que je pouvais dans mon t-shirt avant de le porter le plus proche possible de mes yeux qui s’étaient un peu habitués à l’obscurité. Mais ce ne fut pas ma vue qui m’indiqua de quoi il s’agissait mais mon odorat. L’odeur métallique caractéristique qui se dégagea du petit morceau m’envoya une bonne dose d’adrénaline dans les veines. Bon sang, ce métal, j’en étais sure, c’était de l’argent. Ces enfoirés de vampires attaquaient pour tuer, compris-je avec certitude.

L’angoisse m’envahit en une fraction de seconde. Michael était peut-être fort  mais il était tout aussi allergique à l’argent que n’importe quels loups.

Un autre gémissement plaintif me ramena à ce qui se passait à côté de moi. Marli avait toujours besoin d’aide mais cette fois, je ne pouvais plus me permettre de perdre du temps. J’avais sous-estimé la profondeur de ses blessures et à présent je connaissais un moyen d’accélérer la guérison même si j’étais effrayée à l’idée d’utiliser ce pouvoir que je connaissais encore si peu, sur ma meilleure amie. Pourtant j’étais bel et bien décidée à faire tout ce qu’il fallait pour me rendre le plus rapidement possible auprès de mon compagnon.

 

Dix minutes plus tard, je filais au volant de la Lamborghini de Michael, en direction de la maison de verre et de béton, avec Marli sous forme humaine, sur le siège passager. Je ne cessais de la regarder du coin de l’œil, paniquée à l’idée que l’une de ses blessures ne s’ouvre à nouveau.

- Chérie arrête de t’inquiéter, ça va aller je te dis. Tenta-t-elle de me rassurer, mais sa voix était si faible que l’effet fut inverse.

- Marli, je suis désolée, si nous avions plus de temps…

- Je sais mais ça va, tu as guéris le principal et je ne perds plus de sang. Me dit-elle. Moi aussi je veux arriver le plus vite possible.

Ses yeux, habituellement si pleins de joie, étaient à présent hantés… et je savais pourquoi.

Une fois que la plaie la plus importante avait été refermée, elle s’était sentie suffisamment bien pour se retransformer, et elle m’avait alors expliquée que les vampires avaient attaqué une trentaine de minutes plus tôt, sans que personne ne se rende compte de leur présence. Les loups présents avaient alors essayé de se défendre mais les vampires étaient armés de sortes de griffes en argent et la dizaine de lycans présents avaient tout juste réussi à contenir les cinq assaillants. La rage s’était lue sur son visage tandis qu’elle me racontait les évènements qui s’étaient déroulés quelques minutes plus tôt. Mais la rage fut rapidement remplacée par de l’inquiétude, lorsque Marli me raconta que Nathan lui avait demandée de s’enfuir pour essayer de nous trouver Michael et moi, afin de nous ramener le plus vite possible. Elle avait d’abord refusé, ne supportant pas de laisser son compagnon combattre seul contre les sangsues, mais sous ses supplications, et la conscience qu’il leur manquerait le pouvoir de l’alpha pour gagner cette bataille, elle avait fini par céder. Mais alors qu’elle s’enfuyait, l’un des vampires la rattrapa, et la balança contre l’un des murs de la maison, l’entaillant sévèrement au passage, avec ses griffes d’argent. Sa dernière vision avant de s’enfuir dans la forêt bordant la maison fut celle de Nathan se jetant sur le vampire à mains nues en lui hurlant de courir le plus loin possible.

En y repensant, des frissons d’horreurs me parcoururent entièrement. Seigneur s’il était arrivé malheur à Nathan, Marli ne s’en remettrai jamais, Michael non plus d’ailleurs, quant à moi…

Je décidai de ne pas m’attarder sur cette idée effrayante, je devais être forte, pour Marli, pour Michael, et pour le reste de la meute.

Et c’est ce qui me permit de ne pas céder à la panique en hurlant comme une folle durant le dernier kilomètre qui nous séparait encore de la maison.

Au moment où nous nous engagions dans le chemin de terre menant à la demeure de Michael, je décidai d’éteindre les phares, ne tenant pas à dévoiler notre position aux éventuels vampires qui nous attendaient peut-être.

Aux abords de la bâtisse, tout semblait beaucoup trop calme, comme si tout était fini. J’étais partagée entre l’espoir et la frayeur. Si les combats avaient cessé, qui avait gagné ?

Mais un bruit de fracas suivi de verre brisé me détrompa rapidement. Face à nous, un des vampires venait d’être projeté par l’une des baies vitrées, le corps étrangement plié en deux, comme si un terrible impact au niveau de l’estomac, l’avait propulsé au-dessus du sol. La seconde d’après, un loup tacheté s’élança par le trou formé par le vampire pour lui atterrir directement dessus, ses larges pattes écrasant le torse de la sangsue. Le loup ouvrit alors une gueule gigantesque aux crocs proéminents, et l’abattit sans pitié sur le cou du vampire, détachant sa tête qui roula piteusement sur le côté, dans un « crac » humide qui se répercuta jusqu’à l’intérieur de l’habitacle de la voiture.

Je retins avec peine un cri de joie et me tournai vers Marli à la place.

- Est-ce que c’est Nathan ? Lui demandai-je pleine d’espoir. Marli me fixa avec des yeux surpris.

- Chérie, tu ne le reconnais pas ? C’est Michael. Me répondit-elle en me prenant la main.

J’eu un instant de perplexité, et je regardai mon amie sans comprendre. C’était impossible, mon loup à moi était argenté, et sa robe unie. Mais dans ce cas, s’il s’agissait bien de Michael, alors ces taches sur son pelage, c’était… Du sang !

Le mot s’inscrivit en lettres rouges dans mon esprit et sans prendre la moindre des précautions que mon compagnon m’avait recommandée, je sortis en trombe du véhicule, me précipitant pour vérifier l’état de mon loup. En m’entendant arriver, le lycan se retourna d’un bond, en appuie sur ses pattes arrières, prêt à attaquer. Et bizarrement, loin de me freiner dans mon approche, j’accélérai encore ma course pour le retrouver encore plus vite. Je me jetai à son cou à l’instant où j’arrivai à sa hauteur. Ce geste inconsidéré aurait pu me couter la vie mais Michael avait déjà dû me reconnaitre car il ne manifesta aucun comportement agressif envers moi, poussant même un incroyable soupir de soulagement au moment où mes bras se refermaient autour de son encolure. J’inspectai sans tarder la moindre petite parcelle du pelage de mon compagnon pour me rendre compte avec soulagement que le sang ne lui appartenait pas.

- Michael, ça va tu n’as rien ? Lui demandai-je sans me soucier du fait qu’il ne pouvait pas me répondre.

Il se contenta de poser sa truffe humide dans mon cou et je sus exactement ce qu’il ressentait. Il allait bien, maintenant que j’étais là.

Il se redressa une dizaine de seconde plus tard, les oreilles pointées vers l’avant, le regard fixé derrière moi. Marli venait de sortir de la voiture et avançait péniblement dans notre direction.

- Je n’ai pas pu la soigner entièrement mais elle ne perd plus de sang et sa blessure aux côtes est refermée. Mais Michael… Il y avait un bout de métal dans la plaie et… c’était de l’argent. L’informai-je.

Il avait légèrement remué la queue en voyant Marli, manifestant sa joie de la retrouver vivante, pourtant au moment où j’avais mentionné l’argent, il avait baissé la tête comme un signe de découragement. Visiblement il était au courant et il avait dû voir les ravages que les vampires avait fait sur ses loups. Il fallait absolument que je vois de mes propres yeux ce qui s’était passé à l’intérieur, peut être pourrais-je y faire quelque chose, peut-être certains loups pouvaient encore être sauvés comme je l’avais fait avec Marli, peut-être que mes amis s’en étaient sortis.

Tant de questions sans réponse finiraient par me rendre folle, il fallait que j’aille à l’intérieur pour constater les dégâts par moi-même.

Relâchant finalement mon étreinte, je me dirigeai d’un pas décidé vers la bâtisse, mais Michael s’interposa presque immédiatement, me barrant le chemin de son corps de loup.

- Qu’est-ce que tu fais ? M’écriai-je aussitôt. Je dois aller voir s’il y a des blessés.

Mais mon compagnon me repoussa doucement de la tête, me ramenant vers la voiture.

- Michael… arrête enfin, ce n’est pas le moment de faire l’idiot, je dois…

Un bruit de verre brisé écrasé nous fit alors tous tourner la tête en même temps. Nathan, visiblement pas mal amoché, boitait dans notre direction en passant par la baie vitrée qu’avait détruite Michael.

Il semblait sur le point de s’effondrer à chaque pas. Et mon compagnon accourut à ses côtés pour lui apporter un peu de soutien. Marli se jeta presque dans ses bras, en poussant un cri de joie, sans se soucier de leurs blessures à tous les deux. Heureusement, à part quelques entailles peu profondes, Nathan ne semblait pas gravement blessé et sa faiblesse paraissait plus être due à l’épuisement qu’à autre chose. Du moins, c’est ce qu’il me semblait, j’étais restée un peu à l’écart, laissant les loups profiter de leur retrouvaille. Lorsque Nathan m’aperçut finalement, il se dégagea doucement de l’étreinte de Marli et avança vers moi avec un grand sourire, mimant un « merci » silencieux, les bras tendus en avant, prêt à me serrer contre lui pour avoir sauvé sa femme. Ce n’est que lorsque je vis l’horreur traverser ses yeux que je compris qu’il était trop tard.

Un vampire perché sur l’une des branches de l’arbre le plus proche, se jeta sur moi, me renversant complètement sur le sol, tandis que ma tête venait heurter une grosse pierre. Je n’eus pas même le temps de crier, je n’eus pas non plus le temps de réaliser ce qui se passait réellement. Dans un rugissement de rage, une tornade s’abattit sur le vampire, le propulsant à plusieurs mètres de moi. Marli poussa un cri de frayeur terrible et l’instant d’après la tête du vampire roulait à mes pieds. Je regardai les yeux grands ouverts de la sangsue qui semblaient me fixer d’un air moqueur, un rictus affreux déformait sa bouche en une grimace de douleur. Soudain reprenant mes esprits, je poussai malgré moi un cri d’effroi, reculant autant que je le pouvais, alors que j’étais toujours assise par terre, le sol caillouteux écorchant mes mains. Deux bras puissants s’enroulèrent autour de mes épaules et je hurlai de plus belle, un autre vampire venait m’attaquer. Je cherchai à me défendre, envoyant mes mains, mes pieds, de manière désordonnée sur mon assaillant, tentant de me libérer de cette étreinte d’acier. Un bruit terrible résonnait à mes oreilles et je n’entendais rien d’autre que ces grondements assourdissants. Mon dieu sauvez-moi, priai-je intérieurement, je ne voulais pas mourir, pas comme ça, pas sans lui avoir dit que...

- Lucy ! hurlait Michael à quelques centimètres de mon oreille. Lucy ! C’est moi.

Je cessai de me débattre instantanément. Ce n’était pas un vampire, c’était mon loup garou qui tentait de me calmer et d’endiguer la crise de panique qui était survenue à l’instant où j’avais senti le poids du vampire sur moi. Michael avait dû se retransformer en humain pour m’empêcher de me blesser, et le bruit assourdissant n’était autre que sa voix m’enjoignant de me calmer. Je voulais le rassurer quand un autre cri attira toute mon attention. Cette fois c’était Marli, et elle m’appelait, elle hurlait mon nom avec désespoir.

Je me relevais sans attendre, malgré les protestations de Michael, qui aurait voulu s’assurer que mon choc à la tête n’allait pas me causer plus qu’une petite bosse.

J’accourais vers ma meilleure amie, totalement paniquée, agenouillée devant un corps étendu, agité par de fortes secousses. Je me jetai littéralement à genoux, cherchant à comprendre ce qui s’était passé. C’était Nathan, il m’avait sauvée, il s’était jeté sur le vampire et l’avait décapité à mains nues. Je parcourais rapidement son corps, pris de convulsions, des yeux, cherchant la blessure qui causait tant de panique à mon amie, quand j’arrivai finalement à sa tête. Trois longues estafilades lui tranchaient littéralement le côté gauche du visage, prenant naissance au-dessus du sourcil et s’arrêtant au niveau de la mâchoire. Sa paupière était fermée mais un liquide opaque s’en écoulait, ne me laissant que peu d’espoir quant à l’état de son œil.

Michael arriva à mes côtés quelques secondes après moi.

- Bordel, qu’est-ce que… Nom de dieu, Nathan… Jura-t-il immédiatement.

Marli se tenait prostrée, à côté de son époux, serrant sa main contre elle, tandis que les larmes inondaient son beau visage.

Je me revis soudain quelques jours plus tôt, dans cette même position, serrant la main de Van, tandis qu’il mourrait sous mes yeux impuissants. Non c’était hors de question, je n’allais pas le laisser mourir, je n’étais plus impuissante et j’allais le protéger. Il était à moi, il faisait partie de ma meute et je le sauverai quoi qu’il m’en coute.

- Je t’ai sauvée… n’est-ce pas… tu vas bien… Michael… Michael je l’ai sauvée. Ne cessait de répéter Nathan, en proie au délire. Sa diction était étrange, sa lèvre fendue ne lui permettant pas d’articuler correctement.

- Oui… Nathan, mon vieux, tu l’as sauvée. Ça va aller maintenant, laisse-la prendre soin de toi, elle va te guérir.

- Michael… J’ai… J’ai mal… gémit-il un peu trop doucement à mon gout.

Je me concentrai du mieux que je le pouvais malgré l’angoisse qui grandissait en moi. J’avais déjà utilisé une grande partie de mes forces pour soigner Marli et, devant de nouveau faire appel à mon pouvoir, aussi peu de temps après, je craignais de ne pas y parvenir.

- Tu ne me lâches pas mec, c’est bien compris ! Tu tiens le coup ! Lucy va… Bordel, qu’est-ce que tu fais ? S’impatienta mon compagnon.

Je décidai de faire abstraction de la remarque de Michael qui parlait sous le coup de l’inquiétude et qui ne m’aiderait en rien à me concentrer si je m’y attardais.

- Je l’ai sauvée… n’est-ce pas… Michael… elle va bien ? Michael, je n’y vois rien… je l’ai sauvée n’est-ce pas ? Demandait Nathan, encore et encore malgré les réponses que Michael lui donnaient à chaque fois.

Bon sang mais que se passait-il, et où était ce foutu pouvoir ? Je devais le trouver à tout prix, au fond de moi, je savais qu’il était là, quelque part… au fond… tout au fond… tout près de mon désir de le sauver, de les sauver tous.

La lueur dorée s’échappa de moi dans une explosion de lumière, aussi brillante qu’un soleil, aussi forte que mon besoin de protéger mon ami. Elle s’infiltra en Nathan, nimbant son visage d’une aura angélique. Un soupir de soulagement s’échappa de ses lèvres ainsi que de celles de Michael.

Je me concentrai immédiatement sur son œil qui semblait totalement détruit par les griffes d’argent du vampire.

La reconstruction de son œil me pris de nombreuses minutes et un effort considérable. Mais lorsque la lueur eut fini son travail, l’œil était de nouveau en parfait état et complètement opérationnel.

A cet instant, je relâchai ma concentration une fraction de seconde, totalement épuisée, et la lueur en profita pour s’échapper du corps de Nathan et retrouver sa place au fond de moi.

- Non ! Criai-je pour moi-même. Non ! Je n’ai pas fini !

Mais la lueur refusait de revenir et je m’écroulai à côté de Nathan, sans force, mes membres ne me soutenant plus.

J’avais réussi à soigner son œil et les fêlures tracées par les griffes sur l’os de son crâne, mais il restait les estafilades sur son visage. Pourtant, je savais que sa vie n’était plus en danger et les autres aussi devaient le savoir parce que ni Michael, ni Marli ne me demandèrent de puiser dans mes dernières forces pour finir le travail. Néanmoins, je me forçai à me redresser de moi-même pour continuer la guérison même si je devais utiliser mon pouvoir habituel pour ça.

Mais c’est Nathan lui-même qui me stoppa dans mon action, me souriant de sa bouche fendue.

- Ca va maintenant. Me dit-il doucement. Je vais bien Lucy, grâce à toi.

- Non, tu as encore… Mais je ne parvenais même pas à finir ma phrase.

- Tu n’en peux plus, et s’il te reste des forces, je préfère que tu les utilises pour les autres loups à l’intérieur qui sont plus grièvement blessés que moi. M’expliqua-t-il avec calme. Visiblement mon pouvoir pouvait aussi faire office d’anxiolytique, parce qu’il avait également ramené Nathan à la normal, malgré l’état de choc qui l’avait secoué quelques minutes plus tôt.

- Il a raison amour. Garde tes forces. Tu as été incroyable. Me dit Michael en me serrant fort dans ses bras.

Dieu merci, il était là, et heureusement, sans quoi je me serais complètement effondrée, au sens propre comme au sens figuré.

- Est-ce que les vampires sont tous morts. Demanda Marli entre deux baisers de soulagement qu’elle ne cessait d’administrer à son compagnon qui tentait de se redresser malgré les assauts incessants de sa femme.

Michael réfléchit quelques secondes avant de répondre.

- J’en ai eu deux, un qui m’attendait devant la maison, et l’autre au moment où vous êtes arrivée. Nous informa-t-il.

- Moi aussi j’en ai eu deux en comptant celui-là. Annonça Nathan en nous indiquant le corps étêté du vampire à quelques mètres de nous. J’ai tué celui qui t’avais blessée. Ajouta-t-il pour Marli, en la regardant tendrement et en posant une main sur sa joue. Dieu que ces deux-là s’aimaient ! C’aurait été une véritable tragédie s’il avait été séparés, pensai-je en remerciant le ciel d’avoir Michael à mes côtés. Mais je revenais rapidement à la réalité après un rapide calcul.

- Une minute ! M’écriai-je, reprenant du poil de la bête instantanément et m’adressant à Michael. Marli m’a dit qu’ils étaient cinq. Si tu en as tué deux et que Nathan en a aussi tué deux…

Mais je n’eus pas le temps de finir ma phrase, au loin un cri perçant retentit dans le silence de la nuit, juste avant que la voix de Van résonne sur un seul mot, un seul nom.

- Juliaaaaaaaaan !

 

Suite>>

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6 mai 2012 7 06 /05 /mai /2012 20:33

- Michael ? Tu es sure que ça va aller ? M’inquiétai-je en bouclant ma ceinture sur le siège passager de la Lamborghini. Je peux conduire si tu ne te sens pas…

- Ca va. Me coupa-t-il durement, les dents serrées et les mains fermement agrippées au volant.

Je n’allais surement pas me formaliser de son ton, je savais que c’était l’inquiétude qui le faisait agir de la sorte, j’étais moi-même sur le point d’exploser.

Apres notre prise de conscience sur la glace, concernant une attaque potentielle de la meute, nous nous étions précipités dans le parking souterrain pour rentrer le plus rapidement possible. Michael avait immédiatement fait mention d’une attaque mais en réalité ce que nous savions c’était que la meute était en danger. Je pouvais le sentir au fond de moi, la chaleur de ces derniers jours, qui me remplissait depuis que j’avais senti le pouvoir lupin m’envahir, avait disparu… enfin pas réellement disparu mais plutôt utilisée pour autre chose que pour moi. Je ne savais pas exactement ce que ressentait Michael mais étant donné sa réaction, j’imaginais aisément que c’était douloureux.

Mon compagnon marmonnait des mots incompréhensibles tandis que nous quittions en trombe le parking, nous insérant dans la circulation, heureusement fluide à cette heure-ci, du centre-ville.

- Pourquoi… Pourquoi maintenant ? Ne cessait de répéter Michael.

- Calme-toi. L’encourageai-je, on ne sait pas ce qui se passe, c’est peut-être moins grave que ce que l’on imagine.

- Non, c’est grave au contraire, mes loups se font décimer en ce moment même, je peux le sentir, ils… ils ont besoin de moi et je ne suis pas là ! S’insurgea-t-il.

Un terrible sentiment de culpabilité me frappa soudain, mais j’ignorais s’il s’agissait du miens, pour avoir retenu Michael toute la soirée loin de sa meute, où s’il s’agissait du sien pour ne pas se trouver avec ses loups en ce moment.

- Et tu peux savoir s’ils sont nombreux à être attaqués ? Tentai-je de grappiller quelques informations.

Je savais que j’en ressentais moins que mon compagnon et l’espoir qu’il puisse m’éclairer sur la situation et peut-être même me rassurer un peu, m’empêchait de céder à la panique et de hurler mon désespoir.

Michael resserra encore plus sa prise sur le volant, qui commençait à grincer en signe de protestation.

- Une dizaine je dirais, peut-être plus. Bon sang, c’est pas vrai ! S’énerva-t-il en ralentissant pour éviter de rentrer dans un camion devant nous.

- Une dizaine ! Mais Michael, le seul endroit où il y a une dizaine de loups de la meute réunis, c’est…

- … Ma maison. Finit-il à ma place et en grognant.

- Michael… Couinai-je fébrilement en comprenant ce que ça impliquait. Qui y a-t-il ce soir chez toi ?

Je savais que ça n’aurait pas dû avoir tant d’importance à mes yeux et que chaque loup était précieux mais je ne pouvais m’empêcher de penser avant tout à mes amis.

Mon alpha ne répondit pas à ma question, se contentant de fixer plus intensément encore la route devant lui. Je comprenais alors que ce que je craignais le plus était sans doute en train de se produire. Mes amis étaient attaqués et moi non plus, je n’étais pas là, pour leur venir en aide. Des larmes de frustration apparurent au coin de mes yeux.

Mon compagnon lâcha le volant de la main droite pour la poser sur la mienne, serrée en poing sur mon genou.

- Ca va aller amour, dès que j’arriverai, ça ira… se contenta-t-il de me dire.

Quelle idiote ! M’apitoyer sur mon sort alors que mon compagnon était lui aussi dans tous ses états. Je faisais vraiment une compagne pitoyable. Dans ces moments-là, il aurait dû pouvoir compter sur moi, or ce n’était vraiment pas le cas, et il se retrouvait à devoir gérer mon inquiétude en plus de la sienne. Je ne pouvais pas le laisser faire, il allait falloir que je trouve un moyen de me rassurer moi-même.

- Mais quand on arrivera, qu’est-ce que… Qu’est-ce que tu vas faire ? Lui demandai-je péniblement. Je ne voulais pas qu’il pense que je doutais de sa puissance. Je veux dire, si une dizaine de loups ne peuvent pas faire face à la menace qui les attaque en ce moment, qu’est-ce que toi, tu vas pouvoir faire de plus ?

Michael fronça un peu plus les sourcils avant de me répondre.

- Tant que je suis loin d’eux, ils ne bénéficient pas de ma protection. En tant qu’alpha, je suis détenteur d’une force supérieure à n’importe lequel d’entre eux, une force qui est le fruit du pouvoir de chacun des loups, et que j’emmène partout avec moi. Sauf que si je ne suis pas à leur côté, ils ne peuvent pas utiliser cette force qui leur appartient pourtant.

En m’éloignant comme je l’ai fait ce soir, je les ai rendus plus faible. Tout ça c’est ma faute.

- Non, tu ne peux pas dire ça, tentai-je de le rassurer sans grand espoir. Tu ne pouvais pas savoir que…

- Peu importe, je devrais être avec eux, et je ne le suis pas, s’énerva-t-il immédiatement. J’ai été trop imprudent, alors que je devais les protéger.

- Michael, arrête, ce n’est pas ta faute. Lui dis-je en entrelaçant mes doigts aux siens. Ca va aller, tu as raison, nous allons arriver à temps et tu pourras leur venir en aide, et moi aussi… Finis-je avec une détermination dont je ne me savais pas capable.

J’avais bien l’intention d’apporter toute l’aide qui serait possible. Après tout n’étais-je pas une guérisseuse aux super pouvoirs ?

- Non amour, lorsqu’on arrivera, toi, tu restes dans la voiture. M’ordonna-t-il sans même me regarder.

- Quoi ? Mais qu’est-ce que tu racontes, je veux aider moi aussi. Me défendis-je.

Il était hors de question que je reste bien gentiment le cul dans la voiture pendant que mon compagnon allait se battre pour leurs vies.

- Lucy tu ne discutes pas, je ne veux pas avoir à m’inquiéter pour toi en plus de mes loups. Pour une fois, chérie, je t’en prie obéis-moi !

Bon la fin de la phrase était plus suppliante que le début. Il n’empêche que je n’imaginais même pas cette situation possible.

- Mais enfin, je suis capable de me défendre seule, je l’ai déjà prouvé dans le gymnase, et même si tu refuses que je vous aide à combattre, il y aura surement des blessés qui auront besoin de moi. Tentai-je d’argumenter, à juste titre d’ailleurs et Michael le savais pertinemment, son air pensif me l’affirmant.

- Non, c’est trop dangereux, je ne veux pas…

- Michael. Le coupai-je assez durement pour attirer son attention sur la gravité de mon ton. Comme tu le répètes assez souvent, il ne s’agit plus de ta meute, mais de la nôtre. Ce sont mes amis à moi aussi, qui se battent en ce moment même, ce sont les loups qui m’ont accueillie avec chaleur, sans se poser de question, ce sont mes loups. Alors que tu le veuilles ou non, ça ne changera rien.

Michael inspira profondément avant d’esquisser un faible sourire.

- Très bien, je ne peux pas t’en empêcher mais promets-moi que si tu es en danger, tu ne chercheras pas à jouer les héroïnes et tu te mettras à l’abri.

- Je te le promets. Me contentai-je de lui répondre.

- Très bien, nous n’allons pas tarder à arriver. Lorsque j’arrêterai la voiture, je vais me transformer rapidement et les rejoindre, mais toi, je veux que tu fasses attention aux alentours, ne te précipite pas d’accord ? m’avertit Michael.

- D’accord. Mais tu es sûr que c’est bien sage de foncer dans la bataille sans savoir exactement ce qui t’attend ? M’inquiétai-je soudain.

Michael poussa un grondement du fond de sa poitrine.

- Il y a peu de chose qui peuvent représenter une menace pour une dizaine de loups, Amour. Le choix est restreint et en l’occurrence il n’y en a que deux. Une autre meute, ou…

- Des vampires. Finis-je à sa place cette fois-ci.

Bien sûr, il aurait pu s’agir d’une autre meute mais après l’attaque que nous avions subie quelques temps plus tôt dans l’antre des vampires, j’avais désormais peu de doute sur nos assaillants.

- Si ce sont bien des vampires comme je le pense, et aux vues des évènements récents, ce serait assez logique commença Michael, il va falloir la jouer fine. Le pouvoir que je ramène avec moi est substantiel mais j’ignore dans quel état se trouvent mes troupes. Avec une autre meute, il m’aurait suffi de provoquer l’alpha en duel et de le battre, les autres loups ne se seraient plus battus sans lui, mais là… nous allons devoir traquer chacun des vampires qui se cachent dans les parages. C’est pourquoi je veux que tu sois très prudente. Ces rats ont une capacité à se cacher dans les endroits sombres comme personne.

- Je sais. Ne t’en fais pas, je te promets d’être très prudente. Le rassurai-je.

- Et surtout n’oublie pas ce que je t’ai dit, si tu en vois un, tu te caches c’est compris ?

Tu ne fais pas ta maligne, on ne joue pas là. Et si vraiment tu n’as pas le choix et que tu dois te battre, c’est la tête que tu dois viser.

Michael se tourna vers moi pour voir si j’avais bien intégré ce qu’il venait de me dire.

- Je sais, ne t’inquiète pas, je me souviens de ce que tu m’as appris. Lui dis-je. Toi aussi soit prudent, s’il te plait. Je… je ne veux pas te perdre.

- Ca va aller, chérie. Je suis fort, tu n’as pas idée d’à quel point je suis fort alors aie confiance en moi. Me réconforta-t-il, en passant son pouce sur ma main. Amour ? M’interpella-t-il finalement pour me faire tourner la tête vers lui.

Ce que je fis inconsciemment, détaillant son profil qui ne quittait pas les yeux de la route, aussi concentré qu’il pouvait l’être.

- Oui ? Lui demandai-je, inquiète de son besoin d’attirer mon attention sur ce qu’il s’apprêtait à me dire.

- Je t’aime.

Bon sang, si je le perdais j’allais en mourir, aucun doute là-dessus. Il était hors de question que ça arrive, c’était impossible. Et pourtant une angoisse sourde ne quittait pas mon estomac et ma gorge serrée. Et s’il disparaissait de ma vie ce soir, si c’était la dernière fois que je l’entendais prononcer ces mots-là ?

- Michael, je t’… Attention ! Criai-je soudain en voyant une ombre dans le faisceau des phares de la voiture.

Mon compagnon donna un grand coup de volant et la Lamborghini fit une embardée sur le côté, et serait surement partie en tonneau sans les réflexes surhumains du conducteur. Au lieu de ça, le véhicule se stoppa net après un demi-tour brutal.

Michael, une main sur le frein à main, me fixa comme s’il avait vu un fantôme.

- Amour, tu vas bien ? S’empressa-t-il de me demander.

Apres une vérification rapide, je lui répondis par la positive, d’un hochement de tête.

- Michael, c’était quoi ? Lui demandai-je, un peu inquiète, tandis qu’il avait posé ses grandes mains de chaque côté de mon visage, tirant légèrement sur mes paupières inférieures pour examiner mes pupilles. Son air inquiet me dissuada de protester. S’il avait besoin de ça pour se rassurer ça ne me dérangeait pas. Après une ou deux secondes de ce traitement, il me relâcha, mais affichait toujours une expression soucieuse.

- Je suis sûre que tu ne l’as pas touché mais ça ressemblait à… un gros chien.

- Un gros chien… aussi proche de chez moi… ce serait une grosse coïncidence tu ne penses pas ?

- Mais alors… Michael, c’est surement un des loups qui a réussi à s’enfuir. M’écriai-je pleine d’espoir en m’apprêtant à ouvrir la portière pour aller retrouver le rescapé.

- Arrête, reste dans la voiture. On n’est pas sûr que ce loup appartienne à ma meute. Me stoppa-t-il.

- Mais tu as dit que…

- J’ai dit qu’avec les évènements récents, il serait logique que ce soit des vampires, mais je n’en suis pas certain. Ce loup… avec les émotions qui se bousculent en moi, je… je n’arrive pas à savoir s’il m’appartient ou non. Dit-il en fronçant les sourcils. Je vais y aller. Toi, ne bouge pas d’ici, et attends que je t’appelle pour venir.

Sans attendre ma réponse, il se faufila hors de la voiture et disparut dans les ténèbres de la nuit, m’empêchant de distinguer ne serait-ce que sa silhouette.

J’attendis dans le silence le plus complet, espérant capter le moindre petit son pouvant provenir de l’extérieur, et qui pourrait m’indiquer ce qui se passait hors de ma bulle protectrice rudimentaire. J’étais en train de me ronger les sangs, toute seule, pendant ce qui me semblait durer des heures entières alors qu’il n’avait dû se passer qu’une petite poignée de minutes, quand un son étouffé par l’habitacle de la Lamborghini, me parvint enfin.

Je n’étais pas très sûre de ce que j’avais entendu aussi n’osai-je pas sortir, mais quelques secondes plus tard, le son se fit entendre de nouveau, et cette fois-ci, beaucoup plus distinct.

Michael m’appelait et le ton de sa voix ne m’inspirait aucun réconfort.

Je me précipitai hors du véhicule, me cognant la tête à l’armature de la portière dans mon empressement.

- Lucy ! Hurla Michael. Lucy ! Dépêche-toi, je t’en prie.

Mon dieu, faites que ce ne soit pas un de mes amis, par pitié ! Priai-je intérieurement et injustement, je le savais bien, tandis que j’évoluais à tâtons dans l’obscurité la plus totale.

C’était une nuit sans lune et on n’y voyait pas à deux mètres, sans compter que je n’étais pas dotée de l’exceptionnelle vision nocturne des lycans.

- Lucy ! Par ici ! vite ! Hurla de nouveau Michael.

Son ton se faisait de plus en plus pressant, et sa voix m’indiquait qu’il se trouvait encore à plusieurs dizaines de mètres de moi.

Mais bon sang, est-ce qu’on avait encore parcouru une telle distance avec le véhicule après notre rencontre avec le loup ?

- Michael, criai-je à mon tour, continue de me parler, je n’y vois rien, alors je vais me diriger à ta voix.

Soudain un déplacement d’air, juste à côté de moi, me fit bondir à un mètre au-dessus du sol.

- On n’a pas le temps. Me chuchota Michael à l’oreille et en me décollant réellement du sol cette fois-ci. Accroche-toi à mon cou et ne me lâche surtout pas.

Une seconde plus tard nous avions parcouru la distance qui nous séparait de la position initiale de Michael. Bon sang, sortir avec un loup garou avait de sérieux avantages.

En me reposant doucement sur mes pieds, mon compagnon me saisit la main et m’attira doucement vers le sol, avant de la poser sur un pelage particulièrement doux. Je parcourais des doigts la silhouette que je distinguais à peine dans l’obscurité. Soudain mes doigts rencontrèrent quelque chose d’humide et de poisseux, et je n’avais pas besoin de voir pour savoir qu’il s’agissait de sang. Il y en avait beaucoup et je cherchai frénétiquement à trouver une blessure d’où il pourrait provenir.

Michael chuchotait quelque chose au loup blessé et je n’osais interrompre ces mots de réconfort pour lui poser une question… la question.

Enfin il se tut et je décidai de lui faire le compte rendu de ce que j’avais découvert par mes tâtonnements.

- Il ne semble pas y avoir de fracture mais il y a une grosse plaie au niveau des côtes, et d’après les traces de crocs un peu partout… je pense que ce sont bien des vampires qui ont attaqué, les trous sont trop petits pour des crocs de loups. L’informai-je en tentant de ne pas céder à la panique. Je dois m’en occuper tout de suite, ses blessures sont graves et… tout ce sang…

- Je sais, elle en a perdu trop. Me répondit-il.

- Oui mais je vais… soudain le choc de ce que venait de dire Michael me frappa en pleine poitrine et mon cœur s’arrêta l’espace d’un instant, m’empêchant de poursuivre ma phrase.

« Elle » ! Il avait dit « elle » et la seule femelle de la meute c’était…

La main de Michael se saisit de la mienne et la serra fort.

- Lucy, mon amour, la louve que tu vas soigner… c’est Marli.

 

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